me jambes, mes hanches, suivent son déroulement devant mes yeux, avec la montée de mon rythme, ma pulsion, une petite musique profonde.
Le mouvement entraîne le chant de mon sang, et mon crâne s'y baigne, et je salue la lumière qui danse avec moi sur la peau superbement malade du mur de l'église.
Sous cette alacrité, s'engourdit une petite douleur, et si elle me fait trébucher, l'épaule, le bras vont vers le mur pour un secours, en se déroulant largement, lentement, vers son appui, et il vient à moi.
Nous n'avons pas besoin d'un contact, juste d'un suspens, de cet air entre nous et de cette tension en retour.
Et si, pour d'éventuels regards il n'y a là qu'une étrangeté, cela ne compte pas, je suis dans ce jeu du corps et de la vie.
refuser pourtant, et je n'y arrive pas toujours, la tentation de la démonstration, de passer de la danse intérieure au mime, de l'accord à l'appel grotesque, d'une forme de bonheur à un échange honteux.
Devant ma porte, dans la montée du jour et de la lumière ou de l'absence où elle se cache, les os se déplient et chaque muscle s'étire, se hisse, entraînent mes bras dans un salut à la journée, lui rendent grâce.
Assise dans l'écoute, je laisse les mot ou la musique jouer vers moi, et je les accueille d'un mouvement invisible - les boire à travers un dos, un buste tendus sans raideur, par l'attention qui habite ma nuque, mon cou, monte vers mes yeux.
participation à l'heure des sablés et du miel aux impromptus littéraires http://www.impromptuslitteraires.fr/dotclear/ sur le thème de la semaine : "danse ta vie" (j'ai considéré en bonne égocentrique que le tu me désignait)
(photo AFP/FREDRIK PERSSON)
grâce à François Bon j'avais sous les yeux le discours de Le Clézio en écoutant sa voix sur France Culture. Un petit regret en constatant qu'il semble avoir supprimé (question de temps ? ou distraction de ma part) ce beau passage, plus intime, peut-être moins généreusement ouvert sur le rôle de la littérature,
"La solitude est aimante aux écrivains, c’est dans sa compagnie qu’ils trouvent l’essence du bonheur. C’est un bonheur contradictoire, mélange de douleur et de délectation, un triomphe dérisoire, un mal sourd et omniprésent, à la manière d’une petite musique obsédante. L’écrivain est l’être qui cultive le mieux cette plante vénéneuse et nécessaire , qui ne croît que sur le sol de sa propre incapacité. Il voulait parler pour tous, pour tous les temps : le voilà, la voici dans sa chambre, devant le miroir trop blanc de la page vide, sous l’abat-jour qui distille une lumière secrète. Devant l’écran trop vif de son ordinateur, à écouter le bruit de ses doigts qui clic-claquent sur les touches. C’est cela, sa forêt. L’écrivain en connaît trop bien chaque sente. Si parfois quelque chose s’en échappe, comme un oiseau levé par un chien à l’aube c’est sous son regard éberlué – c’était au hasard, c’était malgré lui, malgré elle."
Mais il y avait tout le reste et la jeune conteuse de la forêt des Emberas, et les hommages, l'évocation des écrivains parlant de notre monde, et puis
"À l’enfant inconnu que j’ai rencontré un jour, au bord du fleuve Taira, dans la forêt du Darién. Dans la nuit, assis sur le plancher d’une boutique, éclairé par la flamme d’une lampe à kérosène, il lit un livre et écrit, penché en avant, sans prêter attention à ce qui l’entoure, sans se soucier de l’inconfort, du bruit, de la promiscuité, de la vie âpre et violente qui se déroule à côté de lui. Cet enfant assis en tailleur sur le plancher de cette boutique, au cœur de la forêt, en train de lire tout seul à la flamme de la lampe, n’est pas là par hasard. Il ressemble comme un frère à cet autre enfant dont je parle au commencement de ces pages, qui s’essaie à écrire avec un crayon de charpentier au verso des carnets de rationnement, dans les sombres années de l’après-guerre. Il nous rappelle les deux grandes urgences de l’histoire humaine, auxquelles nous sommes hélas loin d’avoir répondu. L’éradication de la faim, et l’alphabétisation. "
grâce à François Bon j'avais sous les yeux le discours de Le Clézio en écoutant sa voix sur France Culture. Un petit regret en constatant qu'il semble avoir supprimé (question de temps ? ou distraction de ma part) ce beau passage, plus intime, peut-être moins généreusement ouvert sur le rôle de la littérature,
"La solitude est aimante aux écrivains, c’est dans sa compagnie qu’ils trouvent l’essence du bonheur. C’est un bonheur contradictoire, mélange de douleur et de délectation, un triomphe dérisoire, un mal sourd et omniprésent, à la manière d’une petite musique obsédante. L’écrivain est l’être qui cultive le mieux cette plante vénéneuse et nécessaire , qui ne croît que sur le sol de sa propre incapacité. Il voulait parler pour tous, pour tous les temps : le voilà, la voici dans sa chambre, devant le miroir trop blanc de la page vide, sous l’abat-jour qui distille une lumière secrète. Devant l’écran trop vif de son ordinateur, à écouter le bruit de ses doigts qui clic-claquent sur les touches. C’est cela, sa forêt. L’écrivain en connaît trop bien chaque sente. Si parfois quelque chose s’en échappe, comme un oiseau levé par un chien à l’aube c’est sous son regard éberlué – c’était au hasard, c’était malgré lui, malgré elle."
Mais il y avait tout le reste et la jeune conteuse de la forêt des Emberas, et les hommages, l'évocation des écrivains parlant de notre monde, et puis
"À l’enfant inconnu que j’ai rencontré un jour, au bord du fleuve Taira, dans la forêt du Darién. Dans la nuit, assis sur le plancher d’une boutique, éclairé par la flamme d’une lampe à kérosène, il lit un livre et écrit, penché en avant, sans prêter attention à ce qui l’entoure, sans se soucier de l’inconfort, du bruit, de la promiscuité, de la vie âpre et violente qui se déroule à côté de lui. Cet enfant assis en tailleur sur le plancher de cette boutique, au cœur de la forêt, en train de lire tout seul à la flamme de la lampe, n’est pas là par hasard. Il ressemble comme un frère à cet autre enfant dont je parle au commencement de ces pages, qui s’essaie à écrire avec un crayon de charpentier au verso des carnets de rationnement, dans les sombres années de l’après-guerre. Il nous rappelle les deux grandes urgences de l’histoire humaine, auxquelles nous sommes hélas loin d’avoir répondu. L’éradication de la faim, et l’alphabétisation. "
m'en suis allée dans la nuit fraîche vers l'École d'art pour une présentation, en prélude au prochain festival, par Joël Jouanneau (nous vieillissons bien) de son travail en cours, actuellement titré "sous l'oeil d'Oedipe", une traversée de la famille des Labdacides, écriture personnelle en explorant les versions parcellaires et divergentes d'Eschyle, Euripide (les Phéniciennes que je n'ai pas lu) et les trois pièces de Sophocle, avec des recours à Emily Dickinson, à l'Ismène de Ritsos etc...
L'amphithéâtre était comble et je me suis assise par terre, puis sur une chaise de jardin rajoutée, et j'entendais assez mal.
Oedipe sera Jacques Bonnafé, Cadmos incarnation de Thèbes Roland Bertin... Des passages du texte qui n'est pas définitif lus par Jouanneau et trois jeunes acteurs incarnant Etéocle, Ismène et une jeune fille que je prenais pour Antigone mais qui semble devoir remplir un peu le rôle d'intercesseur vers le public qui était celui du choeur (en gros).
des brides au début - un chemin, un banc, Oedipe lit un livre de Michon etc...
plus tard un bout de la troisième partie "les frères" avec une entrevue avant la bataille entre Polynice et Etéocle, provoquée par Ismène - j'ai aimé et peu à peu les tragiques et leur langue arrivent.
Et puis un récit de la bataille qui m'a un peu gêné par un ton un peu "Fanfan la Tulipe", assez en accord avec plusieurs idées de scénographie, mais qui se heurte au dialogue précédent. Une impression très personnelle, on verra ce que donnera la version définitive. Enfin je verrai peut-être, le choix étant encore ouvert comme lieu entre Châteaublanc (pas pour moi) et le gymnase Mistral.
Discussion sans excès de pesanteur, ni de futilité avec la salle. J'avais un peu mal et me suis éclipsée avant la partie verres en mains.
L'amphithéâtre était comble et je me suis assise par terre, puis sur une chaise de jardin rajoutée, et j'entendais assez mal.
Oedipe sera Jacques Bonnafé, Cadmos incarnation de Thèbes Roland Bertin... Des passages du texte qui n'est pas définitif lus par Jouanneau et trois jeunes acteurs incarnant Etéocle, Ismène et une jeune fille que je prenais pour Antigone mais qui semble devoir remplir un peu le rôle d'intercesseur vers le public qui était celui du choeur (en gros).
des brides au début - un chemin, un banc, Oedipe lit un livre de Michon etc...
plus tard un bout de la troisième partie "les frères" avec une entrevue avant la bataille entre Polynice et Etéocle, provoquée par Ismène - j'ai aimé et peu à peu les tragiques et leur langue arrivent.
Et puis un récit de la bataille qui m'a un peu gêné par un ton un peu "Fanfan la Tulipe", assez en accord avec plusieurs idées de scénographie, mais qui se heurte au dialogue précédent. Une impression très personnelle, on verra ce que donnera la version définitive. Enfin je verrai peut-être, le choix étant encore ouvert comme lieu entre Châteaublanc (pas pour moi) et le gymnase Mistral.
Discussion sans excès de pesanteur, ni de futilité avec la salle. J'avais un peu mal et me suis éclipsée avant la partie verres en mains.
11 commentaires:
eh bien voilà on peut donc danser sa vie à travers les mots que nous prêtent ceux qui savent ,dans la grande solitude,inventer des asiles d'un jour pour attendre la mort..
"Mon coeur, lassé de tout, même de l'espérance,
N'ira plus de ses voeux importuner le sort ;
Prêtez-moi seulement, vallon de mon enfance,
Un asile d'un jour pour attendre la mort." ( Le vallon : Lamartine )
"oublier les deux grandes urgences de l’histoire humaine, auxquelles nous sommes hélas loin d’avoir répondu. L’éradication de la faim, et l’alphabétisation"
Je devais venir... j'ai laissé passer l'heure ! Je lis donc ton texte et j'apprécie le style.
Comme ces arbres, tu cherches en si peu d'espace, la lumière et te penches vers elle.
ô solitude.
Purcell, la voix de Gérard Lesne.
Danse ta vie ? ardu comme sujet ! pas pour toi suis sûr !
Oh ! chère Brig,
Quel texte ! j'adore !
Tout comme ta 1ère photo.
Quel livre de Le Clézio me conseillerais tu ? merci !
Toujours aussi occupée ! ;)
Que j'aimerai écrire des phrases à l'emporte pièce comme celle ci :"Et si, pour d'éventuels regards il n'y a là qu'une étrangeté, cela ne compte pas, je suis dans ce jeu du corps et de la vie" ou ces passages sur la solitude...du pur sucre!
Encore un lundi bien chargé pour toi chère Brig.
Que ta journée soit douce malgré les gouttes.
Beau texte, brige !
Quel roman de Le Clézio aimes-tu vraiment beaucoup ? L'autre jour, j'en ai pris un à la bibliothèque et au bout d'une vingtaine de pages, il me tombait littéralement des mains. Sans doute n'avais-je pas choisi le bon... Je ne me souviens même plus du titre tellement ça m'a ennuyé...
à vrai dire je n'ai quasiment rien lu de Le Clézio (mais ne m'en vante pas plus que ça - une longue p"riode où je n'ai à peu près lu, quand je ne bossais pas que du 18ème, Saraute, les policiers des vieilles anglaises et un peu de Claude Simon) - juste Désert aimé il y a très longtemps et des contes à peu près oubliés
Moi elle me plaît cette évocation de ces guerres fratricides mais il ay bcp à dire. Choix à effectuer? Il ya pas mal de facettes dans les drames grecs..
Pour moi la solitude peut être propice à l'inspiration, mais pas l'essence du bonheur.
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