J’écoutais dans mon lit de braves gens disserter sur ce monde idéal dans lequel vivent les « décideurs » de tout poil, où vit l’homo économicus celui qui réfléchit chacun de ses actes et ne se trompe jamais sur ses intérêts, celui où il est parfaitement stupéfiant que des français se considèrent comme partie des couches moyennes alors qu’ils n’ont même pas la moitié des revenus que leur avait attribué Copé (quand je pense qu’il y a tant de gens qui lui font confiance et ne lui rient pas au nez), celui où les gens font des heures supplémentaires ou travaillent le dimanche uniquement s’ils sont volontaires et où cela leur est possible dès lors qu’ils le veulent et puis Pierre Moscovici est venu nous dire qu’il n’était pas assez masochiste pour vouloir un referendum sur le « nouveau » traité que bien sur, en digne et responsable représentant de ce pauvre idiot de peuple, il approuverait. Mes orteils remuaient sous les draps, pas décidés à entrer dans ce monde, et puis j’ai glissé un œil vers la fenêtre et le ciel était bleu très clair avec des petits nuages ourlés de rose et j’ai pensé absurdement au dessous d’une aile de pigeon, alors comme il était l’heure me suis levée.
Bien entendu, le temps de la douche, de l’errance sans but qui m’est nécessaire pour reprendre mes esprits, du café, du miel et d’une cuillère de fromage blanc, le ciel était devenu d’un bleu franc et lumineux et les nuages, sans ourlet, s’en allaient au fil d’un mistral pas trop fort (enfin j’ai chancelé en débouchant sur la place du palais).
Comme j’ai décidé de ne plus assister qu’à une séance du « cours » sur l’iconographie de la contre-réforme, la conférencière a insisté sur les différents regards que l’on pouvait et devait avoir sur une œuvre, et tout ce qu’elle disait me plaisait, m’était sympathique. Entrer dans l’histoire du tableau, sans forcément entrer dans l’histoire que raconte le tableau. Le plaisir de la pâte, le traitement de la couleur qui raconte par ses accords, accents, sa densité – le gris vert des arbres ou le noir. Sur un Philippe de Champaigne (nous tournions autour de lui) la proximité d’un rose violine et d’un bleu rosé. Sur un autre « la présentation au temple » les couleurs primaires des personnages principaux reprises en gamme assourdie, avec l’ajout d’un vert, couleur médiane, pour les témoins etc… (pas trouvé d’image acceptable, celle-ci de la Visitation me semble plus correcte, bien que je ne connaisse pas ce tableau).
Et puis les commentaires ont repris avec des approximations, aussi péremptoires et assumées que les connaissances étaient lacunaires, sur ces messieurs de Port-Royal, Jansénius. Saint Cyran, coupés de tout sauf du pouvoir royal (qui bien sur ne variait pas). Avec mon foutu caractère j’ai tenté de complexifier les choses, avant d’écouter, résignée, un cours prêche de deux badames, héritières de tous les cuistres du grand-siècle (non, elles n’auraient pas mélangé aussi allègrement les règnes). Bon j’espère, je sais, que cela ne sera pas lu par elles.
Et puis suis partie, un peu gênée par une jupe bridant les enjambées (une fois par an je ressors ce tailleur en me demandant pourquoi diable je ne le porte pas) et les talons de mes bottes sur la calade, regarnir mon compte courant et prendre livraison d’Abadôn de Michèle Dujardin et Hoffmann à Tokyo de Didier da Silva. Dans la queue pour payer (les avignonnais feront des cadeaux de livres et disques choisis semble-t-il plus pour leur contenu que pour leur opulence, plutôt du texte que du livre d’art pour table basse) je feuilletais et me confirmais dans l’envie de les lire.
Et le soir venu me suis désintéressée de l’OM, du tarif du gaz et de l’électricité, et de ce qu’en diraient les députés, et suis partie écouter trois charmantes jeunes femmes Dana Ciocarlie (piano), Helena Winkelman (violon) et Clara Novakova (flûte)
Dans la sonate pour violon et piano K304 de Mozart, la violoniste, en guerrière, avait une concentration qui lui donnait un air un peu revêche, le sourire et le chant n’arrivant (pour moi) qu’un peu avant la fin.
Charme de la flutiste, longue robe housse d’or terne et broussaille de blondeur, charme de son jeu dans des lieder de Shubert si connus que les entendre joués comme ils l’étaient c’est écouter son souvenir prendre vie d’assez merveilleuse façon. Et un piano rond, mélodieux, dialoguant.
Qualité de jeu de Dona Ciocarlie confirmée dans l’impromptu que lui a dédié la violoniste – agréable, avec des ruptures de rythmes et un second mouvement plus inventif auquel la pianiste donnait de la poésie sans mièvrerie. Peut-être un manque d’ossature (pas dans le jeu).
Découverte aussi le trio de Jan Novak, père de la flutiste – premier mouvement allègre, virtuose, malicieux – deuxième rêveur, bien sûr, avec de beaux dialogues, du chant – 3ème non moins évidemment emporté, de très beaux passages.
Dans la sonate pour violon et piano K304 de Mozart, la violoniste, en guerrière, avait une concentration qui lui donnait un air un peu revêche, le sourire et le chant n’arrivant (pour moi) qu’un peu avant la fin.
Charme de la flutiste, longue robe housse d’or terne et broussaille de blondeur, charme de son jeu dans des lieder de Shubert si connus que les entendre joués comme ils l’étaient c’est écouter son souvenir prendre vie d’assez merveilleuse façon. Et un piano rond, mélodieux, dialoguant.
Qualité de jeu de Dona Ciocarlie confirmée dans l’impromptu que lui a dédié la violoniste – agréable, avec des ruptures de rythmes et un second mouvement plus inventif auquel la pianiste donnait de la poésie sans mièvrerie. Peut-être un manque d’ossature (pas dans le jeu).
Découverte aussi le trio de Jan Novak, père de la flutiste – premier mouvement allègre, virtuose, malicieux – deuxième rêveur, bien sûr, avec de beaux dialogues, du chant – 3ème non moins évidemment emporté, de très beaux passages.
Après l’entracte (une toile de l’exposition en cours) dans une salle pourtant aux ¾ vide, je n’ai pas retrouvé ma place et mon « je n’aurais pas du sortir » n’ayant provoqué que des regards bovins, me suis réfugiée sur le dossier d’un fauteuil.
Six danses roumaines de Bartok pour flûte et piano : délicieuses.
La suite populaire espagnole de Manuel de Falla convenait bien mieux à la violoniste que ce pauvre Mozart – virtuosité et lyrisme sans sentimentalité.
Et après qu’elles aient troussé de façon passablement éblouissante le trio de Martinu, et joliment une pastorale en bis que je n’ai pas reconnue, m’en suis revenue, emportée par un mistral qui ne savait pas qu’il est censé se calmer la nuit.
Et, bien sûr, il y a une autre facette de l’être humain et Alger. (entre autres)
Six danses roumaines de Bartok pour flûte et piano : délicieuses.
La suite populaire espagnole de Manuel de Falla convenait bien mieux à la violoniste que ce pauvre Mozart – virtuosité et lyrisme sans sentimentalité.
Et après qu’elles aient troussé de façon passablement éblouissante le trio de Martinu, et joliment une pastorale en bis que je n’ai pas reconnue, m’en suis revenue, emportée par un mistral qui ne savait pas qu’il est censé se calmer la nuit.
Et, bien sûr, il y a une autre facette de l’être humain et Alger. (entre autres)
8 commentaires:
Il y avait de quoi ne pas avoir envie de sortir de sous ta couette en écoutant tout "ça", mais tu as bien fait. J'aime, encore une fois, le récit de ta journée bien remplie et la quatrième photo en particulier.
Encore une belle tranche de vie. Ouf! tu es très active, tu en fais et tu en visites des choses dans une journée. Ta vie n'est pas ennuyante, tu vis au rythme de la vie.
J'aime bien te suivre dans tes parcours et tes réflexions.
Tes photos sont magnifiques.
Bon mercredi et bisous.
Pas si paumée que ça ...
Eh bien, on ne regrette pas que vous ayez été longue! Bravo!
Mon blog :
http://www.philo.over-blog.com/
Les "badames" ne sont pas contentes...
Alger, la tragédie...
Ils sont forts, quand même, les Copé et autres Moscovici, pour se réclamer du peuple, dont ils craignent cependant de demander l'avis : et de dire, ouvertement, que les français sont trop bêtes pour comprendre de quoi il s'agit, et quel est leur intérêt... Bref, passons.
Abâdon, je l'ai pas encore lu, mais j'ai juré de le faire très prochainement. Mais tout me laisse à penser (et surtout sa présentation et son auteure) que c'est un bon choix.
Je suis heureux que ta journée ait été riche, et ravi de te retrouver demain pour de nouvelles aventures, avec un regret cependant : n'avoir pas vu ce tailleur, armure indispensable pour aller voir son banquier ;-D
il faut bien tenter de vivre et je vois qu'il te reste de bien jolies cordes à ton arc!
et comme il est dit il vaut mieux recevoir des pruneaux qu'on aura nous même vendus, plutôt que d'autres, on aura au moins touché l'argent avant!!( entendu ce soir sur TV)
Ta carcasse dont souvent tu parles est pleine d'énergie, renouvelable ?
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