Scholastique, en un sursaut, a maudit son corps. A écouté sa malédiction retentir, résonner, dans l'espace vide de son monde intérieur, l'a écrite, l'a regardée. Et puis a fait une grimace qui se sentait sourire, et s'est trouvée absurde.
Elle ne supportait plus les limites, parfois douloureuses, qu'il lui infligeait maintenant, et que ce soit plus ou moins le sort commun, surtout pour ceux qui s'étaient bornés à le traiter, au long de toutes ces années qui passaient sans qu'ils veuillent ou puissent le voir, le savoir, comme un outil à priori fiable, dont il était inutile, superflu, un peu méprisable, de se soucier, la conscience qu'elle en avait, ne calmait pas sa navrance, parfois sa rage, cette révolte qui somnolait en elle, se réveillait abruptement devant un obstacle.
Mais elle ne pouvait réellement se repentir de ce manque de considération qu'elle avait eu pour lui - il lui avait toujours paru moyennement laid, fort peu doué, et elle ne pouvait l'aimer, croyait-elle, malgré les quelques joies (elle était très primairement injuste à ces moments là) qu'il lui avait procurées.
Et puis s'il était inapte à plaire, et, ce qui était peut-être tout aussi navrant - elle se croyait résignée depuis longtemps à toute prétention de ce coté - à une nage ou une course conquérante (il se contentait de glisser et en tirait un plaisir qui se répandait jusqu'à la baigner de douce joie, mais elle se refusait pour l'instant à toute bonne foi, et puis ce temps était révolu) ou à danser sur un fil, et à s'envoler dans les arbres, à faire sortir des pierres ce qu'elle voulait y croire tapi, il y avait eu cette chose qu'elle n'osait nommer esprit, pour y suppléer.
Seulement, en lisant sa malédiction, elle a su que c'était une présomptueuse, injuste, idiotie. Parce que s'il y avait des êtres qui étaient esprit, si cela était possible, ce n'était certes pas son cas. Et, malmené ou non (elle avait tout de même souvent conscience de ce qu'il lui transmettait), c'était lui qui gouvernait tout, et aucune imagination, aucune envolée naïve, aucune pensée peut-être, ne venait que par et de lui.
Était-ce idée joyeuse ou décourageante ?
Scholastique a soupiré, a fermé les yeux et s'est endormie, recroquevillée délicieusement sur la fraîcheur du coton.
Brigetoun, elle, a testé sa résistance à l'agoraphobie dans l'affluence du samedi après-midi rue Saint Agricol, pour aller au Conservatoire de musique
Elle ne supportait plus les limites, parfois douloureuses, qu'il lui infligeait maintenant, et que ce soit plus ou moins le sort commun, surtout pour ceux qui s'étaient bornés à le traiter, au long de toutes ces années qui passaient sans qu'ils veuillent ou puissent le voir, le savoir, comme un outil à priori fiable, dont il était inutile, superflu, un peu méprisable, de se soucier, la conscience qu'elle en avait, ne calmait pas sa navrance, parfois sa rage, cette révolte qui somnolait en elle, se réveillait abruptement devant un obstacle.
Mais elle ne pouvait réellement se repentir de ce manque de considération qu'elle avait eu pour lui - il lui avait toujours paru moyennement laid, fort peu doué, et elle ne pouvait l'aimer, croyait-elle, malgré les quelques joies (elle était très primairement injuste à ces moments là) qu'il lui avait procurées.
Et puis s'il était inapte à plaire, et, ce qui était peut-être tout aussi navrant - elle se croyait résignée depuis longtemps à toute prétention de ce coté - à une nage ou une course conquérante (il se contentait de glisser et en tirait un plaisir qui se répandait jusqu'à la baigner de douce joie, mais elle se refusait pour l'instant à toute bonne foi, et puis ce temps était révolu) ou à danser sur un fil, et à s'envoler dans les arbres, à faire sortir des pierres ce qu'elle voulait y croire tapi, il y avait eu cette chose qu'elle n'osait nommer esprit, pour y suppléer.
Seulement, en lisant sa malédiction, elle a su que c'était une présomptueuse, injuste, idiotie. Parce que s'il y avait des êtres qui étaient esprit, si cela était possible, ce n'était certes pas son cas. Et, malmené ou non (elle avait tout de même souvent conscience de ce qu'il lui transmettait), c'était lui qui gouvernait tout, et aucune imagination, aucune envolée naïve, aucune pensée peut-être, ne venait que par et de lui.
Était-ce idée joyeuse ou décourageante ?
Scholastique a soupiré, a fermé les yeux et s'est endormie, recroquevillée délicieusement sur la fraîcheur du coton.
Brigetoun, elle, a testé sa résistance à l'agoraphobie dans l'affluence du samedi après-midi rue Saint Agricol, pour aller au Conservatoire de musique
écouter le dernier concert de l'année : "le clavier romantique" - une jolie petite troupe d'élèves, qui sont même arrivés à lui faire supporter Chopin ( en appréciant, notamment, la sobriété du jeu de Sylvain Pelle dans un nocturne) - un programme varié avec trois pièces de Brahms, une de Glinka, Schuman et Rachmaninov, et donc trois Chopin - le bel aménagement des lieux, l'ambiance agréable, un plaisir
J'ai laissé les artistes, leur famille et le public se congratuler et se consacrer, discrètement, au buffet offert par une cave, et m'en suis allée à Monoprix, juste avant la fermeture, acheter de l'eau de cologne pour ma cuisine, admirant au passage la belle rangée d'hommes qui attendaient devant Etam, H et M et Monoprix.
7 commentaires:
Et j'ai regretté que nous n'ayons pas échangé quelques mots devant le buffet...
j'ai attendu un peu, et puis je me suis dit que tu avais trop à faire avec le rangement de ton matériel, et que tu serai entouré. Ma fichue et incorrigible timidité
Une rangée d'hommes qui, comme beaucoup, semblent ne pas aimer faire les courses ni y accompagner leurs dames. Bonne journée à toi.
Dans la soliture forcée par la maladie de mon petit hameau sans boutiques ni théâtre, je goûte sans amertume le plaisir de suivre tes pas... Bonne journée ma Belle !
Brahms, Schuman, Rachmaninov et Glinka, tu as, je le pense, passé un très bon moment...
Qu'est-ce que cette histoire de trouver une règle remplaçant l'alimentation de Paumée ?
Parfois, souvent ? ces relations de corps à corps avec son propre corps. N'évoque-t-on pas même le corps du délit ?
NB : la "vérification des mots" pour ce commentaire = accord (perdu)
Monop' devrait faire un rayon trucs d'homme.
;-)
Merci pour ce temps passé en France, grâce à toi !
:-)
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