pensées ombreuses
rien qui se puisse dire
et rien à montrer
en suis restée aux taches
que posait la lumière
et ma foi tant pis si je recule devant le 16 de l'atelier d'été de François Bon, me demandant si ne vais pas en rester là (tenterai dimanche peut-être), tant pis si après avoir démarré ce matin avec plaisir justifié ou non et un gros semblant d'application un texte promis je n'arrive pas à renouer avec lui ce soir pour le terminer (sera de toutes façons un peu trop bref je le crains mais il le veut) je recopie tout de même ma contribution au #15 de l'atelier du tiers livre « poétique du récit »
une vague envie de départ
La ville lui était un vêtement familier et bienveillant, qui l'avait accueillie, lui avait donné un rôle, où elle s'était coulée, s'éveillait avec la lumière qui montait le matin, s'infiltrait par le cadre relevé des persiennes entrouvertes, coulait sur les tomettes jusqu'à son lit. Elle posait un pied sur la carrelage encore frais mais dont le rose ensoleillé parlait de tendresse sous la caresse du rayon de jour. Elle s'installait dans le confort d'un programme presque immuable, avec le sourire des quelques surprises ou fantaisies décidées qui viendrait lui ajouter de la vie.
Quand elle montait le soir jusqu'à son petit logement au dessus des salles, poussait les persiennes pour laisser entrer le début de fraicheur et se penchait pour voir, un peu plus bas dans la rue, le soleil qui ne pouvait mourir en gloire dans l'étroitesse du ciel apparent teinter légèrement de rose la coupole de l'église, elle souriait en pensant qu'elle avait presque oublié toute sa vie d'avant ; elle entrait dans la sérénité de la nuit et se nourrissait de l'effacement du camaïeu pastel des façades, des roses grisés des dalles, du trait un peu plus sombre que dessinait le caniveau central.
Elle se pensait partie de ce monde clos sur son passé et sur la persistance de la richesse terrienne que lui apportait le territoire hors les murs qui, disparus, restaient bien présents dans le dessin des rues et l'attitude des habitants qui, même les plus modestes, avait, inconsciemment en eux un peu de la carrure aisée des négociants et propriétaires.
Pourtant lui venait des échos du dehors, plus lointain, par la musique, une certaine prétention à l'élégance des silhouettes, les livres, les galeries, les réceptions juste un peu trop appliquées dans leur civilité pour être l'écho de celles aux marges desquelles elle avait été autrefois, là-bas et montait parfois un vague désir de casser le charme et de s'en aller, un temps, au devant d'une autre vie. Elle suivait la rue qui descendait vers le sud sous les rectangles de tissus peints par des artistes locaux ou élèves accrochés de place en place entre les façades, elle débouchait sur la première des places qui s'articulaient à la pointe de l'ancienne forme de la cité, passait devant les grands bâtiments modernes ou de cette époque ancienne que les historiens disaient moderne et qui est maintenant classique trônant dans l'espace devant des degrés, des parterres ou des boulevards, s'enfonçait face à l'imposante bibliothèque entre des maisons plus larges et simples que celles de la ville, mêlées à quelques petits immeubles soignés et sans intérêt depuis leur naissance, tournait dans une rue qui se défaisait, immeubles et maisons s'espaçant, laissait glisser son appartenance, souriait à la verdure qui débordait au dessus des grilles, à l'ocre et au rose obligatoires des balcons, aux arbres trop jeunes et finissait par déboucher face au petit jouet blanc encore presque tout neuf qui était la gare reconstruite lorsqu'après des dizaines d'années d'attente la ligne vers l'au-delà avait été rouverte.
Les ombres blanches donnent à lire (et à écrire)... :-)
RépondreSupprimermais les contre-ombres ne sont pas venies dans l'écrit
RépondreSupprimerQuel beau texte qui navigue entre nostalgie et sagesse, le simple bonheur d’être vivant.
RépondreSupprimer"une vague envie de départ" par ces rues tachées de lumière ... j'aime... j'aime...
RépondreSupprimermeci Godart, merci Maria, vouq me faites du bien
RépondreSupprimerLes ombres sont nécessaires aussi dans l'esprit...et laisser la lumière inventive renaître ...je sais ...😉à parfois désespérer de ne plus pouvoir penser
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