ciel gris en ouvrant les volets bleus, traces récentes d'une averse sur les dalles de la cour, envie de me changer les idées, suis montée vers le petit palais pour voir la petite exposition provisoire qui s'y tient actuellement « l'atelier du peintre en Italie, XIIIe XVIe siècle »
bleu sur la ville
et taches de lumière
noir sur le Rhône
l'exposition se tient dans la première salle celle qui est consacrée aux chapiteaux et gisants devant lesquels ont été installés des panneaux et vitrines, présentant des textes agréablement didactiques, quelques œuvres ou reproductions, des vitrines contenant des matériaux et outils reconstitués par un spécialiste, Patrick Varrot
Elle s'ouvre par la reproduction du volet gauche d'un triptyque de Battista di Gerio (mort à Pise vers 1420) représentant un Saint chevalier (sans doute Saint Julien l'Hospitalier) et, au dessus du petit donateur Luca di Jacopo, Saint Luc finissant de peindre délicatement une petite madone.Et, pour le chapitre « comment on devient peintre » un texte s'appuyant sur les écrits de Cennino Cennini (peintre et écrivain – Colle di Val d'Elsa vers 1360, Florence vers 1440 – élève d'Agnolo Gaddi
« III. Comment se doit conduire celui qui veut arriver. Or donc, vous... qui vous destinez principalement à l'art, commencez par vous couvrir de ce vêtement : amour, crainte, obéissance et persévérance. Le plus tôt que vous le pourrez, mettez-vous sous l'égide d'un maître et apprenez... Quittez-le le plus tard possible »
Prenant, à l'aide de petits tableaux décoratifs destinés à orner un meuble de sacristie et d'une vierge, l'exemple de Mariotto di Nardo qui a vraisemblablement appris dans l'atelier de son père le sculpteur Nardo di Cione (et qui peignit également des fresques aujourd'hui disparues dans des églises florentines et pour la cathédrale de Florence, des vitraux pour San Domenico de Pérouse, etc …) l'exposition montre que, pour tirer de son art de quoi vivre quand il avait quitté l'atelier de son maître et pris son indépendance, un peintre devait être capable de peindre aussi bien une fresque qu'une miniature, d'aller de ville en ville, d'utiliser des techniques et supports différents.
Des vitrines présentent ensuite les matériaux et outils notamment, pour la première, les matériaux utilisés par les peintres pour fabriquer les pigments qu'ils utiliseront un panneau détaillant la nature de chacun... J'en reste, pour le plaisir, à l'énumération :
pour les blancs : céruse, craie, blanc de chaux
pour les jaunes : orpiment, jaune de plomb et d'étain, gaude, massicot (altération du cuivre), ocre jaune, safran
pour les oranges : minium, réalgar
pour les rouges : sang de dragon (résines), bois de brésil, hématite sanguine, cinabre autrement appelé vermillon, terre de sinope
pour les ocres : ocre brun, terre brulée, terre de sienne, terre d'ombre
pour les verts : vert de gris appelé aussi verdet ou vert de grèce (lames de cuivre oxydées), chrysocolle, malachite, terre verte (argile riche en oxyde ferrique)
les noirs : noir de fumée, pierre noire, noir d'os, noir de tigre
manquent les bleus... quant aux roses ils ne sont arrivés que très tardivement
figurent aussi les matériaux et outils pour peindre à la tempera : la détrempe au jaune d'oeuf (avec une éponge de mer, un fouet de bruyère, un filtre conique en toile de lin) – les huiles : huile de lin cru, huile de lin clarifiée, huile de lin cuite) – les gommes : arabrique ou agrapante –
et deux panneaux concernant la technique des fresques, avec la reproduction d'un panneau enduit et peint à fresque sur plaque de brique qui le résume en montrant les phase successives de la mise en œuvre : l'arricio en une ou plusieurs couches (deux parts de sable, une de chaux) puis la sinopia (dessin à la terre rouge de sinope) et, mais en ne traitant que la portion qui pourra être peinte dans la journée afin que le mortier reste amoureux et accueille la peinture, l'intonaco (une part de sable, une part de chaux éteinte, étalé à la truelle fine), la reproduction du dessin à la sinopia et la peintureet puis juste des images, parce que ceci est très long et que moi je n'ai pas pris de notes, avec une vitrine pour les fonds d'or
une pour les outils de dessin et de peinture (que l'artiste fabriquait lui-même à moins que ce ne soit un élève)
une pour des techniques de dessin (sur la seconde photo à gauche un patron de papier chiffon ciré détouré, à droite un pochoir de parchemin huilé évidé)
une vitrine pour les différents supports de tableaux
et la reproduction d'un panneau de Taddeo di Bartolo dont l'usure permet de deviner les étapes de réalisation.
Le ciel était toujours noir au delà du fleuve (cela a varié au fil des heures) quand m'en suis revenue.
8 commentaires:
Merci. Vous rappelez qu'à cette époque, la beauté venait d'une complexe maîtrise technique.
l'artisanat existe encore (bon moins fréquent de fabriquer ses pigments... par contre aussi difficile alors d'en vivre avant d'être très connu et nécessité souvent d'un métier d'appoint
Didactique, technique mais pas critique cette expo pour changer d'idées.
et puis tranqulile (j'étais seule.. suis montée ensuite rendre visite à des oeuvres aimées dont un Saint Pierre abricot siennois)
peinture qui dépasse les âges (et sa technique) ! :-)
Formidables images, excellent commentaire: merci pour ce partage
Dominique, manquait la perspective et le désir de reproduction du réel de l'âge classique et de la peinture pompier qui a suivi (manque que la fin du 19ème siècle a retrouvé)
le petit palais d'Avignon est un lieu "pointu" sur la peinture de ces siècles
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