Suis allée, tout doux,
toute quiète, jeter journaux, papiers et bocaux aux remparts. Ai
renoncé, toute sage, à me servir dans ce coffre ouvert dans le
désert de la rue, mes tomates sont plus belles et je ne mange ni de
ce pain là, ni d'ailleurs de pain du tout (sauf petits toasts
pré-grillés le matin depuis que suis ici)
J'ai salué, humblement,
l'entêtement de la verdure agrippée aux pierres, lui ai caché sa
prochaine mort,
et puis m'en suis allée,
comme la veille, cheminer un peu dans la ville, sans grand but ce
jour, si ce n'est le besoin de me servir, tout tranquillement,
presque en décomposant les gestes, de mes jambes,
toisée avec réprobation,
absoute par la tendresse
heureuse, l'innocence, la pitié infinie
(et j'espère que votre
indulgence pour mes sottises, et la qualité des images qui sont un
peu floues, comme moi en ces jours, sera à même hauteur)
Dans l'après-midi le ciel
a retrouvé lumière, azur radieux, quelques nuages ourlés
d'éblouissement – ai lu, un peu, vaqué, un peu, vécu, attendu le
soir.
En prenant mes abonnements, au mois de septembre, j'avais dû faire des calculs serrés, et négliger la
danse, qui ne me tentait que très partiellement, mais je suis passée
depuis à l'opéra prendre un billet pour le ballet Preljocal (que je
n'ai jamais vu danser, assez incroyablement, mais il n'a été
programmé, au temps de mon amour pour la danse, ni au Chatelet, ni
au Théâtre de la Ville, ni à Bobigny, à la Cité Internationale
ou à Créteil – là c'étaient plutôt des étrangers – ni bien
entendu au Centre National de la Danse, l'était un peu trop
consacré)
J'avais cherché et
regardé, dans l'après-midi, sur Youtube, des vidéos des ballets
programmés
Ai grimpée ma
petite côte, esprit en attente, un peu navrée de n'avoir eu de
place qu'au parterre (ce que je déteste, petite suis, j'aime
dominer) et au onzième rang, sur un strapontin bin trop près du sol
pour moi..
En
première partie :Royaume Uni,
d'inspiration hip-hop, qui a été créé pour et par des
jeunes filles des «cités»
et qui est
maintenant repris par des danseuses de la compagnie – une belle
fusion.
S'ouvre sur un
univers bleu, les lents mouvements des danseuses, comme des
naïades dans l'élément originel – assises, immobiles, jambes
écartées sur leurs cadres de fauteuils dans un éclairage ocre
rose, une main qui bouge lentement, un geste qui entraîne la danse
etc... de légers décalages, parfois, dans leur danse, qui dessinent
le rythme, des passages de danse pair, impair, une alternance entre
un rythme énergiquement marqué et de lentes danses coulées, un
mélange de sensualité et de malice – et un très beau travail des
lumières.
et donc, après
l'entracte, la reprise de son sacre du printemps
J'avais
aimé ce qu'il en disait :
Réunissant le clan
autour d’une pulsion somme toute biologique, le Sacre du printemps
nous rappelle qu’aussi loin qu’iront les hommes et les femmes
dans leur quête spirituelle, culturelle ou intellectuelle, ils ne
cesseront de buter irrémédiablement sur cette faille.
Comme l’évoque
Pascal Quignard dans Le Sexe et l’effroi : «Nous transportons avec
nous le trouble de notre conception. Il n’est point d’image qui
nous choque qu’elle ne nous rappelle les gestes qui nous firent»
et,
pendant toute la première moitié, et un peu plus, j'ai tenté de
refouler ma petite déception (et je m'interdisais de penser à la
re-création, reconstruction, de la chorégraphie de Nijinski pour
les cent ans du Théâtre des Champs Elysées, que j'ai regardée via
Arte, sans que l'idée fantasmée que je m'en étais faite ne se
fane) – me trottait en tête un petit refrain «un Sacre qui manque
furieusement de sacré», pendant que je regardais, avec plaisir, la
montée de sève dans ces jeunes gens, fort peu soucieux de celle de
la végétation, un très esthétique mélange de rapt-des-Sabines,
West Side Story et cabaret érotique.
Et
puis il y a eu un peu plus du tiers, à la fin, beau, vraiment,
violent, où la communauté était bien là, les frappes du sol par
les corps allongés, la cohésion venue, le plaisir d'admirer et la
superbe danse déchaînée, guerrière, de la jeune fille nue.
Enthousiasme
de la salle, un rien plus modéré chez moi, qui gardais un peu, rodant dans mon esprit, la saveur de mon détachement indifférent devant le début.
Retrouver
la nuit, la place,
redescendre,
le long des restaurants qui s'apprêtaient à fermer.
Surprenant, vous imaginais plutôt grande... Le talent sans doute.
RépondreSupprimerJe garde une grande affection pour Angelin Preljocal qui fut un des premiers artistes à s'opposer au FN à la fin du siècle dernier (eh oui, déjà...)
RépondreSupprimerBayonne 92, un abonnement Scène nationale composé au hasard, et le choc, 13 danseurs, vendredi 13 novembre, "La peau du monde", pas de sensibilité particulière à la danse, c'était au-delà, remuée jusqu'aux tréfonds, une gratitude pour ce chorégraphe qui m'ouvrait un monde, une langue, émotion retrouvée de courts instants seulement par la suite sur d'autres spectacles mais retrouve-t-on une émotion, puis "Annonciation" au Zénith de Pau (salle inhospitalière au possible) et à nouveau ce tout qui comble et font se déserter les mots
RépondreSupprimer1m60 en ma jeunesse dressée sur mes ergots - un bon peu en moins auourd'hui
RépondreSupprimerBallet des photos et des mots : l'opéra opéra.
RépondreSupprimerDominique - opéra curieusement l'opéra - migraine et nausées aujourd'hui (plutôt vaccin sans doute)
RépondreSupprimerfidèle lectrice : en fin de siècle dernier l'était pas si en avance que ça alors ! et là c'était le chorégraphe qui m'intéressait
Elise - j'ai sans doute trop de comparaisons en tête, mais j'avoue beaucoup aimé la fin
Il faut que la tête et les idées soient complètement au service de l'art que nous visitons. Je vous admire. Automne froid par chez nous. ;-)
RépondreSupprimerVite regardé mon abonnement théâtre Liberté pour aussi un ballet de Preljocaj en Février "Ce que j'appelle oubli" crée la biennale de Lyon en 2012 (à suivre )
RépondreSupprimerCurieux l'emplacement de cette Piéta
Ta dernière photo ressemble aux peintures d'Edward Hopper
RépondreSupprimermerci - en beaucoup moins net
RépondreSupprimer