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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

mardi, décembre 29, 2009

Chez Publie-net, une collection m'est chère pour les découvertes que j'y fait (dans ma profonde ignorance) d'écrivains, témoins, poètes grecs du 20ème siècle, pour lesquels me viennent au minimum de l'intérêt, le plus souvent un goût, une adhésion, l'illusion d'une proximité (en faisant fi de la différence entre ma non-vie et leurs engagements), la collection « Grèce » dirigée par Michel Volkvitch, dans laquelle il donne notamment des livres épuisés, traduits et édités par lui chez Maurice Nadeau, et, dans un suspens du temps, dans l'absence de toute volonté de trouver accord avec une quotidienneté à inventer ou assumer, me suis plongée dans la dernière mise en ligne, regroupant les deux derniers recueils d'Andréas Embirikos http://www.publie.net/tnc/spip.php?article295

« Luxure et luxuriance : on pourrait presque résumer ainsi l’œuvre d’Andrèas Embirìkos, l’un des poètes majeurs du XXe siècle grec. Il vécut entre 1901 et 1975, voyagea beaucoup hors de Grèce, connut André Breton et bien d’autres et introduisit dans son pays, outre le surréalisme, la psychanalyse qui devint son métier. » dit Volkovitch.

Le premier «Oktàna » regroupe des proses de longueurs variables.

Il y a le vide de la nature, les arbres, les odeurs, les saisons (et toujours, de cette fusion, il débouche, parfois de façon un peu insistante, sur les Idées, ou principes, ou l'homme simplement, en un beau panthéisme)

« Pluvieux paysages d’automne, lorsque s’en vont les fleurs et leurs joies, que tombent soudain les feuilles, que les cris du plus haut de l’été peu à peu s’éteignent, sur les rivages et les plages où la vague, déferlante et douce, rafraîchissait les corps de ses écumes irisées, avant que décline la saison des mers toujours calmes, avant que s’efface le mois culminant de l’été.

Routes bitumées qui mènent aux villes d’hiver, «

idées qui peuvent se couler, créer des récits, parallèles, en léger décallage avec la réalité, en beaux emballements

Des heures et des heures passèrent et nous cherchions encore dans l’angoisse, avant de gagner notre navire (le schooner que nous avions armé), avant d’entamer notre voyage vers l’un ou l’autre rivage, l’une ou l’autre île, que nous voulions tous dans le Pacifique (sans doute à cause de toutes ces guerres où nous avions tant souffert) et où nous désirions être accueillis, dans la magie de l’équinoxe perpétuel, par les filles du Pacifque, les enfants paradisiaques — ô Herman Melville ! — du Pacifique, les ravissantes Fayaway, espérant aussi rencontrer, non pas en chasseurs, non pas en ennemis comme Achab, mais au contraire en amis sincères et ardents, le Souffe des océans à la crête liquide, la blanche et spermatique montagne flottante (salut à toi, salut, ô Moby Dick !), la Baleine Blanche, espérant trouver la reine des plus profondes abysses et de toute surface lumineuse, la Baleine Blanche, la blanche Aphrodite née de l’écume (Salut, ô Jaillissante, salut, salut, ô Bouillonnante !), vision divine, Souffe Premier, fille de l’absolue innocence, de l’absolue liberté, de l’absolue volupté — léviathan, ô léviathan qui toi seul, jusqu’à ce jour, conserves une trace des débuts du monde, à l’aube de la préhistoire, une trace de sa force authentique, de l’union absolue à la nature, une trace de la grandeur et des rythmes géants de cette époque sans mensonges des brontosaures et des tyrannosaures.... «

Il y a, toujours, le souvenir des surréalistes de sa jeunesse, et de Kérouac, le retour de «lâchez tout, partez sur les routes », pour conquérir des paradis, qui pourraient être Oktàna, où l'homme sera libre (et bon, il y insiste, et parfois les mots ont un parfum évoquant un mysticisme fin 19ème qui résonne en accord avec l'érotisme, le panthéisme qui fait le fond du texte)

« Ouvrez les fenêtres, ouvrez les âmes — voyez Kerouac le Musagète qui passe, Dionysos en même temps qu’Apollon dans son pantalon étroit, souvent pas rasé, toujours beau, sans du tout craindre la déchéance qui l’a détourné, car c’est lui qui apporte, dans son âme et entre ses jambes, la semence d’une grandeur nouvelle.

Ouvrez les fenêtres, ouvrez les âmes — Kerouac passe couronné de lumière, buvant le nectar de la vie quotidienne où qu’il se trouve, buvant et offrant le nectar qui coule plus que le Niagara, quand le désir en nous l’emporte et l’homme béni prête serment sur le « Par ce signe tu vaincras de l’amour. »


Et voici que je n'ai plus le temps, ou la place, ou une miette de votre patience, pour « Ce jourd'hui », recueil de poèmes bellement, franchement panthéistes, à l'érotisme plus ou moins violent – n'en prendrais que des fragments, goûteux, à la saveur évasive.

« Quand les mots tombent sur le corps de la nuit

On dirait des vaisseaux qui labourent les mers

Les hommes à bord semant et les femmes parlant

Parmi les baisers qui claquent

Des lézards passent dans les frissons des crêtes

D’une mer qui s’étend jusqu’au sable

Avec ressacs et clapotis... »

« Nous plongeons au fond du sommeil

Comme les cloches des plongeurs

Dans les abysses des nombrils de la mer

Cherchant explorant trouvant

Des désirs en éveil tels des troupeaux compacts

Mêlant leurs cris aux fleurs

Dans la flore du fond des abysses »

.

« Toute vibration est une cigale

Toute cigale est une vibration

Qui se développe s’élève et culmine

Tandis que suent les corps et les troncs d’arbres

Et la résine déborde des godets »

« Une tiédeur accrue par le soleil

Dans les terres et les vagues

Dans les montagnes et les sporades

Où tout pulse et attend

Les orgasmes de l’été. »

7 commentaires:

micheline a dit…

Aux sources de l'ivresse.

MATHILDE PRIMAVERA a dit…

Euh Brigetoun, je ne sais pas s'il faut vraiment considérer que tu es une ignorante de ces auteurs que tu découvres, mais deux choses sont certaines, une tu es très ouverte, curieuse au point de t'y intéresser désormais à fond, et deuxièmement tu es délicieusement partageuse !
J'aime beaucoup toute cette verdure qui accompagne bien tous les extraits choisis.

jeandler a dit…

Une idée de luxe dans ces luxures et luxuriances...

Nicolas Corbières a dit…

j'aime ce type de luxe.....bien loin d'un certain bling bling

Gérard a dit…

Les orgasmes de l’été ? y'a vraiment plus de saison !

JEA a dit…

orgasmes de l'été ?
il n'y a plus d'hi(er)ver(t) ?

joye a dit…

Si tu as une non-vie, j'en veux une. Il me semble que tu vis plus richement que tous les autres que je connais ! Tu gardes plusieurs univers entre tes oreilles, et c'est merveilleux.