mais comme les habitudes sont difficiles à perdre, et parce que je tournais en rond, pondu un truc pas terrible pour le nouveau site des impromptus littéraires http://www.impromptuslitteraires.fr/dotclear/ (il fallait parler d'aventure, en incorporant "impromptu" et "littéraire" et il y avait une photo d'un pont de lianes dont je n'avais pas compris qu'il fallait tenir compte, et qui m'était antipathique )
- bonjour grand-père
- bonjour ma chatte
- tu fais quoi ?
- je bois le soleil
- tu me fais une place ?
- installe toi
un silence - un soupir - un silence - un gros soupir
un ton résigné, un peu :
- qu'est ce qui t'arrive ?
- je m'ennuie
- vas jouer
- pas envie - raconte
- pas envie
- je t'en prie
- bon. Alors il faisait bon dans le café de Jacques et dehors il pleuvait, mais j'avais senti le matin que le vent promettait, et quand faut y aller... J'ai sifflé l'équipage, le second m'a rendu compte, nous avons levé l'ancre et j'ai manoeuvré pour que la Glorieuse franchisse la porte du café.
- mais, grand père...
- bon, faut dire que les gars avaient ouvert tout grand
- mais, grand père...
- tu écoutes, non ? alors, c'est vrai, la brise était bonne, pas très forte pourtant, et nous avons mis une bonne semaine pour rejoindre les alizés, et nous avancions vers des mers nouvelles qui s'élevaient derrière l'horizon, et la nuit l'eau chantait, épaisse et sombre, le long de la coque
- mais, grand père, comment ton bateau il tenait... ?
- tu écoutes, non ? et nous étions bénis, il y avait toujours assez de vent pour gonfler les voiles, leur musique descendait des vergues en faisant vibrer les mats, mais la mer nous accueillait doucement et la proue de la Glorieuse la divisait, avec juste un petit friselis ; nous glissions, et comme nous entrions dans l'océan, nous avions fait nos adieux à la pluie, et le soleil blanchissait le pont et brillait sur les cuivres.
- il était à voile ton bateau ?
- c'était la plus jolie frégate que les chantiers aient jamais vu naître, et nous nous entendions bien - et...bon je crois que l'heure avance et que les femmes vont nous appeler - alors juste... je me souviens... un mouillage le soir, près d'une île, et le matin, le soleil a sauté hors de la montagne, et comme dans un impromptu théâtral, des nuées d'oiseaux et des hommes peints dans des pirogues noires sont venus vers nous, et les matelots chantaient, et ta mère nous appelle - viens déjeuner.
- c'était joli ton début d'histoire, mais c'était même pas vrai... c'était... littéraire
- tu n'aimes pas ?
- j'adooore !
- bonjour ma chatte
- tu fais quoi ?
- je bois le soleil
- tu me fais une place ?
- installe toi
un silence - un soupir - un silence - un gros soupir
un ton résigné, un peu :
- qu'est ce qui t'arrive ?
- je m'ennuie
- vas jouer
- pas envie - raconte
- pas envie
- je t'en prie
- bon. Alors il faisait bon dans le café de Jacques et dehors il pleuvait, mais j'avais senti le matin que le vent promettait, et quand faut y aller... J'ai sifflé l'équipage, le second m'a rendu compte, nous avons levé l'ancre et j'ai manoeuvré pour que la Glorieuse franchisse la porte du café.
- mais, grand père...
- bon, faut dire que les gars avaient ouvert tout grand
- mais, grand père...
- tu écoutes, non ? alors, c'est vrai, la brise était bonne, pas très forte pourtant, et nous avons mis une bonne semaine pour rejoindre les alizés, et nous avancions vers des mers nouvelles qui s'élevaient derrière l'horizon, et la nuit l'eau chantait, épaisse et sombre, le long de la coque
- mais, grand père, comment ton bateau il tenait... ?
- tu écoutes, non ? et nous étions bénis, il y avait toujours assez de vent pour gonfler les voiles, leur musique descendait des vergues en faisant vibrer les mats, mais la mer nous accueillait doucement et la proue de la Glorieuse la divisait, avec juste un petit friselis ; nous glissions, et comme nous entrions dans l'océan, nous avions fait nos adieux à la pluie, et le soleil blanchissait le pont et brillait sur les cuivres.
- il était à voile ton bateau ?
- c'était la plus jolie frégate que les chantiers aient jamais vu naître, et nous nous entendions bien - et...bon je crois que l'heure avance et que les femmes vont nous appeler - alors juste... je me souviens... un mouillage le soir, près d'une île, et le matin, le soleil a sauté hors de la montagne, et comme dans un impromptu théâtral, des nuées d'oiseaux et des hommes peints dans des pirogues noires sont venus vers nous, et les matelots chantaient, et ta mère nous appelle - viens déjeuner.
- c'était joli ton début d'histoire, mais c'était même pas vrai... c'était... littéraire
- tu n'aimes pas ?
- j'adooore !
il me reste à trouver une manière de me maintenir, retrouver pour un temps l'appétit d'épuiser la petite masse engrangée en désir de lectures (pour les spectacles on verra) - et quand j'arrive à mettre le nez dans un texte l'envie revient, comme avec "zone" de Matthias Enard, et le lisant je me disais, je crois, qu'il ne fallait pas s'arrêter à ce qui se retrouvait dans tous les articles : la longue phrase, qui n'est finalement pas d'une originalité folle, et d'ailleurs ce seraient plusieurs longues phrases, ni l'absence de ponctuation, puisque justement elle n'est pas totale, et qu'il y a quelque tirets et nombre de virgules. Simplement elles ne sont pas toujours où on les attendrait pour reprendre souffle, et leur absence nous entraîne un peu haletants, ou nous le serions si nous avions la possibilité de fractionner, leur rôle étant plutôt d'articulation entre les différents plans, le présent du narrateur et ce qu'il recrée, mais pas toujours.
Et j'y fais de longues plongées.
Et j'y fais de longues plongées.
comme dans les pages du "désordre" de Philippe de Jonkheere reprises chez "publie.net" http://www.publie.net/tnc/spip.php?article12 avec l'intelligence et l'humour tendrement humain, comme la rencontre, dans le roman qui n'a pas été publié, d'un désespéré en sursis et des éboueurs alertés autour d'un café, moment de gentille dérision , et tout le reste, les jugements esthétiques, de salutaires colères devant le monde qu'on nous fait.
9 commentaires:
Moi, j'aime ton texte, plus littéraire qu'impromptu, me semble-t-il. Et aucunement pontifiant. ;-)
tu sais les longues phrases à pans coupés sur plusieurs plans non parallèles ..et raccords aléatoires...pour moi dont la paresse préfère souvent marcher à petits pas entre haies bien taillées à la française comme du temps où j'étais écolier- c'est frustrant parfois de recommencer deux fois à monter les escaliers pour plonger du haut de l'édifice vers l'étendue de la grande nature qui m'entre dans le coeur .
mais ça mérite..
excuse brigetoun!!..les habitudes aussi sont parfois insuffisantes..pour ne pas bafouiller!!!
Si d'aventure les zincs (de bistros, s'entend) pouvaient conter, tu ne sortirais pas de chez toi et contre vents et marées, bourlinguerait!
Bonne journée à toi.
en fait de contre vents et marée j'arrête - un peu triste
Mon inquiétude d'hier se confirme par le : "j'arrête - un peu triste"
Dis, t'en vas pas ! steplaît...
Tu ne vas pas faire çà ? si tu bois le soleil je mange la pluie .....
En espérant que ce n'est qu'une halte.
Brig, je pense à Eluard ce soir... Ne fais pas place au silence... S'il te plait.
Bon, Brigitte, la plaisanterie a assez durée !
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