C'était un de ces jours
où les machines et moi nous ne sommes pas en accord... à mon second
réveil ai bataillé longtemps avec une lenteur extrême, ce que je
prenais pour des lubies de mon vieux copain-mac, jusqu'à ce que la
connexion abandonne... l'est revenue juste au moment où il était
temps que je prépare carcasse à sortie.
Suis partie dans nos rues
qui sont maintenant estivales, ai pris une ou deux photos de rues
étroites, ai voulu y ajouter juste une de vert ardent sur bleu dur
devant le bureau de poste pour éclairer ce billet... et j'ai sorti
de mon sac un appareil à l'objectif ouvert, totalement coincé...
Ai continué trajet, suis
rentrée jambes mortes au bout d'un peu plus d'une heure et demi pour
tenir compte des arrêts-achats, avec de nouvelles sandales, le sac
compagnon de l'été et de nouvelles hésitations quand à ma
présence en juillet parce que dans la minuscule effervescence
joyeuse de ce pont ensoleillé carcasse paniquait... bon on verra
Et, comme l'avait prévu
ce matin, je recopie, pour animer un peu paumée un billet que les
cosaques ont eu la gentillesse de publier
http://lescosaquesdesfrontieres.com
les yeux
morts
Il avançait dans la
campagne en friche, entre les murs dégradés, ne voyait quiconque,
sauf parfois des mouvements furtifs, des idées de corps se dérobant
derrière un pan de mur, dans un boqueteau désordonné. Il regardait
avec un mélange de curiosité et de désolation, il se souvenait de
ce que disait son père, le soir, quand remontaient les souvenirs de
sa jeunesse, les terres civilisées, les restanques, le village de
belles pierres, de maisons anciennes, de la leur avec sa porte
sculptée, et puis
En haut de la colline
se dressaient les murs de nos anciens seigneurs.
Et nos ancêtres, en
des temps anciens, bien avant moi et avant le père de mon père,
vaquaient sous leur regard, ne leur devaient plus rien mais gardaient
souvenir de leur protection.
Grommelaient parfois,
se moquaient aussi de leurs travers, de la sottise de l'un, de la
prétention d'un autre, et puis souriaient en pensant à un
jouvenceau ou à une très belle, avec toute la gaie franchise, la
liberté conquise, un confortable sentiment de familiarité et la
certitude que, le cas échéant, celle-ci jouerait et que le reste
d'influence ou de pouvoir de ceux du haut de la colline nous
viendrait en aide.
Et il
longeait ces murs en partie écroulés, s'arrêtait un moment comme
un chien à l'arrêt devant une toiture improvisée, un pot de terre
ébréché posé sur le reste d'une margelle, quelques traces de la
vie qui devait persister, rare et dissimulée, depuis que ce coin du
monde avait été abandonné, laissé au désastre, repartait les
yeux levés vers les hauts murs qui couronnaient toujours la colline,
les grandes fenêtres élancées traversées par la lumière gaie
comme pour un accueil souriant.
Il a
commencé à gravir, jambes tremblantes, le raidillon, contournant
des débris de terre cuite, des gravats, des branches d'arbre, au
delà desquels le chemin se devinait à nouveau. Il s'est assis un
moment pour prendre dans son sac un reste de biscuit, l'a considéré,
a évalué le nombre de bouchées qu'il promettait et comme il avait
si faim, comme il était trop las, a cassé un minuscule coin qu'il a
gardé en bouche un moment, regardant ce qui restait du village,
cherchant en vain des traces de culture, une silhouette, puis l'a
mâché lentement et repris la montée, vers les murs, les fenêtres
dont le sourire accueillant s'évanouissait lentement, la réalité
reprenant ses droits en effaçant le mirage qu'il avait plaqué sur
leur béance, jusqu'à ce qu'il débouche sur le faux-plat devant la
bâtisse, la terrasse en partie effondrée qui se mariait lentement à
la pente et s'avance vers la grande porte encadrée de colonnes
toujours dressées et distingue, par delà le balcon effondré sur le
seuil, les murs intérieurs qui montaient, irréguliers, vers le
ciel, l'absence de planchers, sauf quelques petites parcelles en
équilibre précaire, l'absence de toit, la grande brèche dans le
mur donnant sur l'autre face de la butte seigneuriale.
Il
est entré et, sur un carnet posé sur le soubassement d'une des
grandes fenêtres du rez-de-chaussée, a entrepris de dessiner ce que
voyaient ces regards morts, pour illustrer son récit, à son retour.
Et puis il a senti une présence derrière lui, et a deviné qu'elle
n'était pas hostile, ni même apeurée...
5 commentaires:
beau texte, les pierres sont vos amies
grand merci Claudine… oui des amies solides (sourire)
l'objectif peut se coincer, le subjectif demeure... ;-)
Ces yeux-fenêtres ne sont pas aussi morts qu'ils n'y paraissent. L'esprit vagabonde de belle manière, le retour au présent se faisant par l'intermédiaire de ce bout de biscuit, biscuit qui n'existait pas encore au Moyen-Âge.
Dominique oui mais le subjectif n'a plus que les mots s'il en est capable (sourire)
Godart, à défaut de biscuit il y avait des galettes, des bouchées
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