ceux qui le veulent et en ont le loisir cliqueront

Me suis munie de jambes affermies, d’une presque indifférence à une foule éventuelle, d’une jupe courte, de bottes et d’un caraco, et suis partie voir les potiers. Comme ces bonshommes et belles dames étaient l’œuvre d’un avignonnais, un parmi beaucoup d'"estrangers", rêvé à voix mi-haute d’être hébergée par un four – œil absent, une des rares faces sans sourire, et ma foi pourquoi aurait-il dû sourire ?

Vague tentation (mais qu’en faire ?) devant ces mini-murailles ocre – une belle matière grumeleuse – discussion, plaisanteries, avec la potière – achat au fil des stands, pour couper la tentation, de petites choses inutiles mais non encombrantes et en accord avec mes résolutions d’avarice - échanges agréables – plus longuement avec l’ancien avignonnais devenu normand, auteur de la coupe la plus grande, assez fabuleuse dans la richesse et la profondeur des coloris ce que ne montre pas ma photo - il avait de beaux et grands plats.

En petite allégresse, profité de mes jambes et de la légèreté de l’air, pour monter aux Dom, cueillant au passage, avec mes yeux et celui de l’appareil, quelques roses à défaut de celles du palais (trop de monde décidément)

La vue vers Villeneuve était très sollicitée - fuite

vers l’amont, et les montagnes bleues qui s’effaçaient dans la lumière -

pas de côté pour revenir vers le Rhône un peu après Villeneuve et les insectes à avirons glissant sur l’eau dans la quiétude d’une fin de matinée dominicale.

la guinguette, les gens détendus, l’eau verte un peu croupie et les canards qui se sont obstinés à fuir mon objectif – un chocolat presque passable magnifié par le plaisir du souvenir des cafés qui accompagnaient mes tomates-déjeuners, il y a quarante ans.

En redescendant, j’ai salué Notre Dame, et passé le nez à l’intérieur au moment où débutait un concert.

Vivaldi : sonate en ut pour hautbois et basse continue (violoncelle et orgue) – allégresse légère, hautbois en velours fané – pour l’andante, orgue un peu acide, appuyé sur des graves doux – je regardais, assise, avec grande envie de circuler.

Puis Bach – l’orgue seul pour un prélude du clavier bien tempéré – la verdeur de cet orgue vénérable, jeu de couleurs, avec la jolie attaque chantante de la fugue.
Les trois instruments se rejoignant pour l’ad agio de la sinfonia de la cantate BWV156 : mélodie tranquille que j’ai cru reconnaître, avec ses développements.

Je regardais la simplicité respectée de la lanterne. Mais comme je commençais à frissonner, suis sortie tout doux, tout discrètement, avant Haydn et Pablo Casals.

Longues hésitations réprimées (quelle utilité pour un animal solitaire ?) devant des plats, une théière à la belle forme, des plaques (de jolies fausses majoliques avec des oiseaux)

La place de l’horloge peuplée (même si, comme je l’effleurais, ma photo ne le montre pas) et une fanfare si joyeuse qu’elle aurait pu être mauvaise (ce qu’elle n’était pas)

Et, dommage pour les restaurateurs, des groupes de touristes dégringolaient vers le Rhône avec leur piquenique.

Déjeuner - soleil bu - un peu de Bergounioux - mon jasmin commence à sentir - long essai d’ébauche.de quelque chose avec le petit reste de terre que j’avais amenée à l’état de boue, sans patience pour qu’elle devienne travaillable, résultat peu convainquant. Peut-être une grosse orante fatiguée, influences conjuguées du poids de la terre et des très belles musiques entendues sur France Musique, le stabat mater de Scarlatti (que je préfère à celui de Pergolèse) pendant que je m’escrimais, ou les pièces de Kaija Saarihao et Jonhatan Harvey cette nuit, tout à l’heure, pendant que je rehissais ces masses flasques.
Recevrai-je enfin le disque de restauration aujourd’hui ?