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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

mardi, février 09, 2010


entre deux terrains vagues,
au creux, au bout de l'ennui,
dans la clôture, un portail

et nous restons là, figés
en désir, sur terrain nu,
entre deux terrains vagues

tendus pour voir au delà
du néant suivant néant
sans fin après le portail

même si il n'y a rien,
même s'il est ligoté,
entre deux terrains vagues,
dans la clôture un portail

les « impromptus littéraires » http://www.impromptuslitteraires.fr/dotclear/ , aux petites heures de lundi, proposaient cette photo comme point de départ, et réfugiée sous la couette, avant de me rendormir, ai pondu ceci qui, au milieu de textes pleins de sens, est le petiot invisible (mais m'en moque, sincèrement)
M'en moquant, je continue à peupler ma page de mon ego, parce que me plait de regrouper sur « paumée » ce avec quoi je squatte les autres blogs ou sites, ou avec quoi je tâche d'être presque digne d'eux, quand invitée. Alors, pour les vases communicants (et ne manquera que celui de février trop récent), ce qui faisait pendant au trop gentil et très beau billet de Christine Jeanney http://brigetoun.blogspot.com/2009/11/ce-mois-ci-paumee-accueille-christine.html

tentative de vieillir

Avoir longtemps cheminé – avoir aimé, perdu, oublié – avoir appris à penser, l'avoir fait, ou pour le moins l'avoir cru – avoir traversé de loin (même si plongée au coeur, en corps ou en esprit) les bouleversements du monde – et avoir glissé sans le sentir d'un âge à l'autre jusqu'à ne plus pouvoir faire comprendre, par ces mots qui se sont modifiés, la matérialité de l'univers où vous avez grandi, ne plus pouvoir le faire toucher, sentir et ne plus le connaître, n'en savoir le goût que par éclairs, quand une photo amène l'odeur de l'encre sur les doigts ou de la vapeur moutonnant dans la gare, quand la vue d'un sarrau sur un bout d'écossais plissé fait que le froid piquant revienne sur vos genoux et que vous mettiez un moment à comprendre qu'il est scandaleux d'interdire la cigarette ou les pantalons au lycée – n'avoir pas créé, ni êtres, ni choses, ni idées.
Retrouver des visages perdus et voir dans leurs yeux se ruer vos rides et votre corps à l'assaut de l'image d'une enfant qui disparaît - parfois renouer, avec une joie légère, tendre et sincère, des complicités qui n'ont peut être jamais existé.
Avoir glissé au long des ans, sans les voir, sans grandes actions ni aventures, et garder en vous des chemins qui suivent un ruisseau, une plage, des rues, beaucoup de rues qui se croisent, qui se modifient, des arbres et des objets, le contact d'un pain de glace, le poids d'un petit bidon plein de lait dansant sous son anse, les jupons de crin, les escarpins troués, les jupes droites et grises et les twin-sets en attente d'un collier de perles, les surprise parties dans des maisons au dessus de la mer où vous vous êtes si tragiquement ennuyée, les robes longues en laine que vous étiez quelques unes à porter au milieu des dernières très courtes jupes claires et la recherche des quelques pièces manquantes pour aller voir un film au Champolion ou, le weekend end, au Mac Mahon – plus loin, plus tard, une éclosion, un groupe, un amour discret dont vous ne savez plus exactement ce qu'ils étaient en réalité, ou ce qu'on nomme ainsi – et puis une accélération indistincte.
Demeurer tranquille, ou le voulant, au bord de l'agitation, vous réduisant, mais grosse de mots effilochés, de convictions devenues étranges, de sensations évanouies, de traces de livres, de tableaux, de vos pas dans des salles, d'architectures, d'odeurs de terre gorgée de pluie, de poussière et de sable mouillé, de musiques et de morts, de tant de morts.
Avoir des sursauts, des colères, des joies brusques, mais ne pas bouger, ne pas brusquer ce paquet que la vie vous a confié – attendre avec une plénitude un peu bovine.

P.S. Je devrais être aujourd'hui sur les 807 saison 2 http://dcccvii.blogspot.com (chaque jour, comme sur l'autofictif de http://l-autofictif.over-blog.com/ ) trois petits paragraphes avec référence à Chevillard ou plus précisément au 807)

18 commentaires:

micheline a dit…

Ni de ton temps ni de ton niveau, mais ce qui me vient:

"T'en fais, pas mon p'tit loup
C'est la vie, ne pleure pas
T'oublieras, mon p'tit loup
Ne pleure pas

Je t'amènerai sécher tes larmes
Au vent des quatre points cardinaux
Respirer la violette à Parme
Et les épices à Colombo
On verra le fleuve Amazone
Et la vallée des Orchidées
Et les enfants qui se savonnent
Le ventre avec des fleurs coupées
........................etc.."
Pierre Perret

Brigetoun a dit…

pleure pas Paumée, il y a déjà la pluie

Michel Benoit a dit…

« La pluie fait des claquettes sur le trottoir à minuit... »
Il y a beaucoup de matières à traiter pour un humain. La vie est trop courte !

cjeanney a dit…

"une couverture de vigogne", j'adore !
(par contre, il y a méprise vocabulistique entre "trop gentil" et "réaliste" que je trouve plus adapté)

MATHILDE PRIMAVERA a dit…

Brigitte, ne m'en veux pas, je ne suis pas en état de lire aujourd'hui, je capte les cigales malgré la pluie !!!
Intriguée : c'est toi qui a fait la première photo du portail ? Tu es allée dans le désert ?

Gérard Méry a dit…

Impression de désert derrière ton portail "barbelétisé"

Brigetoun a dit…

certainement ça, j'avais regardé trop vite la photo, en dormant à moitié - tant pis, pas littéral, et puis : sans importance

albin, journalier a dit…

Un portail qui sépare rien de rien c'est quelque chose !
Tout un programme ou la Genèse...

arlette a dit…

Un peu à contre -temps.....mais en préparant ce matin mon intermède je pensais fortement aux"convois des glossales "
Désolée pour cette impertinence!!!(voir Au gré....)

joye a dit…

Parfois c'est ça, écrire, la beauté passe souvent inaperçue. Comment tu dis "contrived" en français, c'est l'impression que me fait cette photo.

Le dico donne "forcé".

En patinant un peu plus dans les dicos, je trouve "factice".

Tant pis, tes vers sont beaux, et c'est une honte que l'on ne te le dise pas.

Brigetoun a dit…

pas si inaperçu si c'est mon truc, c'était un préjugé de ma part

Nathalie H.D. a dit…

Brigetoun encore une fois je suis émue et touchée par ce que tu écris, cette "tentative de vieillir" que tu nous livres à la toute fin. Très admirative aussi de la grâce, de la finesse et de la sensibilité avec laquelle tu abordes un sujet difficile.

Grâce à toi j'ai retrouvé le froid du genou nu sous un bout d'écossais plissé mais ton texte est bien plus qu'une petite madeleine. Il explore la question fondamentale du 'qui suis-je' dans le temps, le lien ténu entre la petite fille que j'étais et la femme que je suis et dont je sens le corps changer, l'accélération du temps.... vraiment chacun de tes mots est si troublant, si profond d'abîmes inexplorés que j'y reviendrai pour le lire encore.

Nathalie H.D. a dit…

Et sur un sujet qui n'a rien à voir, tu as raison : ce vert d'eau ne convient pas du tout à une DS !!!
Cette couleur ne cesse de me chagriner à chaque fois que je regarde ma photo.

Nathalie H.D. a dit…

Mais pour en revenir à 'tentative de vieillir' si j'en étais l'éditeur je forcerais l'auteur à un repentir sur le dernier mot, "bovine". Même si j'en comprends le sens il me semble qu'il y avait un meilleur mot à trouver... non ?

Brigetoun a dit…

Nathalie c'est moi qui suis touchée - pour "bovine" tu as sans doute raison , ma manie de vouloir une rupture de ton, un peu trop radial ans doute.
Mais merci à toi, on petit ego est tout heureux

Nathalie H.D. a dit…

Oui tu voulais une rupture de ton et tu avais raison.

C'est seulement que le mot de la fin n'est pas tout à fait juste. Dans l'immobilisme dont tu parles si bien il n'y a rien de bovin.

MioModus a dit…

Le texte de début est magnifique.
Amitiés poétiques.
MioModus.

ABC a dit…

Décalé et juste

vieillir ne veut pas dire abandonner, il est beau de partager les petits et les gros paquets de souvenirs...
Émotion vraie !