commentaires

désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

mardi, mars 23, 2010

Dans les trous de la journée de dimanche, quand entre des moments désertiques, les votants ne se présentaient pas en paquets, s'installaient des conversations entre salon et comptoir de bistrot, et j'ai déploré, en choeur à deux voix, soutenu sans grand intérêt par mes compagnons de bureau (étrangers au quartier ou résidants du bout de la rue), le nouvel aspect des terrasses de la place Crillon, l'abandon de l'unité créée par les fauteuils de toile de « metteur en scène », ne différant que par des degrés plus ou moins soutenus d'ocre, l'arrivée au centre de chaises d'osier sans grand intérêt, et surtout la laideur massive, solide, semblant inaltérable des blocs noirs du restaurant le plus proche de la belle façade de l'ancienne comédie.

et nous nous sommes lamentés sans réserve, avec le président, en apprenant le départ futur de la boutique d'Hervé Baume. La rue de la petite Fustrerie se désertifie inexorablement, et je vais perdre le plaisir du merveilleux fouillis des quatre vitrines, devant lesquelles je pose presque toujours mes paquets, reprenant force, soulageant mes mains sciées par les sacs et me perdant dans une tentative de découverte des brimborions onéreux, trésors, beautés de cette caverne d'Ali Baba.

Journée digestive, élan de curiosités au réveil, d'envie de découvertes, de tentatives d'analyses, d'idées d'histoires, et puis, après une élucubration sans queue ni tête et bien trop longue pour le convoi des glossolales http://leconvoidesglossolales.blogspot.com/ hébétude que franchissait difficilement le sens de ce que je lisais ou écoutais et inertie cotonneuse flottant sur les tâches matérielles. Je me retranche dans la reprise des deux précédents paragraphes accrochés au convoi.

Tant et tant de jours que je suis enfermée dans ces pièces. Tellement que je ne sais plus, ou que je ne désire plus savoir, si cette réclusion, ces lents déplacements derrière les persiennes entrouvertes – et je me contente d'une minuscule sensation de plaisir lorsque je traverse le rayon de lumière qu'elles laissent, parfois, filtrer – cette absence d'autre bruit que ma voix – mais je ne sais jamais vraiment si je l'entends réellement, ou si je sens les mots en moi – et le sifflement de mes oreilles, me sont imposés ou résultent d'une décision que j'aurais prise. Peut-être plutôt d'une nécessité, d'une maladie ancienne et d'une accoutumance, d'un renoncement, d'un oubli d'y mettre fin avec la guérison, ce qui justifierait cette faiblesse extrême dans laquelle je m'enfonce, y trouvant une très douce délectation. Il me semble, pourtant, que pensant cela, je me découvre un reste d'intérêt pour ma situation, et peu à peu l'ébauche de l'envie de la peser pour, peut-être – c'est encore fragile et vague – y mettre fin. Et, d'abord, je quitte le coin où je me tenais depuis je ne sais plus combien de temps, et je circule, je m'enfonce dans cet espace, passant de pièce en pièce, jusqu'à une salle où je n'étais jamais, je crois, venue, pleine de malles, de bagages, de portants, et puis, dans le fond, juste sous un lanterneau, de gigantesques fleurs en papier froissé. Assise sur les dalles, à côté d'elles, j'entreprends de les dépoussiérer, faisant apparaître leurs couleurs pâlies et artificielles. Alors je les prends, je me lève, et je me dirige vers l'endroit où s'ouvre, je m'en souviens maintenant, la porte sur l'extérieur. Je sors avec le désir de cueillir leurs soeurs véritables.

Jean dessinait des avions sur la marge de ses livres d'histoire ou de lecture, et puis était puni - alors Jean rêvait. Jean sortait dans le jardin, dans la chaleur de la fin des après-midi, les odeurs de lentisques et de poussière, pour regarder, tête levée, tentant de saisir au passage l'image des avions qui filaient au dessus de lui, viraient, atterrissaient derrière les pins, et - il suivait le bruit des moteurs - décollaient face aux collines, revenaient, lors des exercices d'appontage.. et sa mère l'appelait pour des sottises comme des devoirs, un rangement, un bain. Jean essayait de fabriquer des avions avec des baguettes et des chutes de tissu, volées dans la réserve de sa mère. Jean peignait les minuscules maquettes que son oncle lui offrait, et collait, yeux écarquillés et reniflant, des cocardes sur leurs ailes. Jean lisait Clostermann, Saint Exupéry et la vie de Blériot ou celle de Jacqueline Auriol, et puis il fermait le livre et il regardait le mur devant lui. Jean a grandi. Jean a vieilli. Jean est devenu trappiste.

8 commentaires:

JEA a dit…

Dernière photo : étrange collision des images que cette Vespa au repos encastrée dans un banc ciré d'écolier...

DUSZKA a dit…

L laideur exhibée, le silence volontaire dans un enfermement tout aussi volontaire... les rêveurs seraient-ils désenchantés ? Bises. Bonne journée.

Lautreje a dit…

Déjà les photos j'adore ! la mise en scène, les reflets, la lumière... le texte je le savoure tout à l'heure !

Michel Benoit a dit…

L'osier des sièges est de plastique.
Le petit commerce passe à la trappe
(je ne parle pas de Baume).
Les habitudes de consommation ne changent pas assez vite...

Gérard Méry a dit…

Comme toi j'aime les reflets de vitrines, on y trouve souvent du mystère

Brigetoun a dit…

bon, je devrais en rester aux photos

arlette a dit…

L'image est toujours la première accessible!!!! ..................
Dit-on
et bien souvent je le constate dans une recherche de précision

joye a dit…

Jean faisait donc de la bonne bière !

:-)