Dans le dossier Beckett (http://samuel-beckett.net/dossier/) un entretien de Philippe De Jonkheere et Charles Juliet. De ce dernier, à propos de son écriture :
On a à devenir soi-même, car être soi ne vas pas de soi. Être soi ne nous est pas donné. Tout ce que j'écris peut se ramener à cette nécessité. J'ai à devenir moi-même. Pour devenir moi-même, j'ai dû détruire celui que les circonstances avaient fait de moi, puis aller à la rencontre de cet inconnu que j'étais et qu'il me fallait faire entrer en existence. Tout mon travail, depuis quarante ans que j'écris, a été déterminé par ce besoin là : devenir moi-même. Devenir soi-même peut parfois être une longue aventure, fort douloureuse. Cela entraîne de telles remises en cause, de tels bouleversements... En effet, cet oeil intérieur à l'aide duquel on cherche à se percevoir, il fait partie intégrante de ce qu'il a à observer.
Et j'y ai humblement et admirativement acquiescé.
Continuant à tournicoter autour de Beckett, je lis dans le dernier numéro des Cahiers de Jean Vilar, la transcription du speech introductif de Georges Lerminier à un lundi dramatique de l'Alliance Française, en 53, à l'occasion d'En attendant Godot et à la fin :
Il y a une révélation du verbe au bout de la conversation. Quand ils se mettent à brûler trop près de la vérité, à force de parler, ils se réfugient dans le silence : on se tait prudemment et on laisse la plaie qu'on était en train d'agacer dangereusement se refermer : réflexe de défense vitale. Vladimir et Estragon au fond vivent très bien de leur attente.
En fin d'après-midi, concert au Petit Palais, auquel je tenais, vers lequel je suis partie en petite forme et auquel j'ai pu assister entièrement.
Programme composé par Martin Maladon qui était l'invité.
- nouvelle audition de la version pour alto d'Anthèmes de Pierre Boulez, par Odile Auboin, qui l'avait créée à Calvet en juillet - et cette fois, non seulement j'ai été sensible à la virtuosité, la complexité, la rigueur, mais j'y ai trouvé un grand charme.
- Traces I pour violoncelle et bande de Matalon, par Alexis Descharmes - reprenant les termes du compositeur une nappe sonore granuleuse, changeante et dynamique, se forme avec les sédiments et les traces que ces lignes laissent dans leur trajectoire et en réponse un panneau intimiste.
- une série de minuscules pièces de Kurtag signes, jeux et messages par l'alto, le violoncelle et les clarinettes d'Alain Billiard, variées : grave, jubilatoire - très beau Az hit... la chaleur ample de la clarinette, pour commencer, et le trio final allègre et paysan
- Messagesquisses de Boulez, pour violoncelle et six violoncelles (enregistrés sur bande par Descharmes) : assez somptueux - foultitude, rapidité, dialogue.
- et la création de Traces V pour clarinette en bande de Matalon par Alain Billard : matériau complexe - légèreté puis densité.
Il y avait longtemps, je crois, qu'un concert ne m'avait autant plu - et quel plaisir de retrouver ces interprètes.
8 commentaires:
J'en suis restée de ton billet au devenir soi-même.Où rien n'est simple quand on est soi-même l'objet étudié.
J'en tire la difficulté pour un écrivain à écrire une biographie, où la Vérité se trouve confrontée à celle des autres dans un premier temps;où certains écrits sont rejetés car ils font rentrer leur auteur dans le souvenir d'une vive douleur...où le mensonge par omission ou celui de complaisance devient pour l'écrivain d'une clarté biblique...
"Aquelos mountagnos
Que tan hautos soun
M'empachoun de vèire
Mas amours ount soun."
En bonne fille d'occitanie je viens te saluer Tanette et saluer ta montagne noire.
Bonne journée
Aaah le violoncelle!
Et qu'est-ce qu'il accompagne bien les mots de Juliet, non?
J'ai coutume de dire, à l'instar du "On ne naît pas femme, on le devient" de Simone de Beauvoir : "On ne naît pas humain, on le devient". L'ai dit souvent pour les hommes itou. Savoir jouer de son instrument, ne plus produire de fausses notes ou des dissonances, c'est du boulot...
J'adore ce texte de la 1ère partie. Comme à dit Socrate, mon pote, "connais-toi toi-même".
Je suis impressionné par toutes vos activités concerts, lectures et expo.
Je vous envie...
Belle semaine chère Brig !
Bises du lundi,
OLIVIER
JUliet: oui un long et pénible accouchement de lui-même au point que j'ai eu parfois malaise à lire ses journaux . mais le résultat est là..
"On a à devenir soi-même, car être soi ne va pas de soi. Être soi ne nous est pas donné"
Comme c'est vrai!
le chemin de la connaissance de soi même est très long, et rien ne nous y aide, ni l'éducation familiale (bien souvent en ce que les parents projettent sur leurs enfants leurs propres rêves), l'école, qui formate, le travail, qui contraint.
heureusement, on vieillit
Mi sa che il concerto era bellissimo, sei fortunata di vivere in una città cosi ricca di cultura
Oggi ha piovuto, fa anche freddo.
Brigetoun
je ne t'ai vue nulle part aujourd'hui, ça va?
bisous
j'étais entre carcasse - garde-robe hivernale - un peu de politique et deux heures de ce fichu italien qui ne rentre pas.
Ho fredo io - improvisé et sans doute mauvais - où est mon jeune crâne (qui était déjà rebelle aux langues)
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