Mais ce n'est pas, ou pas encore, la fin à Avignon je veux dire pour le Festival.
Lundi matin, en allant faire ce que je pouvais comme courses, les halles étant fermées, les rues m'ont semblées presque vides, et j'ai rencontré des bourgeois avignonnais se racontant leurs vacances-fuites du Festival.
Journée de baleine échouée, et en sortant, un peu avant six heures, je suis tombée sur mon toubib : "je ne vous demande pas comment vous allez, ma chère, nous sommes tous cuits et recuits". (J'ai vérifié dans une vitrine, ça allait encore). Je suis surtout tête en l'air, et j'avais pris un billet pour un concert à Saint Agricole à 18 heures et pour les marchands de Pommerat à 19 heures, tout à coté heureusement, à l'opéra.
Du concert, qui tardait à commencer, je n'ai entendu que la fantaisie et fugue sur le choral "ad nos, ad salutarem undam" de Liszt, qui dure une demi-heure et n'ai pas eu droit à ce qui m'avait attiré : des moments musicaux de Kurtag et un quatuor de Bartok. Mais j'avoue que c'était assez superbe, même si les grands mouvements résonnaient sur ma migraine avec une efficacité redoutable. De belles masses, superpositions de tons. - des modulations - de petites vrilles légères entre les blocs - une montée, comme de marches - le motif simple du choral etc.. trop foisonnant pour que mon ignorance me permette d'en parler. En même temps, malgré la relative fraîcheur de l'église, je me sentais, dans mon ensemble blanc, aussi sale que la ville.
Le raccourci vers l'opéra, pris en contravention une photo que je garde, quelle que soit sa qualité, parce qu'elle m'a valu une réprimande. Négocié un strapontin haut perché et dégusté le spectacle qui est, comme on le disait, très réussi (je deviens d'un consensuel !).
Une femme dans un appartement vide, "ensevelie sous les dettes", la chance de son amie qui travaille dans l'usine chimique (vision de la chaîne, par le seul mouvement des bras des femmes, le reste se perdant dans le noir) et son mal de dos horrifiant, la menace de fermeture après une explosion, et la peur du chômage. Mais aussi, "le monde vrai" qui est le monde des morts, la foi en eux qui peut entraîner à sacrifier le fils pour sauver l'usine - la conception d'un enfant sans être sure d'avoir fait ce qu'il fallait pour cela - le faux fils, la jeune fille dévouée on ne sait pourquoi - et par moment une déconnection entre le verbe et les actes mimés. Tout un irrationnel qui empêche la thèse. Une langue à la simplicité travaillée, efficace, pour des idées un peu imprécises parfois.
Voix off, sauf un court dialogue - espace dessiné par de belles lumières, et jeux de pénombres, tons froids, un peu à la Hopper ou la mise en scène de Bob Wilson pour Orlando, au moins formellement. Fragilité extrême des êtres, vus un peu comme des silhouettes - femmes toutes en jambes, non de manière sensuelle, mais un peu comme des insectes. Relations d'argent. Rapport au travail ou à son absence. Nous vendons notre temps, notre force, notre vie, nous sommes des marchands de nous-mêmes et c'est ce qui nous constitue et nous tient debout. Parenté revendiquée mais refusée avec la prostituée. Et je me suis demandée : l'usine est-elle sauvée par le scandale de la mort de l'enfant ou par le début de la guerre.
Pas si vide que ça la ville en sortant. Et de bonnes critiques pour Gens de Séoul. Tant pis, ma foi.
13 commentaires:
...et on n'a pas fini de cuire on dirait, le pic est pour aujourd'hui !
Je serai toi, je retournerai dans l'église, ....l'atmosphère doit y être rafraichissante :-)
j'ai eu des nouvelles de ma fausse petite fille qui a un job de serveuse et de la jonction machine à café/chaleur - penser aussi aux maçons, aux blanchisseuses, aux cuisiniers
J'aurai pu vous accompagner cette journée,musique et pièce étaient à la portée de mes goûts...surtout la pièce.
A publier s'il vous plaît pour lancer le débat :
Quel est le synonyme de "diable" en langue socialiste ? Entrepreneur.
vous cherchez un exemple de sottise vaguement provocatrice et hors sujet ?
il n'est pas question de débatre sur des prémisses pareilles, ceci au cas bien improbable où quelqu'un aurait l'intention de donner suite à la première phrase que je n'avais pas lue
Malheureusement cette musique là m'est inconnue... Et j'ai beau essayé mes oreilles s'y refusent pour le moment.
Reposez vous bien de cette migraine et de cette horriblee chaleur.
Bien à vous,
OLIVIER
Nous vendons notre temps, notre force, notre vie, nous sommes des marchands de nous-mêmes.......
bri bon courage , il faut surtout supporter cette chaleur !!!
Toujours aussi passionnant, on a envie que ce festival ne s'arrête jamais tant tu nous le fait partager... j'espère que ta plume continuera de jouer après le bouquet final. Merci
J'aime bien me ballader dans les rues vides, quand tout le monde fuit la ville et la chaleur torride de l'été. Un spectacle allégeant pour mes yeux.
pas facile de prendre des photos dans un opéra sans se faire gronder...ils sont impitoyable. retour sur les blogs après la nécéssité d'un formatage...
Tes billets sont superbes et les maux de dos me rappellent que dans d'autres situations...et la chaleur n'arrange rien
malheureusement il n'y a pas que le dos
C, vue au Poulguin chez A et les cousins la semaine dernière, m'a dit que tu bloguais...
Je viens de parcourir quelques pages, il y en a de magnifiques, Brigitte. Voilà pourquoi on ne se croise plus au théâtre de la Colline...
Mon adresse: constance.krebs@noos.fr
Je t'embrasse,
ck
plaisir de la rencontre même par blog interposé. Oui C m'a dit qu'elle t'avait recontrée. Maintenant je me les récupère un peu mes soeurs. A vrai dire le blog est le résultat de ce qui m'a chassée de Paris et de ces théâtres. C'est un très bon médicament.
Et je suis très fière, si certaines pages te plaisent. Ne faudrait pas que je perde ma lucidité, je n'ai pas grand chose d'autre.
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