Samedi, un peu avant dix
heures, le mistral n'était plus que souvenir et petits revenez-y
brefs, la lumière caressait sans violence le calme du square
Agricol Perdiguier
Samedi, un peu avant dix
heures, me suis désolée, en arrivant sur la place des Corps Saints,
de la disparition de l'encadreur et marchand de terre, pastels,
couleurs, papier et autres.
Samedi, juste avant dix
heures, me suis maudite de ne pas avoir regardé le nom du café où
avait lieu le rendez-vous avec Cécile Helle, conseillère régionale
PS, appréciée par Brigetoun entre autres qualités – j'ai reconnu
une tête à travers une vitrine, suis entrée, et j'ai découvert un
café–dînettes (bon café et petits en cas alléchants)
Samedi, à dix heures et
plus, étions peu à peu une vingtaine à parler avec inquiétude
plus ou moins enjouée et confiance plus ou moins décidée autour de
quelques tables, dans soleil mais petit vent (et le manteau fin sur
tunique de laine fine étaient appréciables à défaut
d'élégance)... samedi après dix heures il y avait aussi deux ou
trois jeunes en quête de renseignements, samedi un peu avant onze
heures un ami fermement front de gauche est passé, et ce fut longue,
amicale et courtoise (mais rude) controverse – d'autant qu'étions
presque tous étrangers aux tendances officiellement majoritaires au
PS - avec rendez-vous pris d'un commun accord pour l'avenir.
Samedi un peu après onze
heures il nous a quitté pour suivre sa journée, et m'en suis allée
parce que carcasse était dolence, sommeil, y en a un tantinet marre.
Samedi en passant rue
Joseph Vernet devant la Chambre des métiers, me suis décidée une
rapide incursion, presque seule, dans l'exposition des métiers d'art
qui ferme dimanche soir, et j'ai joué la peur avec deux enfants
devant le rhino de Jean-Philippe Fally (La Forge, à Pernes,
réalisation et restauration de rampes, grilles, portails,
luminaires, etc... et lui)
aime qu'il y ait encore
bons gipiers-stucateurs, restaurateurs de fresques,
ai aimé quelques oeuvres,
comme ce grès enfumé de Florence Pauliac,
la technique, la science
de ces artisans, et plus ou moins leur goût
(parfois pas du tout, ou du moins pas le mien), ai
échangé quelques mots,
suis repartie rapidement
parce que l'humeur était : faim, avec une vraie envie d'embarquer
cette console et ce miroir gainés de cuir.
Et puis n'ai pas fait
grand chose, dame oui, pas grand chose – eu des envies de lire,
fortes, mais en suis resté à « l'Anarchie » d'Elisée
Reclus, re-édité par les Editions de Londres
http://www.editionsdelondres.com/L-anarchie
« Sans doute, cet
idéal semble chimérique à plusieurs d'entre vous, mais je suis sûr
aussi qu'il paraît désirable à la plupart et que vous apercevez au
loin l'image éthérée d'une société pacifique où les hommes
désormais réconciliés laisseront rouiller leurs épées,
refondront leurs canons et désarmeront leurs vaisseaux.».. et tant
pis si, depuis 1894 (date de ce discours devant une loge maçonnique),
et depuis plus longtemps, tant de siècles, cet espoir...
Tant pis si je ne crois
guère que la société anarchique idéale dessinée par Reclus soit
possible, toujours plaisir à lire : « Entre égaux,
l'oeuvre est plus difficile, mais elle est plus haute: il faut
chercher âprement la vérité, trouver le devoir personnel,
apprendre à se connaître soi-même, faire continuellement sa propre
éducation, se conduire en respectant les droits et les intérêts
des camarades. Alors seulement on devient un être réellement moral,
on naît au sentiment de sa responsabilité.
La morale n'est pas un
ordre auquel on se soumet, une parole que l'on répète, une chose
purement extérieure à l'individu; elle devient une partie de
l'être, un produit même de la vie... »
seulement, Elisée, si :
«des organismes libertaires ont existé de tout temps; oui, il s'en
forme incessamment de nouveaux, et chaque année plus nombreux,
suivant les progrès de l'initiative individuelle... » le drame
est dans leur manque de ce futur qu'ils ont recherché. Reste à en
garder l'esprit.
En fait ce que je
respectais, moi, là, c'était ma dive paresse, mon penchant à
l'oisiveté (et la confirmation timide de la survie cahin-caha du
petit saule).
Et puis, munie de trois
assiettes en carton, d'un vieux couteau et de trois saucissons secs
ou jésus (parce qu'il avait été suggéré d'amener des trucs à
bouffer... avec souhait que quelqu'un en veuille, parce que moi
non), suis partie voir la place du palais des papes noire pendant une
heure, ou du moins sans lumière électrique, en digne compagnie.
Bon, comme prévu, avec le
changement d'heure, si le palais était éteint, le noir, lui,
n'était pas.
La nuit est descendue peu
à peu, pendant que les quelques participants arrivaient, qu'un
militant vert brieffait (en tirant un tantinet la couverture dans son
sens.. miennes et brèves réactions souriantes, et bien acceptées)
une journaliste.
Et puis long travail pour
essayer de mettre en place une photo avec bougies à l'endroit le
plus venteux – bonnes photos je pense de la journaliste, piètres
de Brigetoun avec flash
ou sans
et un long moment de
discussions plus ou moins sérieuses (ai trouvé deux garçons et une
fille de belle humeur et me suis amusée – avec ce qu'il faut de
gravité sous-jacente) autour d'une tisane étonnamment parfumée et
agréable, et de petits pâtés végétaux que mes saucissons ont
détrônés.
Agréable, même si après le succès de la chaîne entre Lyon et Avignon, presque totale, ils étaient un rien déçus que nous soyons si peu (une petite trentaine), mais comme
j'avais un peu trop froid, au bout de l'heure convenue, les ai
laissés,
et m'en suis allée, en
blâmant les descendants de Jules II de n'avoir pas joué le jeu.
9 commentaires:
Une journée bien remplie et de bougies en feu d'artifice
Bravo Brigetoun
En fait, vous avez vosu-même déjà lancé le festival... en n'étant pas recluse.
vous-même...
Dommage que les villes ne fassent pas toutes cet effort, c'est bien le plus symbolique. Pour ma part, et j'en ai honte, j'ai oublié...
Quelle énergie !!
Vous avez perdu un éléphant mais gagné se semble-t-il un rhinocéros des plus convenable.
Elisée Reclus, une fameuse figure comme on en fait plus, la liberté chevillée au corps et, en tant que géographe, poseur de frontières!
Non seulement, dans cette heure sans lumière, il y avait le premier quartier lunaire et, regardant bien le ciel, sur la droite du croissant, Jupiter triomphant à l'Ouest suivi de Vénus, tous les trois presque à l'alignement. Un rare moment, vu de la Terre.
Je regrette un peu de n'avoir pas vu tout ça, mais je suis absent d'Avignon...
Je serai bien allé rue des Teinturiers aujourd'hui, et j'aurais peut-être pu voir également les affiches de la campagne "Tous candidats"...
vais manquer ça (voilà que tu 'intrigue) l'ermite que je suis pas au courant - et ne bouge pas aujourd'hui, cheveux sèchent et carcasse et moral creusent (provisoire)
Avignon renaît de l'hiver, si tant est qu'elle était assoupie. Et vous êtes témoin de cette renaissance et nous la vivons au quotidien par ces journées remplies. Vous ne parcourez pas Avignon. Avignon vous habite pour ne faire qu'un corps. Et votre appareil photo est devenu votre cyber-oeil. Merci
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