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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

mercredi, septembre 19, 2007

Une porte que j’aime, et que je trouve un peu étrange, un peu comme un morion renaissance, pouvant passer de cette église à un bâtiment civil, mais exigeant de vieilles pierres, un peu aussi un souvenir d’une couverture d’un livre des quinzième ou seizième siècles, peut être espagnol, assimilation qui n’a d’autre vraisemblance que mon imagination, coupée de toute référence.

J’ai cédé au thème des « impromptus littéraires » qui était le parfum des livres (
http://impromptus.fr/dotclear) verbeusement, trop longuement, en rêverie.
Le métal, quand il a ouvert la porte de cette bâtisse, un peu en retrait dans la cour battue par pluie, a raclé le sol avec un bruit sourd, au moment où un premier éclair illuminait de blanc les bâtiments. Dedans, il faisait sombre.

« Voilà, vous êtes dans mon antre, mon monde, le parfum des livres ». Le parfum des livres ? J’ai pensé à l’odeur de cendre ou de tabac qui se dégageait parfois des livres que j’entassais.

Il s’est excusé ; « l’électricité a rendu l’âme - pas eu le temps, et puis je préfère… », en allumant une lampe à pétrole, brusque renvoi à des images de mon enfance. Et comme odeur, oui, il y a eu celle-là, qui n’avait rien de spécifiquement littéraire, sauf peut-être un rappel de contes ou récits surannés, et peu à peu celle de l’encaustique mêlée à l’idée des essences de bois. La caverne d’Ali Baba s’est éclairée un peu, en douceur, et j’ai deviné, avec un début de transe, les rayonnages. « Un trésor », dans un souffle, « mais le parfum ? »

« Vous ne sentez pas ? » - « Je déguste les parfums légers, l’atmosphère aimable, un peu recueillie, mais c’est votre pièce, l’écrin ». Son regard intimidant. « Je pensais que vous sauriez.. » et il a ouvert une malle en bois de camphre, près de nous, libérant une piquante, lourde, bouffée, souvenir persistant de senteurs… Je me suis penchée et j’ai sorti des brochures retenues par un lien de cuir ; je les ai soulevées – « oui, mais… » - « C’est trop facile ? » - « Oh, j’aime, mais » en me redressant .

Je regardais, à la fois goulument et lentement si cela est possible, pendant que l’eau fouettait la porte et retentissait dans toute la pièce. Dans l’ombre des rangées de dos sombres, avec ou sans nervures, des lettres d’or bruni ou brillant sur des rouges, des bruns, des verts assourdis, et je me suis souvenue de mon petit trésor. J’ai sorti un livre au hasard – le cuir sous ma main était souple et si doux. L’odeur, quand je me suis penchée sur lui, était subtile mais extraordinairement présente, et en touchant le papier épais, vélin ou non je ne savais pas, j’ai cru qu’en effet de ces tons d’ivoire, de ces lettres épaisses et irrégulières, émanait une vague senteur, mais je n’en étais pas sure.

« N’est-ce pas ? et puis, il y a ça » et il m’a tendu une reliure de soie moirée, un peu passée. Mes mains l’ont accueillie avec une petite crainte, et, sans que j’intervienne ou en sois consciente, les pages se sont ouvertes sur une image de chevalier protégée par un écran transparent, un signet, une brune pétale de rose, et un parfum, mélange de poussière et d’un souvenir d’enivrement. Et, continuant, nous avons trouvé des brins de lavande, des herbes, et puis des livres roux, un peu piqués, dont je me suis imaginée qu’ils me renvoyaient un peu de métal rouillé, mêlé de réglisse, et plus loin, les livres brochés d’âges divers, neutres.

« C’est vrai, mais c’est la peau du livre, sa part d’objet ». Alors, assis à une table, près de la fenêtre, nous nous sommes racontés la garrigue et les pierres au soleil de Giono, les filets, le goudron et les clams de David Coperfield, la boue et le cheval mort de la route des Flandres, et nous nous levions pour aller chercher confirmation sur les rayons ou dans des caisses, et nous ramenions nos découvertes, jusqu’à ce que l’angélus sonne et que l’on frappe à la porte. L’orage s’en était allé.
Ici aussi l’orage qui m’a terrorisée lundi soir nous a quittés, mais dans le jardin de la Maison de Jean Vilar, où nous écoutions Pierre Santini lire des passages du Memento de Vilar, il faisait un froid de louveteau sournois, et entre petite douleur et muscles contractés pour fuir la température j’ai abandonné au bout d’une heure, malgré le charme de la chose. Et en débouchant sur la place de l’horloge, j’ai levé les yeux, attirée par la splendeur rose des tours.

7 commentaires:

Rosie a dit…

Bonjour mon amie,

Je t'ai laissé un commentaire sur le post ou je t'avais envoyé la chaîne des bizous. Encore une fois je m'excuse.

Ton texte est superbe, j'aime tes écrits, tes photos sont très belles aussi.

J'ai un post aujourd'hui, le 19 septembre, sur les patois québécois qui devrait te plaire.

Bonne journée à toi et bisous de ta p'tite amie du Québec. xoxoxo

marie.l a dit…

brin de lavande, pétales séchés, images pieuses ou signets délavés, j'en ai trouvés aussi, ça et là, et il y a bien longtemps, une carte postale qui me ramenait vers une excursion juvénile... Tout était sans odeur, sauf celui des souvenirs.
Si je ne suis pas venue hier c'est que scan et scinti m'ont retenue et ensuite une sorte d'épuisement à éliminer tous ces produits qui pèsent si lourds !
Bonne journée Brig en souhaitant que la hantise de ce vilain orage soit passé !

Anonyme a dit…

quand on ouvre un livre, part d'une vie antérieure, oublié sur une étagère, l'odeur du passé surgit de ses pages, entrainant les souvenirs..

j'associe très souvent les livres avec l'endroit où je les ai lus, l'époque de ma vie;
la perception que j'en ai eus peut-être très différente d'une période à l'autre.
il y a le bon livre au bon moment, mais aussi le bon livre au mauvais moment,et je passe complètement à côté, ou encore le mauvis livre au bon moment et je m'extasie sur une bluette..

buona giornata

OLIVIER a dit…

Quel beau titre "le parfum des livres" ! j'adore les livres, alors j'en commande et me voilà en retard d'une bonne cinquantaine.
J'ai aimé ton texte. Ta dernière photo est splendide ! Au sujet de l'orage, j'ai eu peur aussi.
Peux tu me conseiller un livre de René Char ? qui, j'ai entendu, était un passionné de rugby. Merci !
Belle Journée !!
Olivier

Anonyme a dit…

Je me suis fondu dans ton texte après avoir passé plus de quarante années dans l'odeur du papier, de l'encre et bien-sûr des livres..je ne te dis pas çà pour faire bonne impression...il me reste une once de caractère.

Brigetoun a dit…

Gérard tu n'as besoin que de toi-mêle, y compris dans les calembours,mais aussi l'oeil précis et touhjours bienveillant, pour faire bonne impression

Muse a dit…

un bien joli texte que je lis tardivement, ma journée a été plus que chargée!