commentaires

désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

jeudi, août 20, 2020

Merci aux cosaques

 

Nos sacrées carcasses, ma sacrée carcasse en fait, mettant du temps à se régenter, se conformer peu ou prou à ce qu'on attend d'elle, ai remis à plus tard le charroi de linge, ai vérifié que n'avais hors une exposition qu'il faudra bien que je m'accorde un jour, rien d'urgent, suis restée dans l'antre, dans l'espoir de répondre (avec un élan qui s'est un peu effrité dans la lassitude d'on ne sait quoi) à l'atelier d'été, au 11 corps et mains que j'avais décidé fait tout spécialement pour moi (ne recule devant rien).. avec un résultat qui ne me satisfaisait pas vraiment... tant pis

et pour ne pas abandonner Paumée, comme j'avais retrouvé des mains brigetouniennes dans des billets publiés par les cosaques des frontières, je recopie un des deux textes que je n'avais pas encore posés ici


Fraternité

Dans la rangée éloquente des bras sombres s'entremêlant au dessus des berges, j'ai vu, devant moi, un espace de liberté, qui, pendant que j'avançais, canne plantée dans l'herbe pour éviter de glisser, s'est ouvert, laissant passer, sans y poser le dessin des branchages, la coulée du fleuve et les écharpes blanches qui le survolaient. Entre deux troncs épais, il n'y avait soudain qu'une petite colonne brisée, reste et souvenir de l'arbre un peu chétif que tu avais été. 

J'ai descendu avec précaution le premier mètre de la pente vers le courant, et je suis restée là, muette et, pendant un moment, sans autre idée que pitié tendre. Le lierre qui s'enroulait à gauche autour de ta peau rugueuse donnait à ce qui de toi demeurait vertical l'aspect d'une stèle telle que l'on en voit sous les arbres du cimetière de la ville, et faisait pendant à la grande chute d'écorce et d'un peu d'aubier qui, à droite, rejoignait en biais le sol, depuis la déchirure brutale qui avait interrompu ton élan vers le ciel en accord, un peu mineur, avec le jaillissement, la force de tes ainés. Entre les pointes de bois qui entourent la rupture une petite plante nouvelle née s'est nichée. J'ai tenté de m'approcher, mais, comme je glissais un peu sur la terre et les graviers de la pente, j'ai lâchement rejeté mon dos en arrière et en suis restée à la stupide et instinctive envie de la cueillir, au désir, surtout, de distinguer dans le fouillis de bois qui s'épandait sur les boursouflures de la rive et plongeait dans le fleuve, la forme qui avait été la tienne, mais il faudrait descendre, jambes courbées et tremblantes en attente d'une chute, toucher, tirer sur les débris, plonger la main dans l'eau, remuer la boue, et je renonce.

Simplement je te plains, te salue, te chante un peu, et ce n'est pas grave puisque c'est bouche fermée, et en continuant ma marche je me demande quelle est la force que tu as subie. 

9 commentaires:

arlette a dit…

Ce beau texte me semble familier ...un plaisir

Brigetoun a dit…

ne suis plus capable que des fonds de tiroir (sourire et merci)

Dominique Hasselmann a dit…

Lierre et le bel aujourd'hui... :-)

Brigetoun a dit…

merci Dominique
Grand plaisir de vous retrouver

Godart a dit…

Bien beau texte sur la contemplation de la nature. Si ce morceau d'arbre avait encore des feuilles, celles-ci en rougiraient de plaisir.

Brigetoun a dit…

l'était un peu trop malade pour ça !

Claudine a dit…

je me permets, pour la parenté des cœurs et contre le silence et pour sa clairvoyance :

un jour vengeur//
viendront les fleurs sur mes yeux faibles et glacés
/d’un feu dur de printemps/
poser jusqu’à la cendre
/leurs pétales rugueux//
au jardin d’orgueil/
d’entier il ne me restera
/que l’aubier et la pluie/
Francis Royo, Analogos, Bribes 11.3

Delage Carol a dit…

Très beau...

Brigetoun a dit…

Claudine, vais être contente de ce texte puisqu'il amène Francis Royo !