Samedi matin quand un petit vent gai rendait la marche légère Désert - pour moi donc
Mathilde, dans la lingerie, a entrepris d’aider Julie. Concientes toutes deux qu’en fait elles n’ont rien d’utile à y faire.
Mathilde s’essaie à l’aisance, se voudrait habile, déteste se sentir, si peu que ce soit, chargée d’un rôle, sans légitimité ni désir, se refuse à investir l’intimité de la jeune femme, et elle retrouve aussi cette sympathie qu’elle avait ressentie à leur première rencontre, le plaisir de cette ébauche de familiarité qui avait semblé vouloir s’installer avant son départ, et celui des quelques lettres reçues, leur réserve fragile, une certaine liberté qui perçait peu à peu dans le ton.
Elle regarde l’autre, le sourire, le léger raidissement, la tête qui se détourne comme naturellement, et, à un moment, navrant, un regard furtif, comme acculé.
Elle rit, cherche une façon de l’entraîner hors de la pièce, de renoncer, d’enchaîner sur une visite neutre.
Julie s’est débatue - elle l’aime bien - pourrait presque lui faire confiance - mais il s’agit là de Madame Icart la jeune, et derrière elle il y a sa mère (la patronne se dit-elle avec ironie, se forçant à une hostilité protectrice) mais surtout Aurélie Icart, et le respect, la crainte que Julie éprouve pour cette femme.
Alors, brusquement, brutalement, elle se lance, employant des mots qu’elle sait choquants pour l’autre, pour exprimer ce qui devrait la heurter, ce qui ne se dit, ni ne s’éprouve, cet attrait qu’elle a eu pour Alphonse, le plaisir, cette indiférence totale à tout le reste - et je n’ai jamais cru que je l’aimais - cette certitude aussi qu’elle n’est pas vraiment de la même sorte. - Je n’ai rien, et rien à protéger, ni l’envie
- vraiment ?
Puisque le ton est celui-là, Mathilde veut croire qu’elle peut aussi en user, et s’en servir peut-être
- mais vous vous mariez
- on dit que je me marie
- que ferez vous alors ? Vous ne pourrez rester si la nouvelle n’est pas très vite répandue
- je ne sais pas. Je partirai. Je peux essayer de retrouver mon père
- le voudra-t-il ?
- pourquoi Alphonse devrait-il assumer ? J’ai voulu me croire libre...
Elles se regardent en face depuis le début de l’échange, mais peu à peu Julie semble rapetisser, se courbe un peu, épaules en berne
- Oh et puis, vous ne pouvez rien pour moi.
- je pourrais essayer de savoir, par les garçons, ce que pense vraiment votre ami. Mais, c’est vrai, vous ne l’aimez pas, ne voulez pas de lui…
Et Julie
- j’ai tellement peur, peur de gacher sa vie, peur de le contraindre et qu’il m’en veuille, peur de… que je crois que ce n’est plus vrai.
Mathile lui touche le bras, l’attire, et elle pleure.
Une petite remontée ou suite du roman de gare http://brigetoun-romandegare.blogspot.com/
Mathilde, dans la lingerie, a entrepris d’aider Julie. Concientes toutes deux qu’en fait elles n’ont rien d’utile à y faire.
Mathilde s’essaie à l’aisance, se voudrait habile, déteste se sentir, si peu que ce soit, chargée d’un rôle, sans légitimité ni désir, se refuse à investir l’intimité de la jeune femme, et elle retrouve aussi cette sympathie qu’elle avait ressentie à leur première rencontre, le plaisir de cette ébauche de familiarité qui avait semblé vouloir s’installer avant son départ, et celui des quelques lettres reçues, leur réserve fragile, une certaine liberté qui perçait peu à peu dans le ton.
Elle regarde l’autre, le sourire, le léger raidissement, la tête qui se détourne comme naturellement, et, à un moment, navrant, un regard furtif, comme acculé.
Elle rit, cherche une façon de l’entraîner hors de la pièce, de renoncer, d’enchaîner sur une visite neutre.
Julie s’est débatue - elle l’aime bien - pourrait presque lui faire confiance - mais il s’agit là de Madame Icart la jeune, et derrière elle il y a sa mère (la patronne se dit-elle avec ironie, se forçant à une hostilité protectrice) mais surtout Aurélie Icart, et le respect, la crainte que Julie éprouve pour cette femme.
Alors, brusquement, brutalement, elle se lance, employant des mots qu’elle sait choquants pour l’autre, pour exprimer ce qui devrait la heurter, ce qui ne se dit, ni ne s’éprouve, cet attrait qu’elle a eu pour Alphonse, le plaisir, cette indiférence totale à tout le reste - et je n’ai jamais cru que je l’aimais - cette certitude aussi qu’elle n’est pas vraiment de la même sorte. - Je n’ai rien, et rien à protéger, ni l’envie
- vraiment ?
Puisque le ton est celui-là, Mathilde veut croire qu’elle peut aussi en user, et s’en servir peut-être
- mais vous vous mariez
- on dit que je me marie
- que ferez vous alors ? Vous ne pourrez rester si la nouvelle n’est pas très vite répandue
- je ne sais pas. Je partirai. Je peux essayer de retrouver mon père
- le voudra-t-il ?
- pourquoi Alphonse devrait-il assumer ? J’ai voulu me croire libre...
Elles se regardent en face depuis le début de l’échange, mais peu à peu Julie semble rapetisser, se courbe un peu, épaules en berne
- Oh et puis, vous ne pouvez rien pour moi.
- je pourrais essayer de savoir, par les garçons, ce que pense vraiment votre ami. Mais, c’est vrai, vous ne l’aimez pas, ne voulez pas de lui…
Et Julie
- j’ai tellement peur, peur de gacher sa vie, peur de le contraindre et qu’il m’en veuille, peur de… que je crois que ce n’est plus vrai.
Mathile lui touche le bras, l’attire, et elle pleure.
Une petite remontée ou suite du roman de gare http://brigetoun-romandegare.blogspot.com/
En fin d’après midi, un « cercle du silence » à l’initiative de RSF et autres, assez moyennement fourni, suscitant un certain intérêt. Rien d’autre qu’une assez longue imobilité avec un panneau , et des sourires. Crevée. Trois petites photos sur http://brigetoun-avignonmu.blogspot.com/
7 commentaires:
Chouette, je suis le premier ! Et ce nouveau passage du roman de gare est tout simplement délicieux, tout autant que l'est Mathilde.
Sur les cercles de silence de RSF, je crois qu'il faut vraiment rendre hommage aux actions de cette associations, partie de rien ou presque. J'attends toujours, avec angoisse, de voir jusqu'à quand le gouvernement actuel pourra mener sa politique de ségrégation et de haine de l'autre sans que les masses ne réagissent. Finalement, pas certain que nous ayons retenu les leçons de l'histoire.
A jeudi, Brigetoun !
Beaucoup d'émotion ce matin, de suspension comme en attente d'un ciel d'orage que l'on devine au loin, encore indécis.
Oui, on ne peut dire que l'on ne savait pas. Comme hier , aujourd'hui.
Magnifique boutis sur la dernière photo.
Mais le vent tombe et la chaleur monte...
En Italie, à ma connaissance, il n'y a pas l'équivalent de RESF.
Et Maroni, le ministre de l'intérieur a fait un pas de plus du côté de l'ignoble en proposant de ficger tous les roms, y compris les enfants.
très peu de réactions contraires dans la société.
ça devient très inquiétant
juste venir te saluer ici entre mes cartons!
La tour saint Jean n'est plus à ton goût, trop fardée ! ! !
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