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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

vendredi, mars 18, 2022

Avignon en gris – impératifs


notre printemps gris

avec belle constance

baignant la ville


petite marche pour butternut, yaourts et pain d'épeautre... suivre le live du Monde à propos de l'Ukraine, m'abstraire en écoutant sur France-Culture (avec des retours en arrière pour cause d'inattention) trois cours au Collège de France de Vinciane Pirenne-Delforge sur le bon daïmôn et la bonne Fortune (Agathos daimôn et Agathè Tychè), sur les motifs du serpent Agathos daïmôn et les bienfaits de Zeus, suivis de : Convoquer les nymphes, partie 1 ou l'entre-deux des nymphes...

et pour nourrir Paumée je reprends ma contribution à une proposition de François Bon, en lien avec ce qui nous entoure actuellement, en employant l'impératif (s'inspirant de éPluies » de Saint-John Perse

aimer

Ci-dessus : montage d'une photo d'Alep (Adalhraman Ismaïl pour Reuters) et d'une photo de Kyïv (Aris Messinis pour AFP) pour rester dans l'actualité même si mon texte ne le voulait pas forcément

Sachons, amis, que cette hébétude qui nous prend n’est pas pour nous, n’oublions pas que les bombes ne sont pas sur nous, maudissons le mal qui est en l’homme, pleurons l’impuissance de ceux qui sont pris dans le tumulte, de ceux qui agissent sans l’avoir voulu, de ceux qui souffrent sans y avoir été préparés, de ceux qui ne comprennent pas, ne peuvent et ne doivent comprendre, mais sachons que nous ne sommes pas eux.

Sachons, amis, que nous ne pouvons que tenter de ressentir, n’oublions pas que sous les bombes sont des vivants avec des sentiments sans rapport avec elles, tentons de penser les gorges nouées et les sourires accueillant l’enfant né dans un abri, les yeux qui ne veulent pas être mouillés pour le dernier regard de ceux qui se séparent, les yeux écarquillés qu’un petit garçon lève vers un homme bienveillant et inconnu, mais n’oublions pas la décence, et ne parlons pas de notre peine.

Sachons, amis, que ceux qui la font sur le terrain en ce moment ne le voulaient pas ou pas tous, sachons que c’était pour eux un métier, et un métier utile pour défendre leur pays pensaient-ils, et qu’ils avaient eu la sottise de croire en la fable d’une juste cause comme s’il pouvait y en avoir une hors la défense des faibles, maudissons leur sottise et plaignons leur désarroi et celui des leurs.

Sachons, amis, que ce qui découvre en nous la guerre c’est notre légèreté, n’oublions pas qu’elle n’a jamais cessé dans un coin ou un autre de cette satanée, merveilleuse, pauvre terre, n’oublions pas ceux des nôtres qui l’ont faite ou la font encore pour de nobles causes ou du moins c’est ce qu’on leur, ce qu’on nous a dit.

Sachons aussi le sang qui s’excite dans l’homme qui combat, motivé par une idéologie, un engagement, un devoir, des grands mots dévoyés, et finalement bouleversé par la peur, la joie de la force, des amitiés ou camaraderies, le désespoir, le désir d’en finir, n’oublions pas qu’ils furent des petits garçons bagarreurs et douillets.

Et toi, pleure toutes les détresses, les terreurs, les déracinements, les humiliations de ceux qui n’ont plus que l’attente d’aides à n’oser quérir, demander, provoquer, ou même circonvenir, quelles qu’en soient les causes et ne t’abrite pas dans tes petites craintes égoïstes, ouvre tes mains désarmées, saisis les occasions d’une broutille, d’un geste si cela se peut pour consoler nos faiblesses, ne juge pas | comment le pourrais-tu | les réactions qui bruissent, s’écrivent, se proclament, si ce n’est bien entendu les saloperies, les hypocrisies, l’horreur tranquillement mise en mots, ne condamne pas ceux qui trient les malheurs mais crache sur eux, leurs maîtres, leurs livres, leurs pouvoirs petits ou grands.

Ne pouvant mieux, pleure sans larme ni bruit sur les êtres, les idées, la beauté, les sourires, les menottes et les rides, souris aux menottes et aux rides, aux gestes de soutien, aux fleurs qui patientent sous la neige, à la fraternité, la bienveillance, le souci, la peine partagée, les couvertures posées sur les épaules, les soignants dans les villes assiégées, toutes les villes assiégées, les bras possessifs des parents serrant leurs enfants.

Quant à toi, dans tes minuscules craintes personnelles, individuelles, comme tant d’autres, devant les décisions qui pourront être à prendre, tente de dégager la solution la plus sage au moins à tes yeux, et celle qui pèsera le moins ou le plus brièvement aux tiens, cherche le silence, l’ignorance des tiens, et surtout, pour tout, pour le mal qui règne, pour les solidarités, pour les sourires mouillés et francs, pour nos petites mesquineries, et nos grands désirs d’aides, cramponne toi à la seule arme en ta possession, aime.



4 commentaires:

Claudine Chapuis a dit…

Merci Brigitte, pour ces mots très justes, donc très beaux. Je retiens particulièrement celui de décence qui devrait guider toutes nos actions en ce moment mais également l'action publique. Nous avons des marges de progrès de ce côté. Et aimer,oui, préserver ce qu'il y a de vivant en nous. C'est apaisant de vous avoir lu ( de plus en plus difficile je trouve, de retenir ses colères ). En vous souhaitant le retour du bleu,bonne journée.

Claudine Chapuis

Dominique Hasselmann a dit…

... la guerre que finalement chacun s'approprie (si l'on peut dire)... comme une impossibilité devenue soudain réelle. :-( 🇺🇦

Brigetoun a dit…

Merci Claudine

Brigetoun a dit…

Dominique, je ne tiens pas à me l'approprier (mais je comprends votre réflexion)