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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

lundi, avril 12, 2010


Oisiveté est mon nom,
oisiveté est ma vocation,
sans remords,
ou si peu,
ou ça ne dure,
le plaisir du refus est trop fort.
Et, baignée en douce paresse,
je flotte,
au dessus de la réalité,
dans l'indécision,
dans l'imprécision,
et je ne suis plus
ni allongée sur un lit,
ni assise au bord de l'eau,
rêvant un peu au fil du courant,
si lent, si puissant.

Et parfois, je lis un peu des poètes, et parfois je me raconte des histoires,

Agnès regardait le dos de Guillaume, un peu vouté, mais si peu, et la distance entre eux se creusait. Elle refusait de s'exténuer à essayer de la réduire, ou même de la maintenir. Elle s'agaçait, un peu, de sa vieille veste de cuir un peu éraflée, savait le soin qu'il avait apporté, comme sans le savoir, au reste de sa tenue. Son éternel dandinisme. La petite colère, un rien sur-jouée, le pauvre chéri, qui le faisait bougonner à l'idée de la fête organisée par leurs enfants pour cet anniversaire ; elle avait plaidé, s'était moquée de lui, légèrement, sans trop appuyer, avait insisté. Ce dos. Elle lui souriait. Elle le revoyait disant, ce matin, en entrant, venant du jardin, bottes sales sur carreaux nets, dans la cuisine où elle rêvassait devant une tartine de miel, que, puisque c'était comme ça, et puisqu'il semblait que ça se fêtait ces cinquante ans de mariage, il ne supporterait tout le ramdam qu'ils allaient organiser les autres – elle avait froncé les sourcils – il avait répété «les autres» avec un petit sourire de sale gosse malicieux – il ne jouerait les patriarches comme ils le voulaient que si, auparavant, ils la faisaient tous les deux la fête, et que, pardon, elle savait bien, l'imagination ce n'était pas dans ses cordes, il l'emmenait dîner ce soir, chez X, ça lui allait ? Bon, il allait téléphoner pour réserver – et il était sorti. Elle avait soupiré, il ne changerait pas ; elle avait soupiré plus doucement, c'était gentil. Il marchait tout de même vraiment trop vite. Il l'avait oubliée, il fonçait vers le but qu'il s'était fixé. Elle a trébuché, et à ce moment il s'est retourné. Il l'a toisée «Vous venez ?». Elle a murmuré «Vous allez trop vite, toujours, mon Chéri». Il a souri. Il lui a pris le bras. Ils sont repartis. Ils passaient devant un manège, absurdement vieillot, comme ceux qui avaient accueillis leurs parents. Elle regardait les chevaux. Il l'a regardée. Elle a pensé «Vous vous souvenez ?». Il a dit «Vous étiez négligeable. C'est dix ans plus tard que vous m'avez forcée à vous voir ; vous étiez charmante». Elle a répondu «Vous étiez une petite brute» - «Déjà ?» - «Déjà.» Ils ont ri.
(un des derniers paragraphes accrochés au convoi des glossolales http://leconvoidesglossolales.blogspot.com

10 commentaires:

MATHILDE PRIMAVERA a dit…

L'attachement de l'un à l'autre sans vraiment trop de reproches, sans aucune mièvrerie, juste quelques défauts mis en avant, tellement joliment bien dits qu'on pourrait croire qu'ils sont aussi des qualités, tout cela avec beaucoup d'humour et dans la classe du vouvoiement !!! J'adore !!! Beau travail !!!

micheline a dit…

ces vieux ménages... tous comme ça et pourtant jamais les mêmes...
Ce texte: j'y chipperais bien quelques bribes pour nous..recadrées selon l'optique!

Mek a dit…

Charmant blog ! Je reviendrai.

DUSZKA a dit…

Ah! ça fait du bien... Couleurs, mots, flous, un espace temps nous emporte sans brutalité. Merci.

Michel Benoit a dit…

Où as-tu pris la première photo ?
Au musée Lapidaire ?

Brigetoun a dit…

chez Ducastel, un peintre qui me réconcilie avec la figuration et dont j'oublie toujours le nom (d'autres emprunts déjà)

jeandler a dit…

L'ondine est charmante
suivie de près d'une lumineuse image ...

Elle suit,
Lui précède
Elle et Lui se rattraperont
un petit tour
et puis rentrons.

JEA a dit…

Sous l'arbre à palabres de Zoé, cet "hymne à l'oisiveté" :
- http://zolucider.blogspot.com/2010/04/hymne-loisivete.html

Christophe Sanchez a dit…

Pour te paraphraser court : beaucoup! :)

Lautreje a dit…

j'ai envie de m'accrocher à leurs pas, je ne ferai pas de bruit, je resterai là, juste à les regarder, les écouter.