Mon explosion de toux et d'éternuements d'hier s'est soldée par l'impossibilité de dîner (ai gardé le riz au frigidaire pour en faire aujourd'hui une salade délicieuse pour le déjeuner) un renoncement, une incapacité à supporter plus que du café ce matin et la résolution de ne pas sortir et, de fait mon mal-être, a fortement diminué (me reste difficulté lire/écrire, petite migraine, fautes de frappe et un iMac cabochard qui se coince, refuse de rouvrir Open Office etc... malgré ou à cause de mes injures)
téléphoné à F pour lui indiquer que ne viendrai pas, oisiveté sans complexe, écoute « dans l'ombre de l'antitziganisme » (mieux que le titre) sur France Culture https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/serie-vivre-dans-l-ombre-de-l-antitsiganisme , tentative abandonnée de me lancer dans le #6 de l'atelier, recherche d'une image qui puisse coller vaguement avec le troisième portrait du #4 et reprendre pour le second la photo récente qui me l'avait dictée, les recopier ici :
Jean
ce que c'est que le ciel
Il a enjambé la corniche et repris pied dans la nacelle, s'est penché vers les quelques hommes qui, plantés sur les pavés de la rue, entourent le gros camion/grue, les têtes levées vers lui comme si le casque faisait plier les nuques, a laissé tomber quelques mots vers eux et puis, baissant la tête sur son micro, a détaillé ce qu'il avait constaté sur le toit et discuté avec le chef de chantier de ce qu'il devait faire. Il s'est redressé, heureux de la caresse du soleil, du frémissement du jeune feuillage des platanes sous le reste de vent, s'est à nouveau penché pour surveiller le chargement de matériaux dans la cassette comme il appelle le panier métallique qu'il fera, d'une pression de bouton, grimper vers lui. En se relevant, il a regardé le petit attroupement derrière la barrière qui ferme la place, juste après le portail du bel hôtel, là où elle se vide dans la rue, a repéré un appareil photo, s'est détourné vers le trottoir juste au moment où une femme et un enfant franchissaient la porte du jardin de l'hôtel, s'arrêtaient, levaient la tête vers lui. La femme veut partir vers le bout de la rue qui de ce côté est libre mais le gamin résiste. Sa mère se penche vers lui, lui parle – il ne sait en quelle langue, sauf que ce n'est pas de l'anglais, d'ailleurs il entend mal, elle ne s'adresse qu'à son fils – écoute la réponse prononcée sans tourner la tête vers elle, et maintenant elle le regarde lui, avec un peu de curiosité. Mais de ces deux visages renversés, de ces quatre yeux levés vers lui, ce sont ceux du garçon qui accrochent son regard, dans lesquels il se voit. Il se redresse, lève les yeux dans le merveilleux ciel bleu de mistral, se sent beau grâce à ce qu'il a vu d'émerveillement dans ces yeux enfantins, revit un instant la première fois où, avec un mélange de crainte, de plaisir, d'excitation, d'application à ne pas se laisser distraire de sa tâche malgré l'éblouissante fierté, il s'est trouvé hissé, bien plus haut qu'aujourd'hui d'ailleurs, au dessus des passants, d'un petit morceau de rue, seul dans l'air.
Adama
ce que c'est que le désir d'apprendre
Elle est arrivée après dur voyage dans cette petite ville. Elle a trouvé un lit, entassée dans une chambre avec trois autres filles d'une bâtisse fourmilière entre deux cours. Il y a celle qui semble la plus âgée, décidée, raisonnable, chaleureuse comme ses formes un peu plus qu'opulentes, une qui ricane de tout comme par la conviction que cela seul permet de durer, une liane souple qui sourit peu et qui, seule en ce lieu, porte un voile mais si gracieux qu'il est une évidence. Elle est juste un peu plus jeune que les trois autres, bouton éclos, grande et mince, cheveux rasés comme un garçon, le visage ovale et calme. Du voyage elle n'a gardé que la volonté de ne pas en avoir été changée, de conserver la réserve qu'on lui a enseignée et ses sourires sont rares lumineux et timides. Dans les petits chahuts du groupe elle rit parfois, un rire peu sonore, mais qui la secoue, la rejette un peu en arrière comme en dansant. Du voyage elle a gardé la tristesse de la séparation et la force de ce désir qui l'a fait partir : apprendre, même si, davantage que la plupart de ses compagnes et compagnons actuels, elle a déjà été à l'école. Du reste, de ce qui l'a fait quitter le village et son père, des péripéties du chemin, elle ne veut ni penser, ni parler. Dans la vie du groupe elle prend sa part des petits travaux comme l'ainée et contrairement aux autres filles, contrairement à une bonne partie des garçons. Elle aime cela en fait, ce début de normalité comme une étape où se reposer. Elle est toute dans l'attente, l'espoir, d'être acceptée, évaluée, incluse avant la fin de l'année scolaire. Elle s'installe dans la salle d'étude, sort un manuel, essaie de s'y retrouver, quand elle le peut assiste ceux qu'elle voit en difficulté devant un problème, une phrase qu'elle peut décrypter, mais seulement quand elle est certaine que cela sera accepté. Elle voit les couples adultes/élèves constitués avant son arrivée, mais ne demandait rien jusqu'à ce qu'une petite bonne femme pressée et blagueuse mais observatrice propose de lui trouver une aide.
2 commentaires:
Merci pour Jean
merci pour Adama
c'est très beau
merci à vous
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