Et quand je laissais reposer ma machine, ou qu’ils se reposaient entre deux lois, je terminais, quittant l’écriture de la poésie - et la lucidité que l’on se doit - dans « l’instinct de ciel » de Jean-Michel Maulpoix, pour les histoires d’écrivains ou de livres, ou de lecteurs, prétextes ou objets des nouvelles, ma dernière découverte (toujours en retard suis) Roberto Bolzano avec « appels téléphoniques » , et, au-delà de ma première réaction vaguement ennuyée par l’intérêt des récits mais leur presque banalité, même dans le tragique, une impression de distance, d’absence, je me suis laisée envahir progressivement, lentement, en y entrant, par son monde, une vision un peu à coté et une très légère étrangeté qui éclaire notre réalité. Et les fins qui n’en sont pas, ouvertes, ou retombées, comme après la saga en quelques pages de la vie de Clara « je passe toutes les nuits à me demander où elle pourrait être, me dit-il. Au ton de sa voix, à la tournure que prenait la conversation, je compris qu’il avait besoin de mon amitié, de l’amitié de n’importe qui. Mais moi je n’étais pas en mesure de lui offrir une compensation »
« tu es un peu fou, toi. Des feuilles jeunes et même des fleurs après trois ans de sommeil ? Est-ce que tu vas continuer ?
- tu attends quoi ? m’a-t-elle demandé
- des petites - restons modestes, de toutes petites - boules rondes d’une belle couleur, d’une douce odeur, que l’on appelle fruits, et, un peu curieusement vu leur taille, oranges. Il en portait quand il est arrivé
- tu crois que ?
- je n’ose pas - il faudrait qu’il soit vraiment fou
Alors elle lui a demandé de s'appliquer à en produire, parce qu'elle voulait les voir, mais il n’a pas répondu, et le sot totem, derrière elle, n’est pas intervenu - donc je l’ai rentrée avant que le soir ne tombe.