RICHESSES - Samedi j'ai flâné en allant aux Halles, avec le but vague de trouver le plus joli cadeau, le plus ostensiblement modeste, le plus conforme aux très éventuels désirs d'une des Maries de la famille, que je devrais croiser le 15 août. Bien entendu, rien ne pouvait remplir ces conditions, et j'ai provisoirement renoncé - la vitrine d'un décorateur m'a fait rêver un moment, la jarre brune a caressé mon oeil, j'ai imaginé la fraîcheur de son vernis sous mes mains - et j'ai réalisé qu'elle n'était pas ostensiblement modeste le moins du monde, et que rien ne prouve que madame ma nièce l'aurait aimée. Je me suis vue la traînant derrière moi (comment ?) tout au long de la rue Joseph Vernet, et négociant sa montée dans le wagon, et j'ai passé mon chemin.
Mais en achetant un bidon d'huile et un filet de belle morue salée, bien odorante, j'ai revue ma jarre, et j'ai jugé qu'elle allait bien dans le cadre, en accord avec les bouteilles, les différentes tapenades et anchoïades, et la mosaïque de textures et couleurs des olives - et j'ai demandé son avis à Ali Baba mais il ne m'a pas répondu. Mais, dans ma maison rose, avec la commode rouge.. ça prend forme.
Toujours Giono : "Nous ne sommes pas sur la Côte d'Azur ici. Nous ne gaulons pas les olives... Nous les ramassons avec les doigts, une à une, sur l'arbre même... Joie de la matière du fruit, lourde, ovale et violette dans la mains.." manque l'odeur.
Sur le chemin du retour, j'ai trouvé, faute de mieux, un petit coeur en céramique, trop petit pour y faire cuire quoi que ce soit, mais dont le vernis rose rougi irait bien à nos coeurs anatomiques tels que je voudrais très arbitrairement qu'ils soient - le type du cadeau amical et inutile.