Bonjour ma mie, bonjour cher ami !

Vous avez fait bon voyage ? ….. mes pauvres... non la neige n'est pas arrivée ici.

Mais ce matin, à l'aube, quand suis monté à la bergerie dans la montagnette – Marine nous a préparé une belle daube, et il y a du fromage frais, je sais que vous l'aimez, ma mie, il sent la garrigue, vous verrez – oui, à l'aube, c'était très beau. Immobile. Endormi. Une petite lumière qui commençait à dessiner les buissons, en montant, avant le bois.

Et l'air immobile, je vous disais, juste l'espoir d'un souffle, la terre dormait. Et donc du blanc, tout de même, l'herbe était blanche mais pas de la neige, juste un petit givre crissant, et mes joues piquaient. Je me pelotonnais dans ma mante, je vous assure, comme vous ma mie, là, dans vos fourrures. Et puis, quand j'étais en haut, le ciel a pâli, s'est éclairci, sans couleur, neutre – le bleu a gagné pendant que je faisais mes comptes avec le berger, et quand je suis sorti du bois en passant près de chez Monsieur Bérangier – il voudrait vous connaître, c'est un vieil ami, il a une fameuse bibliothèque ! - j'avais les yeux dans ce clair, léger, avec des nuages qui filaient doux.

Il faudra que vous m'accompagnez mon cher. Nous irons marcher avec des fusils, comme s'il y avait du gibier.

Mais je bavarde, trop, beaucoup. Il faut me pardonner, je suis si heureux de vous voir. On va s'en faire des soirées de lectures... et vous allez me parler de Paris.

Regardez, la voiture et les chevaux sont rentrés, et le Justin a pris vos bagages. On y va ? C'est à côté.

Oui, ma mie, il est beau le ciel, là, mais ça ne va pas durer. Le vent est mort, celui du clair.