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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

vendredi, mai 03, 2024

pluie toujours, souvenirs de lecture et une "traduction" de fragments





Jour de parapluies

de pluie imperceptible

de quelques travaux



Un peu de tâches ménagères faites avec trop de désinvolture, une sortie d’un peu plus d’une heure pour une  formalité et devoir de marcher (sans y mettre l’application qu’indique le mot devoir)… 



et comme, le matin, avais repris et enfin réellement écrit ma contribution, comme puis, au #1 de la boucle 2 de l’atelier de François Bon, je recopie le trop long  #4 de la boucle 1.

Souvenirs de lectures


Je me souviens, dans le bureau de mon grand-père, rue du Printemps à Paris, de sa main extrayant d’un rayon, à mi-hauteur des deux hauts rayonnages tapissant le coin entre la cheminée de banal marbre gris, vaguement directoire | à mes yeux tout au moins | et de la fenêtre sur cour, un livre broché à la couverture blanche cernée d’une bande rouge et me le tendant en me disant, « tu peux piocher dans ces livres, mais je te conseille celui-ci, ça devrait te plaire » et ce fut un éblouissement, la découverte de la gourmandise des mots à travers Edouard Glissant au sortir des Mazo de la Roche, Elizabeth Goudge ou des Maurois, des livres autorisés par ma mère ou même des extraits de classiques qui avaient le charme de ce qu’ils ne contenaient pas.. gourmandise qui m’est restée… quant à ce livre « La Lézarde » ne l’ai jamais relu, Glissant si.

Je me souviens des tomettes de la grande pièce boulevard Michelet à Toulon sur lesquelles je m’étais assise pour ouvrir « la Modification » que venait de terminer, perplexe et pas franchement conquise, ma mère et qu’elle m’avait prêté à ma demande | je viens de médire d’elle, en fait j’aurais sans doute dû plus souvent la solliciter | intriguée par une de ces conversations d’adultes aux lisières desquelles je m’incrustais, je me souviens du chemin de fer, je me souviens surtout de l’écriture qui me hissait, comme l’apparence sérieuse de ce livre, hors de la masse adolescente. Je me souviens du désir qui me venait quand j’entendais les noms de Butor ou Robbe-Grillet (pas encore de Sarraute ou Simon) que je n’ai pu assouvir que plus tard pour ceux qui paraissaient en poche… et justement je me souviens d’un des premiers de ma petite bibliothèque avec Butor encore et « le Passage de Milan ». Je n’ai maintenant aucun des deux et ne les ai pas relus depuis des années.

Je me souviens que la vieille édition brochée de mon père qui avait beaucoup vécu, au point de perdre quelques pages, de « Moby Dick » que m’étais accaparée, que j’ai lue et relue, un peu partout jusqu’au moment où l’ai perdue malgré sa taille je ne sais plus quand ; je me souviens de la découverte et de m’être passionnée pour les pages « scientifiques » en grattant mes jambes poisseuses d’un mélange de sable et de sève de pin, assise sur le toit d’un des blockhaus loués à la Base Aéronavale au Palyvestre là où il y a des immeubles vieillissants à l’arrière de la rangée d’immeubles bordant le port,  implantés là où il y avait la mer et un vague projet de port, et j’étais ravie il y a un an de trouver et acheter un exemplaire « en très mauvais état » presque comme le fugitif. 

Je me souviens des couvertures illustrées des minces livres de poche par lesquels j’ai découvert Sarraute et que je n’ai plus, les ayant remplacés, un peu avant de déménager, par le Pléiade, un de mes rares… acquis parce que c’était elle…

Je me souviens que j’ai lu très tard Proust parce que faisais un blocage et que j’avais décidé, isolée qu’étais dans mon univers de dactylos | ça je m’en étais extirpée | d’agents immobiliers, de gérants et entrepreneurs, que c’était un auteur qu’on ne lisait pas mais dont on parlait vêtu de flanelle grise en buvant du thé et écoutant des pièces pour piano de Chopin… Je me souviens que j’en avais petite curiosité mais que j’ai attendu qu’un peu après mes quarante ans un médecin ami de mes parents décide que je faisais une dépression | maigre à l’extrême étais, avec des crises de tétanie | et qu’on m’embarque pour une « maison de repos » à Pégomas pour mettre dans ma valise « Le côté de Guermantes » avec je ne sais plus quel dialogue de Platon en livres de poche, pensant que ce seraient là lectures solides qui me tiendrait occupée et hors de mon entourage un certain temps. Je me souviens que les découvrant dans ma chambre le jeune psychiatre a considéré que j’étais arrivée là, derrière cette fenêtre qui ne s’ouvrait pas, à la suite d’une erreur d’aiguillage et m’a dressé ordonnance verbale de me tenir à distance de mes co-malades navrants, et entre des séances d’intraveineuses pour me rendre forces de faire ami/amie avec les soignants et de me promener, par autorisation spéciale, dans les environs. La lecture m’a pris un certain temps parce que les bords de route n’y étaient guère propices mais a suffi à me faire entrer, en les prenant un peu en désordre, dans le monde des lecteurs de Proust.

Devant les deux premiers de mes rares Pléiade, le tome 1 des mémoires de Saint-Simon et le Montaigne, offerts par mes grands parents, sur ma demande, comme cadeaux de Noël les années de mes 16 et 17 ans, je n’ai pas besoin de me souvenir, ils le font. Surtout le Montaigne que j’ai pendant des années mis dans ma valise de vacancière et qui porte, taches, pliures, brins d’herbe et autres, traces de mes moments d’absence en sa compagnie et je souris en pensant aux débuts de matinées où, à plat ventre sur l’herbe rare d’une Cité Scolaire, route de Montfavet me semble-t-il, où nous étions hébergés avec les Cemea (ne sais plus comment j’en étais arrivée à découvrir la possibilité de les rejoindre) lors d’un festival d’Avignon, je piochais dans sa pensée, ses lectures etc…  en attendant que nous partions avec quelques amis professeurs et un grand hindou ne parlant à peu près pas le français, arrivé là par mystère, chargé d’un oreiller pour amortir le contact de mes fesses pointues et des bancs qui meublaient alors les premières salles du off naissant, circuler entre rencontres, lectures et spectacles.

Et pour le poème du jour, parce que j’ai retrouvée cherchant un autre livre ce matin, le livre Poésie/Gallimard réunissant avec d’autres textes de Pascal Quignard sa traduction d’ »Alexandra » de Lycophon et de quelques fragments de Zétès ou de Quignard en version Zentès plus exactement en reste à un très très  court fragment (qui m’a sauté aux yeux en feuilletant)

Fragment LXII (2)

(…) Ils transportent le soleil qui joue dans le seau qui est plein

mais ne l’introduisent pas dans la cave.

10 commentaires:

Dominique Hasselmann a dit…

La lecture fait écrire… Et après vous direz peut-être que vous n'avez pas le temps de jeter quelques lignes pour un "Va-et-Vient" ?… ;-)

Brigetoun a dit…


je dirais plus simplement que suis plus intimidée par les va et vient (chez François Bon je me perds dans la masse et me sens incluse)

jeandler a dit…

Je me souviens d'avoir écrit sur le sujet : on se souvient de tout, à l'abri d'un parapluie.

Elise a dit…

Émue à vous lire encore, souvenirs qui me reviennent par la grâce de votre évocation, Proust premier tome Pléiade chez un bouquiniste, plus rare de trouver les trois, trois à l’époque, l’été de mes quarante ans, je ne me sentais pas à la hauteur, pour d’autres, des raffinés cultivés, un sentiment d’exclusion, bref ! Sylvette ma partenaire tennis ouvrière en usine, un déménagement, je l’ai perdue de vue, Sylvette donc le lisait, elle écoutait France Culture. J’ai commencé, un monde s’est ouvert. Merci à vous Brigitte de faire office de madeleine.

Brigetoun a dit…

et quel parapluie Pierre !

Brigetoun a dit…

Elise pas si loiu comme souvenir en fait oui

mémoire du silence a dit…

Oh ! Que j'aime ce texte
je m'y retrouve tant et tant
dans d'autres temps, d'autres livres
d'autres instants, d'autres senteurs
mais Moby Dick, oui...

merci

Brigetoun a dit…

Moby Dick et la liberté du mélange de styles

Dominique Autrou a dit…

Les fleurs (de pluie) sont exquises et l’atelier (de François Bon) est d’une lecture délicate et profonde.

Brigetoun a dit…

grand merci Dominique

quant aux fleurs de pluie ma foi le retiur du bleu me satisfait assez