une photo par antithèse -
Sur France-Culture, hier matin, Guyotat à propos de "Coma" - choc, l'évocation de ce qui entoure le corps allongé. Je n'ai par lu le livre, si je crois connaître l'auteur (je n'ai lu que sur lui et non lui, légère peur) - je découvre en l'écoutant et dans la présentation par l'éditeur qu'il s'agit de tout autre chose - ce qui, dans l'enfant, nourrit ce texte :
"ou bien c'est la fusion avec le monde, ma disparition dans tout ce qui me touche, que je vois, et dans tout ce que je ne vois pas encore. Sans doute ne puis-je alors supporter de n'être qu'un seul moi devant tous ces autres moi....
Quelle douleur aussi de ne pouvoir se partager, être, soi, partagé comme un festin par tout ce qu'on désire manger par toutes les sensations ; par tous les êtres : cette dépouille déchiquetée de petit animal par terre, c'est moi... si ce pouvait être moi."
Il me semble éprouver une douce familiarité - je suis le sable qui s'écoule lentement, inexorablement, dans le trou creusé par un animal invisible - je suis le grain du bois de ma table.
J'écoute sa belle voix, et l'ouverture sur la poésie, la formation de l'homme qui peut dire tranquillement "je sais ce que je sais" ; et je ne le peux pas. Et j'en reste au coma, hold-up sur le livre, qui l'appauvrit, le réduit au prétexte. En m'habillant m'accompagne ce qui n'est pas souvenir mais présent souterrain. Pas le coma, seulement de longues périodes de vulnérabilité extrême, cette vie à l'écart, en suspens, que sont de longues hospitalisations.
Dans la bande vitrée en haut du mur je regarde la lumière du ciel varier, carbone noir luisant adouci par le halo électrique, se réveillant peu à peu jusqu'au gorge de pigeon, moment où je m'endors. Le bruit des savates et le grincement du chariot dans le couloir. Mes mains avec la perf bien à plat sur la couverture, et la sonde qui tire sur mon nez. La lueur par le hublot de la porte - tranquillité - deviner ce que sont les dômes et grands immeubles dont le haute pointe au bas de la vue.
Attendre le passage de l'infirmière. Laquelle ? Ne pas sonner, ignorer la douleur, cette drôle de chose qui circule en moi. Une nuit de quasi liberté, avec uniquement la perfusion, je pense aux pauvres gens qui sont dans la neige, les héros de tous les jours. Une image avec laquelle je joue : un corps en chemise, assis sur les marches de l'escalier de secours à claire-voie où nous allons fumer. Combien de temps pour geler ? La lumière est venue caresser le panneau de bois en face du lit, l'orange de la couverture s'est affirmé, bruit de voix et de rires dans le couloir. Ne pas le dire : c'est une période de liberté, de futilité, de gravité essentielle, et de calme.
12 commentaires:
rapidement puisque je pars dans peu : évocation qui me parle sauf peut-être le cadre et la neige, quatre fois en été et il faisait bien chaud, un banc dans le parc pour fumer et des gens qui vous toisent...
Bonne journée Brig
Coucou,
ron texte-témoignage est très touchant. J'ai connu un peu les mêmes périodes d'attente de l'infirmière, de quelques douleurs,...
Mais pas aussi moralement éprouvante que toi. Ne te dénigre pas tu vaux bien mieux qu'un grain de sable ouu de bois.
Bises,
OLIVIER
mais Olivier c'est très chouette d'être un grain de sable, une plache ou un bout de nuage
J'espère que le mal est passé et que vous pouvez reprendre vos balades et lectures
assise plus confortablement. Grande et bonne musique aujourd'hui, je vous souhaite.
Ce texte m'évoque presque trop de choses.
L'hôpital, oh oui...
Tu as un réel talent, Brigetoun.
Pas si "paumée", Brigetoun, ce que tu exprimes est plein de sens et d'émotion, l'écriture est essentielle. Je n'avais jamais pris le temps de te rendre visite, voilà, c'est fait. A plus tard.
bonjour!merci pour la petite visite en Algérie et Hongrie je pense que c'est devenu international maintenant !-:))))
A propros de l'article ,il est toujours possible de le demander a Ar.. d'Israel s'il s'ensortira!
salut !!
j'ai lu ton commentaire trop tard et je n'arrive pas à l'enlever - merci pour tout - mais je n'accepte pas la dernière phrase - pas du tout
Brigetoun, votre écriture est une musique, douce, mélancolique, belle, forte.
Je suis venue vous dire au revoir.
A bientôt, je penserai à vous de temps à autres.
Tu décris bien des choses qui me parlent et que je n'ai pas encore pu analyser tout à fait.Peut être un jour qui sait?
Mais j'aime beaucoup l'idée d'être le grain du bois! Rien qu'à l'évoquer provoque en moi une sensation de chaleur.
re!!
Vraiment c'est sans arrieres penseés et sans parti pris ,la derniere phrase , juste pour repondre a ton petit commentaire (ce nom m'est venu ,car actuel ,j'aurai pu ecrire un autre nom!
Bri ,ne prends pas cela du mauvais coté ,ce n'est pas mon genre
salutations
allez en paix, mais ce n'était pas tellement le nom que l'état physique que je trouvais intouchable.
Enregistrer un commentaire