commentaires

désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

lundi, juillet 27, 2009

26 juillet - fin du "in" pour moi
après avoir beaucoup hésité, me suis propulsée, en cherchant les chemins détournés et à l'ombre, en tout début d'après midi, vers Benoît XII et "loin" de Rachid Ouramdane, un peu faute d'avoir vu son spectacle à Villeneuve, et puis parce que ce solo (qui date d'un an) porte sur un sujet qui a des résonances pour moi.
"Lors d'un récent voyage au Viêtnam et au Cambodge m'est apparue une autre façon de creuser ce sentiment d'être étranger.... je me suis souvenu des pages du carnet militaire de mon père qui avait eu à fouler cette ex-Indochine. ... je voyais qu'on me donnait la place d'un enfant d'ancien colon alors que ce qui liait mon père à cette Indochine était l'héritage d'une autre colonisation, celle qu'il a lui-même vécue en Algérie... Comment la violence des conflits armés nous rend-elle étranger ? Quelle sensibilité naît de cette violence ?"
(photo Erell Melscoët sur le site du festival)
Différents niveaux de textes, liés à différentes expressions du corps, de l'immobilité, danse lente au sol, danse minimaliste, marche, souplesse extrême à pieds joints, danse saccadée qui expriment la violence mais où je voyais surtout les courbes dessinées par les mains seules visibles avec un bout de visage sous la cagoule et voix off de la mère parlant des deux guerres d'Algérie (m'a-t-il semblé) de tortures et d'égorgements, sa voix enregistrée pour un petit rappel factuel, le texte très littéraire qu'il dit, les témoignages au Viêtnam; non des habitants et des vétérans, mais de jeunes américains d'origine vietnamienne venant à la recherche du passé de leur parent, et se découvrant en accord avec ce pays (et je pensais à un ami), avec seulement cet ancien caméraman des troupes vietnamiennes qui déteste la guerre, ne veut pas en parler à ses enfants et petits enfants et regrette de ne pas être parti en France. (et les enfants de ceux qui font les guerres, même quand ils vivent cette période, mais à distance, ont la même impossibilité de savoir ce qu'elles étaient, intérieurement, pour leurs pères)
Que ce soit le thème, que ce soit ces ébauches de danse et leur accord avec ce qui était dit, j'appréciais, mais, est-ce fatigue de ma part ? j'ai aimé, je n'ai jamais été touchée.
La rue des Teinturiers avait encore une langueur de début d'après midi dominicale.
Suis rentrée, par les belles rues désertes, en sentant que je me décomposais (mais j'ai été arrêtée, rue de la République, par un jeune "étudiant photographe" (spécialisation je suppose) qui devait aimer les bouilles défaites et m'a demandé l'autorisation de faire une série de portraits de mon pauvre vieux visage qu'il trouvait beau - intéressant j'aurais mieux compris - tellement ahurie que je n'ai pas pensé à lui demander son nom ou comment je pourrais les voir - tant pis mais ça m'a amusée et dopée pour les derniers mètres).
Je suis partie, en début de nuit, vers les Célestins, voir "un peu de tendresse bordel de merde !" de Dave St Pierre avec un peu d'appréhension parce que j'avais eu des avis enthousiastes, et que j'ai peur que cela fausse ma vision, que mon esprit de contradiction se manifeste ou non. La petite bronca pour me procurer un programme m'a délivrée, et me suis installée au premier rang, à côté de gens charmants.
Stéphane Lépine, dans le programme, parle de "notre incapacité à entrer vraiment en contact avec l'autre" de la stupidité de l'être humain "qui s'arrange toujours pour tomber bêtement amoureux et qui se lance à la recherche de cette putain de tendresse sans jamais parvenir à combler son vide affectif, sa solitude irrémédiable, sa déréliction amoureuse absolue"- et il y a les élans des filles, facilement hystériques, face à des garçons impassibles, ou capables de gestes tendres (un côté un peu tranquillement macho), il y a une dame en noir, très maîtresse, un rien bavarde, en anglais avec des traductions savoureuses, il y a les ébats parfaitement réjouissants des garçons nus et parés de blondes perruques bouclées, qui m'ont fait rire de bon coeur, en parfaite innocence (un petit revenez y des années 70), faunes gamins, pleins de grâce affectée et rigolards. Dave St Pierre dit "Je me découvre une fibre paternelle, qui voit ses ouailles sourire comme des petits fous sur scène à faire mille pirouettes, cabrioles et coups pendables."
Un petit moment de gêne seulement à un moment où sur le visage d'un danseur nu face à moi j'ai pris conscience de la réalité en fait parfaitement réglée de cette spontanéité. Visible aussi dans la lutte des filles entre elles.
Comme est très réglée la danse d'une belle énergie, ces moments où garçons et filles se jettent à terre ou les uns contre les autres (de très beaux portés), ce qui est bien entendu normal , mais se trouve souligné par des ordres criés ou des sonneries.
(photos Raynaud de Lage sur le site du festival)
Et puis, à ma grande fureur, un quart d'heures à peu près avant la fin, pendant qu'ils erraient tous autour d'une fille égarée, une petite douleur m'est venue qui m'a chassée, et la jeune femme qui m'a guidée à travers les loges ne m'a pas consolée en me disant qu'il y avait de très beaux moments dans le petit bout que je manquais.

14 commentaires:

JEA a dit…

Instantané (par le soleil ?) de la rue des Teinturiers : beau dommage que le pack Heineken abandonné là, comme d'autres en nos forêts, ou sur des plages qui n'en peuvent mais voire en randonnées vers des sommets, ne fasse pas rougir les sans-gêne de service.

Brigetoun a dit…

rue de la Masse - la rue des Teinturiers c'est la foule au dessus (l'endroit le plus compact du festival) - le pack c'est couleur locale, même en dehors de cette période, Pétrarque trouvait qu'Avignon était une ville de trop de cailloux, trop de vent et sale, et elle n'a pas changé (ça nous sauve du musée)

JEA a dit…

@ brigetoun
comme s'il y avait des masses de teinturiers... je suis sans excuse d'avoir confondu
assez prosaïquement, lors de la publication de votre chronique illustrée du festival, peut-être ne sera-t-il pas superflu d'ajouter un plan de la ville pour les ploucs de mon genre ?
(la "vérification des mots" pour ce commentaire = acerigolé).

micheline a dit…

alors le véritable "in",de soi??
parti ailleurs sur quelques clichés d'un inconnu??

pierre a dit…

Un bel effort récompensé.
Et à la fin (?) de cette chronique festivalière, l'auteure photographiée, à la une!
La ville va respirer et la rue des Teinturiers son calme.

Brigetoun a dit…

six ou sept théâtres du "off" (jusqu'au 31) sur la longueur de la rue des Teinturiers

maria-d a dit…

7 jours de lecture sans interruption ... en remontant le fil de la toile... un réel bonheur... merci

OLIVIER a dit…

Alors t'es une Star ? Pour moi tu es la Star de l'écriture, de la connaissance et grâce à toi je ne cesse d'apprendre !
Merci infiniment pour ton Amitié !
Bises,
Olivier

Muse a dit…

envie de retenir cette Indochine et cette Algérie, leur guerre, la défaite de nos militaires et surtout la fin de ce vil colonialisme. C'est avec un ami Congolais que j'ai réalisé que l'Histoire ne s'écrivait pas de la même façon selon que l'on était colonisateur et colonisé... Je conçois que iles regards soient différents.

Brigetoun a dit…

l'Indochine vécue par mon grand père, mon père, mes oncles, un peu (très peu) les nièces (je crois) de Bao Daï, et puis quelques années après des amis vietnamiens et chinois, l'Algérie par ma famille pieds-noir, mon amour qui ne passait pas forcément par l'Algérie française, mon père et un oncle, les camarades d'atelier qui devaient y partir à leur corps très défandant et des amis marocains qui me comprenaient quand je me rebellais contre une image carricaturale des colons (en gros petites gens un peu comme les américains venus d'Europe)tout en ne pouvant supporter l'esprit du pieds noir très pieds noir (âge intransigeant) et ces dernières années à Paris des rencontres avec des algériens expatriés à cause de la seconde guerre.
Les principes ne doivent pas amener à des jugements sommaires sur les gens pris dans la bataille

Brigetoun a dit…

moi et l'orthographe !

Gérard a dit…

J'étais grimé c'était moi le photographe !

Brigetoun a dit…

j'avoue que je n'aurais pas détesté savoir ce qu'il avait tiré de ma bouille. Gérard tu es très très jeune

cultive ton jardin a dit…

J'ai lu, chez kelcun, un commentaire de toi signé "une qui ne transmettra rien"

Comment peux-tu dire cela? Je vais parfois chez toi, je commente rarement, mais tu transmets incontestablement quelque chose...

Parfois, je redécouvre un truc ancien qui m'avait laissé un vif souvenir... et je ne savais plus que c'était chez toi. Et pourtant, ça a fait du chemin dans ma tête, en se recombinant à d'autres trucs venus d'ailleurs.

Mais c'est vrai qu'une vache n'y retrouverait pas SON veau.