Il a toqué à ma porte avec une énergie digne de nos anciens temps, et la bobinette en a chu. Je lui ai dit « toujours vert mon cher » mais je l’ai vu sur le seuil et point si vert était.
Il a grimacé « nous ne le sommes plus trop ma chère », et j’ai reconnu sa délicatesse. Tant de temps depuis… « quel plaisir de reprendre du service ensemble, ne trouvez vous pas ? »
Sa carriole était là, ses rouge et noir un peu écaillés, mais bien solide et bien suspendue, je l’ai su en m’y installant, en étalant ma mante sur le doux cuir très spécial du siège.
Nous nous sommes regardés, j’ai levé mon menton, il a levé son fouet. Il a du le faire claquer dans l’air au dessus de la tête de Marcadrou, et nous sommes partis, et ma foi les sabots faisaient encore du bruit et une petite brise de vitesse a fait danser le ruban de mon chapeau, mais je me souvenais d’autres emportements.
« Qu’y a-t-il ? Nous serons en retard «
« Té l’est plus trop vaillant Marcadrou – mais toi ma belle tu n’as plu ta chèvre d’or et tu es bien contente de nous retrouver Marcadrou et moi. C’est qu’ils sont mortels nos animaux. »
Et Marcadrou, par les chemins et à travers le bois, nous a conduits à la clairière.
Nous n’étions pas nombreux, mais assez pour faire danser des ombres à la lueur du grand feu, et derrière lui trônait le grand vieux, toujours beau, solennel et souriant. Il m’a fait signe de m’asseoir à sa droite. Je me suis carrée dans l’odeur de la mousse et je les ai regardés. Il y avait de tout, des jeunes femmes très noires et ricanantes avec des éclats de métal et des cheveux de toutes les couleurs, des devineresses assises rondement, de grands échalas compassés, un ou deux prestidigitateurs, un vieux tout en bosses et velours, un peu à l’écart, ses grandes et belles mains de guérisseur serrées sur un bâton épineux devant lui. Et le grand vieux m’a dit « nous devenons rares ma belle, mais nous nous regroupons ».
Et autour de nous les arbres étaient là, amicaux, et l’ombre épaisse sous eux. Mon compagnon, debout derrière moi, a commencé à jouer de sa vielle et le bois a frémi. Une onde, ou son souvenir, a glissé le long de mes bras, et les elfes sont sortis des fourrés pour m’entourer et me saluer.
Et ils se sont mis à danser avec les flammes et, peu à peu, les jeunes femmes les ont rejoints, anguleuses puis de plus en plus sauvagement élégantes, et j’ai ri de plaisir.
La Pascaline, à gauche du grand vieux, s’est penchée vers moi, toujours aussi blanche de peau, noire de cheveux et de robe, rouge de bouche, mais grasse maintenant, si grasse, et m’a soufflé « nous vous attendions » avec son sourire pincé.
Et autour de nous les arbres étaient là, amicaux, et l’ombre épaisse sous eux. Mon compagnon, debout derrière moi, a commencé à jouer de sa vielle et le bois a frémi. Une onde, ou son souvenir, a glissé le long de mes bras, et les elfes sont sortis des fourrés pour m’entourer et me saluer.
Et ils se sont mis à danser avec les flammes et, peu à peu, les jeunes femmes les ont rejoints, anguleuses puis de plus en plus sauvagement élégantes, et j’ai ri de plaisir.
La Pascaline, à gauche du grand vieux, s’est penchée vers moi, toujours aussi blanche de peau, noire de cheveux et de robe, rouge de bouche, mais grasse maintenant, si grasse, et m’a soufflé « nous vous attendions » avec son sourire pincé.
Et nous les deux vieilles, fée et sorcière, nous les avons regardés en chantonnant et puis Pascaline a crié « Mais où est-il donc passé ce sacré lutin ? » ; le grand vieux m’a expliqué « son fils Renaud est parti en voyage d’étude à l’ile de Pâques avec sa belle et ne revient plus, et elle garde leur enfant ». Et pendant que tous battaient le sous-bois, elle m’a expliqué les projets qu’elle avait pour lui, les études et épreuves auxquelles elle le soumettait, le grand espoir qu’il lui donnait, et elle le prédisait voyant extraordinaire, maitre des éléments et… mais on ne le trouvait point.
Alors le vieux guérisseur a tendu son bâton et nous sommes partis suivant la ligne qu’il montrait, et nous l’avons trouvé, le lutin, appuyé sur un buisson de lentisques, les pieds au bord d’une flaque, les bras croisés, le front têtu, et, quand sa grand-mère l’a interrogé, morigéné avec la colère de qui est soulagée, il a grommelé « je veux entrer à Sciences Po », et le bois s’est fané.
Alors le vieux guérisseur a tendu son bâton et nous sommes partis suivant la ligne qu’il montrait, et nous l’avons trouvé, le lutin, appuyé sur un buisson de lentisques, les pieds au bord d’une flaque, les bras croisés, le front têtu, et, quand sa grand-mère l’a interrogé, morigéné avec la colère de qui est soulagée, il a grommelé « je veux entrer à Sciences Po », et le bois s’est fané.
8 commentaires:
Belle histoire ou conte bien raconté, en respectant la consigne principale, tu as relevé le défi avec brio.
Bravo, ma belle, j'ai bien aimé lire ce texte.
Bon jeudi et bisous.
j'ai adoré l'idée d'un lutin à Sciences Po, voilà au moins de quoi rire un peu là-bas ! bravo Brig tu m'as fait commencer la journée de bien belle manière. Que la tienne soit bonne !
Quelle imagination ma chère Brig...j'en ris encore. Voilà ici un bien charmant texte. Belle journé Brig!
superbe, quelle imagination!
aller à sciences po, quelle idée!
pas si mal tout de même- tout dépend de ce qu'on en fait- et au fond avec une mentalité de lutin ? (pas malfaisant de préférence)
A un défi somme toute pas insurmontable pour des gens qui, comme toi, ont le talent, tu aurais pu répondre avec un peu de facilité, remplissant le "service minimum". Mais non, tu nous enchantes avec magie... Merci encore !
Quel retour de bâton cette chUUte. ;o)
Et alors, mis à part les crottes alentours, tu n'apprécies pas la rue Saint Guillaume ?
Bizz, et Bon Nadal.
bon j'aurais pu mettre Normale ou Centrale - d'autant qu'à Sciences Po y a quelqu'un que j'aime bien
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