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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

samedi, août 29, 2020

Petits faits et atelier


faire un paquet avec trois minuscules tee-shirts Petit Bateau, pour que Waris le nouveau-né de Rosmerta ait quelque chose de neuf, tout en ne sachant pas comment le faire parvenir à sa mère (visites interdites à la maternité de l'Hôpital)


faire longue sieste parce que carcasse avait tendance à la mauvaise humeur... en sortir pour écouter Pascal Quignard parler, de sa voix mate attentive et précise, entre autres, de « 
Boutès ou le désir de se jeter à l'eau » et de son concert avec Aline Piboule à la BNF le 3 octobrehttps://www.franceculture.fr/emissions/la-compagnie-des-poetes/chez-pascal-quignard



partir en fin d'après-midi sous ciel très blanc-gris vaguement menaçant vers une assemblée générale pour modifier les statuts de notre association suivie d'un petit pot 


et d'un retour sous pluie et orage (mais j'avais une main pour la canne et une pour le parapluie). 

Et comme, en fin de matinée, il y avait le plaisir des visages et voix (via Zoom) de certains des participants à l'atelier d'été de François Bon, recopier ma participation au #9 « dans le décor 2 »https://www.tierslivre.net/spip/spip.php?article4925 qui anime, sous trois regards, l'un des décors évoqués dans le #8 https://brigetoun.blogspot.com/2020/08/une-matinee-des-interieurs-des.html



les visites infructueuses

Elle a frappé, re-frappé à en faire souffrir ses phalanges presque sans chair, à la belle vieille porte moulurée blottie au fond du trou dans les pierres du mur.. il n'a pas répondu ; si triste elle en fut, elle venait avec cette joie qu'elle voulait exprimer, qu'elle ne pouvait avouer, sauf à lui, peut-être, qu'était presque son fils ; ne le lui disait pas, il le savait. A posé sur le sol le plat qu'elle portait, a compté les pots renversés, pas de clé sous le cinquième, des gamins avaient dû passer, a bougonné, la clé était sous le premier, ah cet idiot distrait. A scruté la pièce, elle était propre, aussi propre qu'elle le pouvait ; elle en a eu petite fierté comme si elle en était responsable. A ramassé une veste qui trainait au sol, l'a pendue au portant qu'elle lui avait persuadé d'accepter puisque ce n'était qu'une récupération. Est ressortie pour prendre le plat. A traversé le rayon de lumière qui descendait comme un spot sur le paréo jeté sur le matelas, s'est dirigée vers la table à côté de l'évier, a posé le plat, soulevé le torchon, la tourte avait l'air en bon état, a décroché un panier, l'a posé dessus comme une cloche symbolique, a tourné le dos à la douche, le coin intime, avec la retenue de celle qui ne veut surtout pas être inquisitrice. A trouvé dans sa poche une vieille enveloppe, a trottiné jusqu'à la table devant l'entrée, a pris un crayon dans le pot, a laissé un mot en s'appliquant pour être compréhensible, idées et forme. Est ressortie, en mettant la clé sous le cinquième pot, elle aimait l'ordre – enfin quand elle y pensait –, elle a retrouvé le poids de la joie honteuse dont elle voulait se débarrasser grâce à lui, et puis, finalement, c'était comme si elle avait parlé.

L'homme-colère assis sur une borne de l'autre côté de la rue, rageant contre l'hésitation qui l'avait retenu, la veille, à la tombée du jour, d'aborder, d'injurier, de... cette silhouette qu'il avait cru reconnaître et suivie, se demandant aussi pourquoi il était revenu et ce qu'il attendait, l'a vue arriver, franchir le portail avec son plat, trouver la clé, entrer... il imaginait, il ne le voulait pas mais il imaginait..., et quand, noyé entre les branches et l'ombre d'un petit olivier, il l'a vu repartir, il a secoué ses épaules pour chasser le doute, il est entré dans le jardin, a pris la clé, s'est tenu sur le seuil, saisi par la sérénité que lui envoyait l'endroit, à laquelle il ne s'attendait pas. Est entré d'un grand pas violent, et puis, instinctivement, c'est lentement, précautionneusement, comme dans un lieu qu'il réalisait maintenant interdit et étranger à ce monde d'où venait sa vieille colère, qu'il a fait les quelques pas qui lui suffisaient pour découvrir la pièce, sentir un début de sympathie pour celui qui demeurait là, dans cet essentiel, cette quasi pauvreté qui pouvait encore s'offrir l'équilibre d'une beauté. La bêche accrochée au mur parallèlement au balai, comme une parodie de la panoplie de fusils qui aurait correspondu à l'image que la silhouette avait réveillée, a fini de le calmer dans un sourire. Il a vu le mot sur la table, le prénom... L'homme qui n'était plus colère est reparti, oubliant dans sa honte et son trouble de fermer derrière lui.

Le petit garçon était resté la main sur son auto, immobile, en voyant l'inconnu pénétrer dans le jardin, a recommencé à la pousser sur les ravins de la terre après son départ, pensait, ne le savait pas mais pensait, et la tentation, un début d'audace qui l'étonnait, lui venait. Il a abandonné l'auto, il s'est avancé à quatre pattes jusqu'à la marche qui bordait son domaine, s'est redressé après l'avoir escaladée et a roulé comme si quelque chose le tirait vers la porte entrouverte. N'a vu d'abord que le dessin vert et blanc sur le lit au sol. Est entré, a tourné, a regardé, un peu déçu, c'était presque comme la maison de n'importe qui. Mais il manquait les grandes fenêtres et les carreaux rouges au sol. C'était presque comme une cabane, finalement. Ce serait bien d'être ami de l'homme... il devait savoir des histoires ou en inventer, mieux encore que sa mère, des histoires pleines de bons, de mauvais, de découvertes. Il était planté devant la table près de l'évier, un doigt dans la bouche, perdu dans une aventure qu'il se créait, quand la voix de sa mère l'a appelé. Elle l'a rejoint sur le seuil, elle lui a serré le bras, pas trop pour ne pas faire mal, en le grondant, elle a balayé des yeux la pièce en fermant la porte, elle a murmuré « le pauvre garçon ».

Codicille : c'est venu un peu je ne sais d'où, il me reste à connaître mieux celui qui habite là, qui est déjà intervenu dans d'autres textes de l'atelier, qui m'avait dicté le premier décor pour le #8.. J'espère que ne serai pas trop déçue par lui.

La photo est celle qui figure sur ma page dans le groupe des contributions https://www.tierslivre.net/revue/spip.php?article521

6 commentaires:

Anne Dejardin a dit…

Relu ce texte aimé et comme toi cette peur d'être déçue par un personnage de fiction qui m'avait séduite un temps, embarquée avec lui, homme ou femme, peur que ça ne tienne pas dans le temps, la durée... Du coup de constater que tu éprouves la même crainte me réconforte. Merci.

Dominique Hasselmann a dit…

Avignon en vert (jolie photo) et contre tous vents et marées... :-)

Brigetoun a dit…

grand merci Anne

Brigetoun a dit…

Dominique, pour le moment elle tient contre vents (quand à la marée ou la crue que le ciel nous en préserve, ma rue était une de ses préférées)

Godart a dit…

Cette pièce attenante à un petit jardin semble avoir le pouvoir d'apaiser les personnes y entrant. Présence-absence de celui qui y vit, etablissant un lien invisible où la tendresse affleurante retisse un passé commun aux deux visiteurs........ enfin ceci est mon interprétation maladroite d'un texte-plaisir.

Brigetoun a dit…

à moins que ce ne soit son habitant (même absent) qui par sa faiblesse les apaise
'la coquille et le bernard-l'hermite)