Mes yeux pleurent de sommeil et bâillement et mes deux mains grattent durement mon crâne à la recherche d’une pensée.

L’oranger et le bougainvillier ont pris leurs quartiers d’hiver, et je regarde avec pitié les autres survivants de la cour, tentant de leur expliquer que l’antre est trop petit pour les héberger. Géraniums et buis y sont résignés, pour la véronique, le piment, le jasmin et le bidule de la famille des bambous je suis plus inquiète - les autres sont voués à la mort.

Le portail des Carmes, dans sa déchéance (mais en été il ouvre sur un théâtre spartiate) m’a sans doute gueulé une malédiction, bouche noire ouverte sur des murs dégradés de garage, trou d’ombre sous la dentelle de ses heures de gloire : j’ai admiré ce qui sortait des mains autour de la table, mais, malgré une intervention sauvetage sur la fin, j’étais totalement mécontente de ce que je faisais. Je l’ai laissé, m’imposant d’essayer d’y revenir jeudi prochain et j’ai compensé mes manques en faisant le clown. Mauvaise passe.
Goutte aux nez et remuant mes orteils paresseux,
pour tenter de les réveiller
je m’appuis au mur,
arcboutée au dessus du radiateur.
Tête levée et yeux fermés
j’écoute les rafales
et je vois une mer noire de lumière et puissance,
sous un dur ciel irradié de bleu,
éclater en fusées de gouttes blanches,
lumineuses comme de l’argent,sur d’hypothétiques rochers.