Adoncque, avant que les vases me noient un peu, m'obligent à nager durant presqu'une journée, et ne prennent toute la place, et plus, sur «paumée», m'en suis allée, jeudi soir, sans grand enthousiasme (à cause du programme) mais avec stimulante curiosité (grâce à une vidéo montrant Emmanuel Rossfelder expliquer le toucher sur sa guitare et d'une autre sur laquelle il jouait du Vivaldi) vers l'opéra, et hisser mes jambes de mauvaises humeurs jusque dans ses hauteurs, juste avant la proximité du plafond.
Et l'orchestre et moi nous étions en état de grâce ce qui m'a fait apprécier l'»abracion del torero» de Turina (musique agréable, longues phrases dans le haut du chant des violons, quelques ponctuations précédant des emballements, mais me semble-t-il maintenant hautement oubliable) et comprendre enfin que l'on puisse voir en Nino Rota («canzona pour orchestre à cordes») plus qu'un doué fournisseur pour films.
Le jeu de Rossfelder (les notes qui se prolongent, non pas égrenées mais liées et se nourrissant) m'a fait supporter et même aimer l'ennuyeux, car trop souvent entendu, plus ou moins bien joué, concerto de Aranjuez – et comme l'ensemble du public j'ai été sensible à son attitude sympathique, assurée sans cabotinage (le sourire et l'aisance contrebalançant les chaussures démesurément pointues et le physique de roi de la plage).
Nous avons eu droit en premier bis à une espagnolade de Turina (mon sale goût) et puis à une brillantissime et euphorisante interprétation des variations sur le carnaval de Venise de Paganini.
Mais, ennui du trop long entracte qui me rappelait ma sensation de faiblesse extrême, agacement d'un voisinage ou façon de diriger, j'ai trouvé l'interprétation du la 5ème symphonie de Schubert, l'oeuvre que j'attendais, un rien, un gros rien, plate, et m'en suis revenue un peu déçue tourner en rond, dévorer des toasts en surfant sur le net au lieu de dîner, et vérifier la mise en route de ma part des vases avant de retrouver patates et hareng.
Adoncque vendredi suis restée cloîtrée avec gavage, lecture des vases et de quelques autres choses, serpillère, collecte des débris du mur qui se décompose allègrement à la moindre pluie, au moindre coup de vent, recension dont je suis curieusement sortie aussi moulue que je le crois on doit l'être après une longue course (chose qui ne m'est jamais, qui ne m'arrivera jamais) et découverte éberluée et pleine de gratitude de la gentillesse de l'accueil fait au roman feuilleton.
Adoncque samedi, m'en suis allée, gelée parce que la tiédeur de l'antre et le soleil sur le haut du mur m'avait caché le brusque refroidissement de l'air, vers Carrefour pour en ramener filets de lieu et de cabillaud, pommes, bonbons et sauce tomate, mais, parce que dans un de mes pré-réveils j'avais lu le billet de François Bon sur «Plaie» d'Antoine Emaz http://www.tierslivre.net/spip/spip.php?article2068 avec le sentiment que je devais, de façon évidente, me le procurer, suis entrée à la Fnac sur mon chemin.
Parce que
«on parle
on dit des choses
surtout des choses
à côté
comme si la plaie
pas
mais ça dure peu»
parce que
«corps mis à mal
au bout d’un long tunnel
avançant
dans sa besogne de corps
continuant»
et, puisque compte en banque est moins malade que ne le pensais avec mon estimation à la louche, l'ai commandé et, après longue flânerie, suis sortie, avec «Choir» de Chevillard parce que j'en ai assez d'attendre de le trouver d'occasion, et puis, pour combler des trous de lecture
«la rose» de Walser
«Nous l'appelons Wladimir parce que c'est un nom rare et qu'en effet il était unique en son genre. Ceux qui le trouvaient drôle guettaient un regard, un mot de lui, et il en était avare». et avec ce présent et ce passé j'y suis déjà bien.
«le naufragé» de Thomas Bernhard, souvenir, là, d'une très ancienne lecture
«Glen Gould aussi, notre ami et le plus important pianiste virtuose du siècle, n'a atteint que cinquante et un ans, pensai-je en entrant dans l'auberge.»
«Une heure avant la fin du monde» de Joseph Roth
«Je nie la réalité de l'évènement important qui a si gravement marqué l'Allemagne cette semaine : je nie la réalité du procès de Hitler» - et je me précipite sur une note en bas de page, pour lire que ceci date du putsch de Munich
et puis, parce que c'est une envie qui trainait dans ma conscience, envie réveillée en le voyant sur une table, «Olimpia» de Céline Minard (gourmandise de la langue)
«Je lui brûlerai les doigts de pied, je lui donnerai autant de coups au foie qu'il a de poils de barbe, je lui mettrai les poucettes, la barre de fer rouge au cul, le ferai bouffer des rats, les sourcils arrachés, les anathèmes sur sa tête, la peste, la peste soit de sa race de barbarie...» etc
Et pardon, trop longue suis, mais c'était cela ou le repassage.
16 commentaires:
Bon choix, alors!
ni gourmandise de langue, ni repassage, je remue ma soupe d'hier!il n'y aura pas de dessert.
Nino Rota ? Environ 170 films mis en musique... Mais aussi 10 opéras...
De très loin, je préfère votre journal au repassage. Et toujours un coups de coeur pour les photos !
magnifique le "parce que "
Mais où est donc cette gargouille d'un autre temps dont la rondeur de bouche semble faite pour le tuyau de zinc ?
je l'aime beaucoup, le coin de l'hôtel dont j'ai oublié le nom, qui fait suite à Sait Agricol, rue de la petite Fustrerie - superbes finitions
L'hôtel de Brantes, l'annexe de la mairie ?
oui mais je ne savais pas que c'était une annexe de la mairie
Un bon choix, certes, pour notre plus grand plaisir! Mais, le sais-tu? Je ne suis pas très doué pour le repassage.
Je propose que le grand théâtre d'Avignon aménage leur plus grand salon plus d'autres pièces en appartement avec terrasse pour toi, afin que tu puisses t'économiser en aller retour de ton actuel chez toi jusqu'aux divers spectacles que tu vas voir pour pouvoir mieux apprécier ce qui s'y passe sans ressentir la moindre fatigue. Tant qu'on y est, ils pourraient mettre à ta disposition une repasseuse, une femme de ménage, une spécialiste en plats à base de pâtes et de patates qui ferait également les courses et une immense bibliothèque bien garnie !!! Ainsi, tu n'aurais qu'à sortir que lorsque tu en as envie pour prendre le soleil et photographier Avignon !!! On peut rêver, ça ne fait pas de mal, en tout cas je m'autorise à le faire pour toi !!!
oui, mais c'est un peu près, la distance est négligeable - on pourrait pas choisir, je ne sais pas, le théâtre des Halles - en plus le jardin est pas mal
Le palais des papes, c'est mieux, non ?
pour les spectacles c'est un peu court et pas beaucoup plus près du théâtre que mon antre, mais pourrait aller pour être au centre théâtre, utopia, ajmi et chêne noir
T'as bien fait, tes choix ne m'ont rien froissée ! Merci !!
Je ne connaissais Nino Rota que pour ses musiques de films, comme beaucoup je pense.
Je passe un peu tard, mais je tenais à vous remercier du travail de recensement minutieux et tendre que vous menez autour des vases communicants et qui lie encore d'avantage ces échanges. Ce n'est pas donné à tout le monde de réunir ansi la couvée et d'avoir une attention pour chacun. Cela dénote une nature généreuse.
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