commentaires

désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

samedi, décembre 26, 2009

« Le bouleversement opéré dans les fortunes, par une suite nécessaire de la Révolution, les ayant mises dans de nouvelles mains, et l'esprit de presque tous ces riches d'un jour se tournant surtout vers les jouissances purement animales, on a cru leur rendre service en leur offrant un guide sûr dans la partie la plus solide de leurs affections les plus chères. Le coeur de la plupart des Parisiens opulents s'est tout-à-coup métamorphosé en gésier ; leurs sentiments ne sont plus que des sensations, et leurs désirs que des appétits ; c'est donc les servir convenablement que de leur donner, en quelques pages, les moyens de tirer, sous le rapport de la bonne chère, le meilleur parti possible de leurs penchants et de leurs écus.

S'il faut en croire plus d'un voyageur, les plaisirs qu'on doit à la cuisine ont toujours tenu un rang distingué parmi tous ceux des hommes rassemblés en société. En dépit des Stoïciens, l'on conviendra que ce sont les premiers que l'on éprouve, les derniers que l'on quitte, et ceux que l'on peut goûter le plus souvent. Pour beaucoup de gens, un estomac à toute épreuve est le premier principe de tous les hommes.... »

Il faut bien dire que, sous la plume de Grimod de La Reynière, la première phrase vaut surtout condamnation d'une certaine vulgarité, d'une trop évidente avidité de ces « nouveaux riches » auxquels il faut apprendre le style que doit posséder un bon amphitryon (en souvenance d'un temps un peu mythifié peut-être qu'il a connu chez son père, fermier général, puis à sa propre table, et en détestation forcenée de la Révolution dans l'absolu, et avec raison de l'enrichissement de certains). Condamnation et mépris

« Qu'on se figure un Riche chargé d'or, pressé du besoin de dépenser, et sous la tutelle d'un cuisinier ignorant ou fripon et l'on sentira combien ce petit Ouvrage était nécessaire... de malins parasites se moqueront encore de lui et de la chère qu'il leur aura fait faire, et qui, pour être dispendieuse, n'en sera pas moins, fort souvent, détestable. Car l'Argent seul ne suffit pas pour constituer un bon Amphitryon ; et l'art de tenir une bonne table est bien plus rare et plus difficile que ne le croit le vulgaire.

Si ce Riche, au contraire, possède à fond la topographie alimentaire de la France, ou même, à son défaut, seulement celle de Paris : s'il connoît le rapport des saisons avec les comestibles ; si, raisonnant son appétit, il sait le diriger d'après des principes invariables et sûrs ... »

déjà – ceci dit sa table n'avait rien de spartiate.

10 commentaires:

JEA a dit…

La Reynière ?
Ce qui fut insupportable, c'est la critique gastronomique du Monde signée sous ce nom (ce pseudonyme) prestigieux à partir de 1952.
En réalité par Robert Courtine. Un intello collabo antisémite. En conséquence, condamné à 10 ans de travaux forcés. Mais recyclé dans les recettes de haute cuisine et autres visites de restaurants. Et par "Le Monde" !!! Dont il n'est exclu par le comité de rédaction qu'en 1993...
Exemple de sa prose, son article dans "Je vous hais !", avril 1944, pp 123-125, et qui débute par ces lignes :
- "Une organisation juive... et maçonnique, devrait-on dire ! Car la "Ligue Internationale contre l'Antisémitisme" du juif F.°. Bernard Lacache offrait un magnifique exemple de l'activité de ce que Mgr JOUIN , un des premiers, nomma la judéo-maçonnerie : l'alliance des loges et du ghetto..."

Brigetoun a dit…

qu'est ce qui était insupportable, la critique gastronomique ou l'antisémitisme de son auteur ? Sur un autre niveau le cher Grimod, même s'il avait préféré rester avocat, et gratuit, avant la révolution, avait tout de même des réactions anti-révolutionnaires à la base de son mépris des nouveaux riches

JEA a dit…

@ brigetoun

l'insupportable c'est de récupérer un nom prestigieux pour dissimuler le sien, ce dernier étant flétri notamment par des délations qui sous l'occupation, ne restaient pas lettres mortes
dissimulation efficace puisque ce n'est qu'en 1993 que les journalistes du Monde l'ont décelée

joye a dit…

De nos jours, tout est possible, y compris des fruits de mer au milieu du continent. Remarque, on n'a pas la variété, ni le savoir, et figure-toi que les huîtres se mangent le plus souvent dans un potage à la base de lait chaud.

Sans ton explication, j'y aurais moins vu du mépris que de convoîtise. J'ai l'impression que l'écrivain changerait volontiers de place avec les riches qu'il décrit.

(tu vois ce que c'est qu'un manque de culture !)

;-)

Merci brige !

Brigetoun a dit…

il défendait tout de même un certain art de vivre, et s'est donné comme tâche, accessoirement lucrative, d'apprendre aux gens à se servir de leur argent

Elisabeth.b a dit…

Comme c'est aimable à lui...
Le mépris du vulgaire, quand il n'est pas exigence pour tous, frôle le mépris de caste. Ici la race des seigneurs... de la table ?

Il faut des générations pour acquérir un certain art de vivre. Si les qualités personnelles y ont leur place, c'est essentiellement un apprentissage. Chance n'est pas supériorité.
Se vanterait-on d'avoir appris à lire ? On peut en tirer bonheur, fierté quand ce fut difficile. Mais en éprouver mépris pour ceux à qui cette connaissance est refusée est détestable.

Sous le dédain envers les « nouveaux » riches (il faut bien commencer un jour), le mépris du peuple. La vulgarité tient moins dans les mots que dans l'attitude. Ici l'absurde vantardise de « celui qui sait». Il n'est que celui à qui on a appris.

jeandler a dit…

Art de vivre? Art de la bouche, plutôt.
Notre gastronome (le vrai La Reynière, a sû surfer sur les vagues de la Révolution et sauver sa fortune. Il est mort à 80 ans, le soir du réveillon du 25 décembre 1837!
Quant au chroniqueur du Monde, n'avait-il pas atteint l'âge de la retraite quand il quitta le journal où il a laissé des chroniques mémorables!

Gérard a dit…

parfait tout çà , je vais de ce pas déjeuner ..avec modération comme hier et demain.

Brigetoun a dit…

mais moi en lisant Dumas et Grimot avec la compagnie de truffes et palets de chocolat de bonne facture (enfin trouvé ici un chocolatier qui sans valoir Bernachon, Fouquet ou même Dalloyau (celui ci comme présentation) me plaît bien ou trop) j'ai pris 500 grammes et une bonne migraine,

MATHILDE PRIMAVERA a dit…

Comme tous les cancres je ne comprends pas tout, alors, je regarde les images, et toute ces produits en abondance m'ont mis en appétit ! Et ça tombe bien car c'est l'heure !
Je te souhaite aussi un bon appétit Brigetoun !