En 2016 m'en suis allée
ce matin, heureuse de voir que le bleu dans le ciel semblait avoir
gagné sur le calme grisâtre de la veille (oui nous nous sommes
abstenus de la tempête qui était annoncée pour l'ensemble du
pays), réduisant l'importance des masses grises, plus marrie de
sentir l'air plus froid qui entrait dans mes yeux.
Avançais pensant combien
j'avais vécu déconnectée de ce qu'écoutaient, aimaient, mes
contemporains ou leurs successeurs, ce que m'avait rappelée, une
fois de plus, l'hommage sur France Culture à David Bowie, et
l'évocation de ses facettes... parce qu'aveu, c'était pour moi un
nom rencontré parfois, quelques images parfois intrigantes et
séduisantes (ce qui ne signifie pas charmantes) restées anonymes,
et sans doute, dans le flot de musique, des airs appréciés non
moins anonymes…
Puisque ne suis pas de mon
temps, et parce que je me faisais à priori une joie du concert du
soir, suis partie à la recherche (à vrai dire guère plus loin que
sur Wikipedia) de ce qui se passait dans le monde en 1842, année où
Robert Schumann, jeune marié, écrivait à Leipzig ses trois
quatuors à cordes, le quatuor à corde avec piano et le quintette en
mi bémol majeur.
Pardon demandé Picorant, j'ai retenu la
campagne sanglante de Bugeaud dans la Mitidja et le Cherchell, la
fondation de la Gazette Rhénane, le désastre anglais à la passe de
Khyber, la révolution amenant Costa Cabral au pouvoir au Portugal,
la création de postes militaires français en Côte d'Ivoire et au
Gabon, une victoire des boers sur les anglais, la campagne du Chelif
menée par Changarnier, la révolution libérale de Sorocaba au
Brésil, la rébellion de Thomas Wilson Dorr à Rhode Island,
l'intronisation d'un dalaï-lama, Dupetit-Thouars aux Marquises, une
pétition chartiste rejetée et des grèves réprimées en
Angleterre, un accident de chemin de fer à Meudon avec parmi les
victimes Dumont d'Urville, la dissolution de la chambre des députés
et les élections remportées sans éclat par Louis-Philippe et
Guizot, la paix entre le Brésil et le Pérou, la mort du duc
d'Orléans dans un autre accident de chemin de fer et la réunion des
chambres pour régler la question de la régence, une grève générale
en Angleterre, la loi de Lord Ashley interdisant le travail des
femmes et des enfants de moins de dix ans dans les mines, la fin de
la première guerre de l'opium et le traité de Nankin, le traité
Wesber-Ashburton fixant la frontière nord-est entre Etats-Unis et
Canada, le coup d'état du général Juan Crisostomo Torrico au
Pérou, au Brésil la bataille de Santa Luzia, la fin de la
révolution libérale au Sao Paulo et à Minas Gerais, le protectorat
français à Tahiti, la fin de la guerre entre le Tibet et le Ladakh,
la bataille de Aqua Santa au Pérou et la présidence de Juan
Francisco de Vidal, le début du règne du fils de Mohammed Bello à
Sokoto, le début de la dictature de Carlos Antonio Lopez au
Paraguay, le protectorat signé entre le capitaine de corvette Mallet
et le roi de Wallis, une révolte à Barcelone et le bombardement de
la ville, la restauration du roi d'Afghanistan et son traité avec
les Britanniques contre les Persans... le monde était déjà pas mal
en ce temps.
Bien entendu une riche vie
musicale, littéraire, artistique.
Des naissances aussi, dont
l'importance éventuelle n'était pas évidente à l'époque et,
parmi beaucoup, beaucoup d'autres morts, celles de Cherubini,
Stendhal, Elizabeth Vigée-Lebrun, Josef Czerny, Larrey etc..
Puis m'en suis allée à
l'opéra pour le premier de deux concerts du Quatuor Modigliani et de
la pianiste Béatrice Rana dans cette entrée, d'emblée réussie, de
Schumann dans la musique de chambre la plus pure après avoir hésité,
malgré les encouragements de Clara Schumann et Mendelssohn (il aura
fallu l'absence prolongée de Clara, en tournée, sa solitude, sa
tristesse conjurée par l'éude de la théorie pour qu'il se lance
brusquement avec l'influence de bons maîtres, du Mozart des quatuors
dédiés à Haydn, de Beethoven, de Mendelssohn)
- le quatuor n°1,
complexe, comme pour tout dire, andante espressivo – allegro
avec après la sagesse, la
nuance, le thème chantant, l'arrivée de la gigue des deux violons,
les syncopes.. scherzo presto exceptionnellement
en second, un thème qui s'élance, retombe, recommence, un
second thème en dialogue anxieux, le retour du chant et la reprise
galopante.. le beau et passionné andante avec
la longue phrase du violoncelle en introduction, et le souvenir de
Beethoven.. et le presto final
- le quatuor n°2, dédié
à sa femme, charme – allegro vivace plaisir du chant et de
la rêverie, duo tendre des violons... andante quasi variazioni
très beau et complexe (mon
préféré).. scherzo/presto volubile
et très court et le finale/allegro molto vivace léger
et spirituel
et après l'entracte,
le quatuor avec piano
(violon, alto, violoncelle, piano) en mi bémol majeur, un peu plus
long, non moins riche et complexe avec le bel accord entre le piano
et les cordes, piano qui intervient souvent comme un quatrième
instrument, qui ponctue parfois, ou entre en dialogue avec les trois
autres.. et le très beau dernier mouvement.
saluts, le dernier
mouvement du quatuor avec piano en bis, et retour vers l'antre
N'ayant pas trouvé
d'enregistrement de leur interprétation, une vidéo donnant la
version par le quatuor Terpsycordes
du quatuor n°2
5 commentaires:
Comment pourrait-on encore écouter aujourd'hui Bach, Schubert, Schumann... sans l'invention de la partition ?
Espérons que les enregistrements de Dadiv Bowie tiendront aussi longtemps (mais il en existe aussi des traces en papier)...
il existe surtout des enregistrements audio et video pour lui mais pas pour eux
Se replacer dans le temps très belle idée et découverte en vrac ... en passant devant le lycée Dumont d'Urville je me souviendrai d'un train fatal et dans mes lectures (Talleyrand)ce fameux duc d'Orléans
Le tout bercé par le quatuor choisi
Merci à toi
David Bowie me surprenait en toutes choses
oui, j'ai vraiment l'impression d'avoir manqué quelque chose
vais me rattraper, en juger, mais pas envie de faire semblant
Enregistrer un commentaire