Bien plus de 807 marcheurs

Le soleil était avec nous.

Je pense que gouvernement et grands médias diront que la mobilisation n'était pas suffisante, mais à l'échelle d'Avignon elle m'a semblé plutôt belle, nettement plus importante que lors du 1er mai, et la place du palais était pleine, alors que tous n'ont pas été jusqu'au bout.

Selon ma mauvaise habitude j'ai fait une incursion dans Carrefour en passant pour acheter du miel (j'avais terminé le délicieux pot d'un artisan cévenol au petit déjeuner) mais n'avait pas pensé à acheter un journal, et j'ai ouvert en déjeunant «les 807» qu'un facteur non gréviste avait déposé pour moi.

Et ma foi, cette suite de 807 aphorismes écrits par une centaine de contributeurs, sur une idée de Franck Garot, et publiés entre janvier et novembre 2009 sur un blog géré par lui http://les807.blogspot.com peut se lire agréablement en longue plongée, dans sa variété, et avec toutes les pépites qu'il contient parmi des phrases découlant plus primairement du modèle original

«J'ai compté 807 brins d'herbe, puis je me suis arrêté. La pelouse était vaste encore» Eric Chevillard,

et, en miroir, de Franck Garot : «J'ai versé 807 larmes, puis je me suis arrêté. Ma peine était grande encore.»

Le nombre de contributions varie beaucoup selon les auteurs, certains se répondent, ou sont regroupés malicieusement par Franck Garot.

J'en prends, un peu au hasard, avec injustice, certains de ceux que j'ai cochés en pensant à les utiliser pour ponctuer les traces de notre défilé, (parmi les « pas trop longs », suis paresseuse) dans les 130 premières pages, comme

« Exaspéré par cette sotte recommandation, il vitupéra après le passage de 807 moutons, tira son édredon et s'endormit » Jean Prod'hom

« On ne dira jamais l'obscénité du 7 et de son angle aigu prêt à se retourner pour aller se planter dans les rondeurs adjacentes du 0 et du 8 » Emmanuelle Urien

« J'ai eu 807 amants, puis je me suis arrêtée, j'avais dépassé l'âge limite. » Madame de K

« J'ai laissé tomber 807 gouttes d'eau sur le sable. Je n'ai pas trouvé celle qui faisait déborder les vases » Valérie Allam

« J'ai remué 807 aiguilles. Je n'ai pas trouvé une seule botte de foin. » Valérie Allam de nouveau

« J' ai vendu 807 exemplaires de mon livre puis je me suis arrêté. J'aurais voulu que d'autres que moi l'achètent également. » Nicolas Ancion

« Je me suis suicidé 807 fois, mais l'on m'a promu immortel. Lors je réessaierai dans 807 printemps. » Douglas Majnun

« Jamais huit sans sept dit le proverbe » Antoine Brea

« J'ai compté 807 moutons, puis je me suis arrêté : une chèvre me regardait avec une candeur désarmante. » Manu Causse

« 807 fois Mallarmé a tenté d'abolir le hasard en lançant les dés ; et puis Magritte est venu, qui les a pipés » Clopine Trouillefou

« Cela faisait 807 fois qu'il remettait sa première fois à la fois prochaine » Manu Causse (les amateurs de forme courte sont privilégiés)

« C'est rien, trois fois rien un zéro... et pourtant que serait le 807 sans son zéro ? » Lavande

« 8.0.7 : face à face, une femme aux rondeurs démodées, un homme sec comme une hache, séparés par une mare de larmes et de reproches » Yvonne le Meur-Rollet

« 807 repense avec nostalgie au temps heureux, juste avant son anniversaire, où les autres l'appelaient 806. » Dexter

« Pour être à l'heure à mon rendez-vous, j'ai fait 807 fois le tour du pâté de maisons, et puis je me suis arrêté : il était trop tard encore. » Piero de Belleville

Et je me demande bien comment j'en suis arrivée à ce choix.

Ma petite personne n'avait participé qu'une fois, et j'ai feuilleté jusqu'à retrouver mon plat bidule, le 671ème :

« Oui sans cette entorse j'aurais grimpé les 807 marches vers ton palais. »

juste après (mais nous l'ignorions) : « J'ai compté 807 marches, puis je me suis arrêté. La tour était haute encore. » Juliette Zara

comme je n'ai participé qu'une fois (au début, et je pense que cela en restera là) à la nouvelle saison, en cours, consacrée aux triptyques http://dcccvii.blogspot.com où il y a de très, très jolies choses

#21 – Rêve de plumes

Nez pointant hors de la douce chaleur de mes trois vieilles couvertures rêches d'innombrables lavages, ai eu désir, vague et brusque, d'un édredon de linon blanc, enflé de 850, 900 ou 807, pourquoi pas, plumes de colibris.

En filtrant le jour entre mes paupières, j'ai tenté d'évaluer quel serait son volume.

En me rendormant, j'ai décidé de rêver, plutôt, d'une couverture de vigogne.

Allez en paix.