J'ai commencé, je ne sais plus exactement quand, en juin ou en août je pense, de recenser sur « Babelio », sans ordre, un peu pour vérifier quels sont les livres que j'ai gardés (et ça aurait été bien si j'en avais profité pour ranger un tant soit peu), le contenu des rayonnages épars (http://www.babelio.com/mabibliotheque.php)- à vrai dire j'ai abandonné, pour y revenir ces temps ci, par moments, et j'ai découvert qu'il était possible de recevoir un livre, faisant partie d'une liste, à condition d'en parler. Oubliant que je n'étais pas trop capable de cela, décidant que cela ne m'engageait pas à émettre un avis docte et favorable, j'ai fait part de mon intérêt pour deux livres dont on parlait (que bien sûr trop de personnes avaient choisis pour que je sois retenue) et, ne sais pas trop pourquoi, peut être à cause de Depardon, pour le « testament d'un paysan en voie de disparition » de Paul Bedel, recueilli et mis en forme par Catherine Ecole-Boivin, aux Presses de la Renaissance.
Ignorant tout de Paul Bedel, qui semble, je l'ai découvert ensuite, avoir eu son moment de gloire avec un premier livre et un film, j'ai fait deux ou trois tours sur moi-même et j'ai plongé dans la lecture.
Avant de tenter de noter quelque trucs, en fin de lecture, j'ai eu la curiosité de regarder sur le net, et j'ai trouvé plusieurs liens le concernant, permettant de le présenter, Paul Bedel.
http://www.liberation.fr/portrait/010160409-hors-champs
http://www.lahague.com/modele_decouverte.php?RubriqueID=3252
http://www.dailymotion.com/video/x4kuvp_rencontre-paul-bedel-partie-4_dating entre autres
et, sur le site de l' éditeur
« Paul Bedel pensait que sa vie n’avait servi à rien, puisqu’il n’a pas de descendance. Depuis quatre ans il est invité à des conférences et a accueilli plus de 7 000 visiteurs chez lui. À 79 ans ce sage nous offre son testament avec humour et clairvoyance. »
Et c'est sans doute ce qui m'a surtout plu en lui, ce bonheur qu'il a à transmettre, lui qui, après deux déconvenues sentimentales, à cause d'un certain amour de sa terre, et de la mer toute proche, si proche qu'on la voit des champs, parce qu'il y avait ses soeurs célibataires aussi, était resté avec elles, gardant les habitudes de culture apprises, sans trop de matériel, comme autrefois, y trouvant une sagesse (« Le vrai silence, comme là avec toi, ça te porte à l'apaisement de solitude, la réflexion donc. T'as la brise légère, elle te souffle sur le corps, tu entends beaucoup de choses dans l'air »), qui se disait « j'allais vieillir seul, sans même apprendre à personne mon métier. » et voilà que :
« ma descendance ce sont les gens qui viennent me dire merci, c'est une grande satisfaction, pas une fierté.
Ta fierté tu l'emmènes avec toi dans le trou, la satisfaction tu 'emmènes avec toi partout dans la vie. »
Au début, une petite gène de ne pas savoir ce qui, dans ce que je lisais, était sa voix, ses mots (malgré ses carnets qu'il évoque à la fin) et au premier chapitre je sentais que cela passait par Catherine Ecole-Boivin, qui, bien que bienveillante et familière de la région, n'est pas exactement de ce monde, assez démuni, même si les mots de patois sont repris abondamment. Mais cela s'oublie vite (et à la fin on a droit à un certain nombre de phrases recopiées des carnets)
Il y a, comme je m'y attendais, un plaidoyer pour ses méthodes (dont je ne suis pas certaine qu'elles puissent être totalement reprise par des jeunes soucieux de payer leur terre et de sortir d'une médiocrité assumée) - refusant de se voir comme « écolo » mais l'étant parfaitement - sans doctrine, avec de belles phrases, la dureté du travail, mais un plaisir presque sensuel.
« Un grain nature sous la dent ça ramollit comme un bonbon ; un grain de l'INRA ça te casse une dent !»
« Si tu abîmes une poignée de terre, c'est comme une cicatrice, tu t'en sors mais ça prend des années pour réparer ».
« Le fumier, tu sais qu'il est bon tellement il sent bon sur tes mains, tu en mangerais mais personne ne viendra te le voler, c'est pratique ».
alors si : « J'suis resté à la traîne du progrès ça pesait lourd parfois » il y a la fierté d'être reconnu et de recevoir des classes et de transmettre.
« Je serais juste content qu'ici des jeunes continuent à cultiver les cailloux ».
Il y a aussi l'habitude de tout faire soi-même, y compris une barrateuse à partir d'un moteur récupéré, parce qu'en vieillissant on n'est plus capable de battre le beurre aussi longtemps et régulièrement qu'il le faudrait.
Et puis il y a, et j'y ai trouvé autant de plaisir que lui, qui le raconte pendant un premier tiers du livre, la mer qui est là à côté et vers laquelle il s'évade pour la pêche à la main, au casier, à la ligne, et ses endroits cachés qu'il tient de son oncle, et « manger la mer », les homards, avec leurs petites pattes et le « goût très prononcé du fond de l'eau,"les poissons, (et les femmes s'occupent des crevettes). Et puis c'est bien puisque « les vents bons pour la terre ne sont pas bons pour la mer » et le contraire.
Et la mer, ses jeux sur les rochers, la pêche la nuit sont si bien dits que j'en étais heureuse avec lui et que c'est pour ces pages que pour moi le livre mérite d'être lu.
6 commentaires:
Les passages que tu cites et toi qui en parles si bien me donnent vraiment envie de le lire. Merci et bon dimanche.
oui ça sent bon le terroir en t'accompagnant chez Bedel et le parfum des âmes franches, entravées d'une certaine solitude ,assez généreuses pour remercier de de qui leur est donné.
Me reste à lire... merci
comme vous le soulignez : le plus souvent les mondes de la mer et de la terre se tournent volontiers le dos
marins et paysans semblent (sur)vivre sur des planètes différentes
et les clivages ont été longtemps jusqu'à emprunter les chemins de choix politiques opposés
certes, P. Bedel est plus souvent les pieds sur le plancher des vaches que marchant sur les flots
mais néanmoins...
Au fond de tout homme vrai de la terre, vivant au plus près d'elle, sommeille un diseur. Un écrivain pour tout dire.
j'avoue avoir eu un peu de mal à terminer tout de même, mais par moments le plaisir de vivre perce
çà me fait penser au conflit actuel, agriculteurs et leurs engrais avec l'arrivée massive d'algues polluantes chez les marins.
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