M’en suis allée dans les rues. Et j’ai retrouvé deux rêveurs, peinant, les pieds tâtonnant et les bras raidis, à la recherche de l’eau pour y poser leur feuille, et la charger de leur désir de voyage. Je l’ai admirée dans sa fine souplesse, les traces de bosses qui faisaient vivre et frémir son bronze, et j’ai eu un peu peur pour eux de la fragilité, le dénuement, l’entêtement de leur espoir.
Impossible, bloquée par la vitre et la langue, de leur demander quel était leur but - j’ai prié Nérée et les siens que ce ne soit pas notre relative richesse, et ses dessous salis.
Le soleil, en montant, n’avait pas encore décoloré le bleu du ciel, l’irradiant juste un peu à la marge. Et ce bleu aspirait les yeux, ennuyés un peu, flottants, dans le vide et le calme absolu des rues.
La place de l’Horloge, au retour, s’étirait lentement, hésitant à entrer dans la journée, pas sure que cela en vaille la peine, avec un petit espoir encore d’attirer des sous.
Ces traces de vie ont disparu, quand je suis descendue vers mon antre et le fleuve. Sur la terre sableuse, au fond, là où s’ancrent les immeubles, un pigeon brun et beige, dans un rayon de soleil qui la teintait de blanc crème, faisait une si jolie tache que je me suis arrêtée. Mais il s’est envolé pour se poser à coté de moi, et perdre un peu de la douceur de ses teintes sur le gris de la rampe.
Dans les derniers filets de soleil qui veulent bien encore plonger à la limite de ma cour, j’ai réuni des brides pour les offrir à mes bonshommes, mais je n’ose, leur beauté grande étant gorgée de tragique
« Ressac des misères aimées à la merci des mers,
en germe
ressuscitent les algues
aux bouches des rameurs couchés entre les lames ;
la débauche des écueils coupe l’ancre charnelle
malgré les alluvions d'îlots sanglants et de sanglots ». Leiris
ou
« En dérive vers les côtes telluriques
Ma mémoire s’est brisée contre un rocher
Comme un miroir que l’éclair a foudroyé
Parmi ces tessons épars sur le plan d’eau
Lui la rosée de mille visages d’aube ». Babacar Sall
et ce presque résumé
« Camarade, voici ton sauf-conduit pour te rendre partout – et pour y souffrir. De la ligne de flottaison aux abysses. Courage s’abreuvant d’infinies variantes. Lieu de délices qui dure un jour.
Ils construisirent une barque avec l’écume de la mer afin de se saisir du rivage le plus lointain. Cette chaîne de récifs c’est eux ». Char
Alors, peut-être, ne leur offrir que Michaux :
« Ils se font enlever en l’air par un attelage de grands oiseaux de mer, quand ils tiennent à accomplir ou terminer un long voyage maritime, et n’ont pas la force magique de se transporter eux-mêmes « par voie de reconstitution ».
Ces oiseaux, le grand ennui avec eux est qu’ils ne peuvent longtemps se passer de poisson et cherchent à se poser sur l’eau, ce qui n’est point l’affaire du voyageur qui, le derrière trempé, regrette de s’être mis en route. »
Hum, peut-être pas.
« Ressac des misères aimées à la merci des mers,
en germe
ressuscitent les algues
aux bouches des rameurs couchés entre les lames ;
la débauche des écueils coupe l’ancre charnelle
malgré les alluvions d'îlots sanglants et de sanglots ». Leiris
ou
« En dérive vers les côtes telluriques
Ma mémoire s’est brisée contre un rocher
Comme un miroir que l’éclair a foudroyé
Parmi ces tessons épars sur le plan d’eau
Lui la rosée de mille visages d’aube ». Babacar Sall
et ce presque résumé
« Camarade, voici ton sauf-conduit pour te rendre partout – et pour y souffrir. De la ligne de flottaison aux abysses. Courage s’abreuvant d’infinies variantes. Lieu de délices qui dure un jour.
Ils construisirent une barque avec l’écume de la mer afin de se saisir du rivage le plus lointain. Cette chaîne de récifs c’est eux ». Char
Alors, peut-être, ne leur offrir que Michaux :
« Ils se font enlever en l’air par un attelage de grands oiseaux de mer, quand ils tiennent à accomplir ou terminer un long voyage maritime, et n’ont pas la force magique de se transporter eux-mêmes « par voie de reconstitution ».
Ces oiseaux, le grand ennui avec eux est qu’ils ne peuvent longtemps se passer de poisson et cherchent à se poser sur l’eau, ce qui n’est point l’affaire du voyageur qui, le derrière trempé, regrette de s’être mis en route. »
Hum, peut-être pas.
P.S. et je suis désolée mais, aujourd'hui plus encore qu'hier, j'ai plein de malheur avec ma connexion et ne peut aller visiter les blogs que fort difficilement
8 commentaires:
Ne jamais regretter de s'être mis en route, quelles que soient les misères, aimées ou pas, et toujours s'abreuver de courage, jusqu'au dernier jour du voyage !
bonne journée Brig
Ca ressemble vraiment à la rentrée tout ça...
Trés beau message
J'adore les "bronzes" ! lors d'une visite au Louvre, j'ai passé du temps avec les "bronzes".
Ta balade est agréable avec ton copain pigeon ! et merci de nous offrir ces auteurs.
Belle semaine chère Brig !
Olivier
Tu as eu des balades plus enthousiastes que ce passe-t-il ?
Trés jolie ballade...
toujours de jolies photos de ciel sur ton blog...et de charmantes ballades, je viens faire un peu de lecture, j'ai beaucoup de retard.. :-)
tes balades gorgées de réminiscen ces culturelles et artistiques, cela vaut bien un sodoku.. bizarre comme toi, je ne m'intéresse guère à ces jeux comme à ceux de société en général et j'en ai parfois peu honte .
timide et solitaire???
Ah, si je commentais à chaque fois que je passais, ce serait pour te dire (te redire) à quel point ton écriture est fine. Je ne trouve pas d'autres adjectifs aujourd'hui. (mais c'est mon manque de vocabulaire pour exprimer ce que je ressens qui est la cause)
Kiki
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