Avignon - partielle grève brigitienne– der prozess
Décidée à en faire le moins possible, me suis limitée pour les courses strictement indispensables à mon quartier.
Rue Joseph Vernet, les vitrines, peu à peu, deviennent moins immédiatement tentantes.
au moment où j'hésitais entre le bureau de poste (j'avais oublié qu'un paquet m'attend) ou des textes de Ponge dans le jardin de Mons, j'ai reçu un appel d'une gentille internaute proposant une rencontre.
Tremblante, suant de trac m'en suis allée vers la place de l'horloge, et ce fut très agréable (pour moi s'entend) – en ai profité, en plus, pour leur confier le billet pour Védène afin qu'ils en disposent – et puis suis rentrée travailler a gagner encore quelques centaines de grammes, me suis lavé les cheveux – me suis endormie très, très longtemps et en début de soirée fait une partie du repassage jusqu'à ce que mon coeur, ma peau etc... disent zut (honneur aux blanchisseuses)
et puis suis partie, sous un ciel charmant, vers la clim de l'opéra (mais je l'ai vaincue avec Musil) pour l'une des trois représentations de «Der Prozess», l'un de ces spectacles que le festival achète et reprend et qui donc passent rapidement.
Attente qui se voulait curieuse, pas totalement conquise d'avance, avec tout de même le préjugé venu de sa carte de visite : production Kammerspiele de Munich, dramaturgie de Matthias Günther et Andreas Kriegenburg (curiosité surtout, puisque n'avais rien vu monté par eux, curiosité de savoir si j'adhérais aux jugements laudatifs qui semblaient faire l'objet des articles survolés, juste survolés pour garder mon innocence, mais avec oeil traînant tout de même, et quand ils étaient traduits par Google attention requise par une perplexité amusée)
survol surtout de la présentation sur le site du festival, d'où viennent les deux photos ci-dessous, et dont j'avais retenu surtout ceci :
Le point de départ de cette mise en scène, selon le programme est ce récit de Max Brod «Ainsi lorsqu'il fit entendre à ses amis - dont j'étais - le premier chapitre du Procès, tous furent saisis d'un rire irrésistible, et lui-même riait tellement que par moment, il ne pouvait continuer sa lecture. » et du souvenir du goût de Kafka pour le cinéma muet naissant.
Parti pris : huit personnages représentant des facettes de la personnalité de K affrontés à la situation de cet homme qui se débat contre une accusation et une paradoxale liberté apparente.
Et même si je répugne toujours un peu à me sentir «suiveuse», c'était à mes yeux une réussite assez phénoménale.
Quand le noir se fait sur la salle, la scène est fermée par un rideau métallique (ou qui en a l'aspect) - un petit homme vêtu en noir enjambe la rambarde d'une loge, un paquet sous le bras, vient devant le rideau, pose son paquet, et nous le confie, mais pour plus de sécurité prévoie que chacun espionne son voisin, de façon à ce qu'on sache, le cas échéant, qui a pris le paquet – musique bruitiste de plus en plus angoissante – noir
Et la lumière revient sur le décor, ce gigantesque oeil dont la pupille serait occupée par une tournette très oblique portant un lit, quelques chaises et des bureaux chargés de machines et papiers, et l'inclinaison plus ou moins grande de ce panneau, la vitesse de sa rotation, met les acteurs qu'ils soient K ou provisoirement un interrogateur, dans des situations inconfortables, les obligeant à des contorsions grotesques, admirables, en pleine incertitude.
Il y a donc huit K hommes ou femmes (reconnaissables alors à leurs seules voix) tous vêtus de noir, avec tous une petite moustache, qui ajoutent un chapeau quand ils sont interrogateurs, (t les spectateurs ont parfois un doute sur leur identité) ou un accessoire pour les autres rôles. Les femmes portent robes mais gardent leur moustache, que la féminité de leur jeu fait presque oublier.
Tout s'enchaîne et tout est insécure.
Et tout est drôle et assez terrible. Comique des superpositions de voix, à l'unisson ou se succédant et alors les différences de timbres créent un effet de comptine. Il m'a semblé d'ailleurs que dans le découpage, dans les mouvements d'ensemble ou divergents du nombre toujours fluctuant de K, dans les inclinaisons et la vitesse du plateau central, tout était musical.
Après l'entracte, le plateau central est vidé, ne restent plus que sept K sur des chaises, qui seront évacuées rapidement et de courts mats qui leur servent à se retenir lorsque la pente est trop forte. L'un d'eux glisse dans l'entonnoir et au premier plan se déroule l'échange avec le peintre du tribunal qui expose le déroulement d'un procès tel que le veut la loi, tel que le fait la réalité. Et les deux procédures, dont la procédure dilatoire qui veut que le procès tourne sans arrêt grâce aux perquisitions etc...
Les K sont dans des positions de plus en plus impossibles, sont éjectés, remontent sur la plateau redevenu horizontal, pendant que le portier, au premier plan, leur refuse l'accès à la loi, lui qui est lié à son poste, alors que K est libre et la porte ouverte, ce qui ne l'empêchera pas d'être condamnée.
Admirable brièveté de la mort brutale, surprenante, qui laisse perdurer la honte.
Applaudissements et sortie d'un public ravi et baillant (la clim ne suffisait qu'imparfaitement à lutter contre l'effet émollient de la chaleur)
10 commentaires:
J'aurais aimé voir, la mise en scène a de quoi surprendre !
Oui, l'envie qu'on a de l'avoir vue ! (si ça donne ça les grèves partielles, il faut en faire tous les jours, quel compte-rendu)
Toujours un grand plaisir de revenir ici !
Désolé, chère Brigitte, mais j'ai disjoncté par cette chaleur!
J'en admire d'autant plus ta persévérance à suivre ces jeunes pas qui rafraîchissent...
Une bonne soirée, si j'ai bien suivi la relation que tu nous offres.
Avec Jeandler on est deux à avoir disjoncté pour les mêmes raisons !!!
Bon, a priori, tu t'es posée un peu ces derniers temps, ça me rassure !!!
Sinon, j'aurais aimé voir la photo des fumeuses de dos en plus grand !!!
Je la trouve bien cette photo, mais j'en reste néanmoins frustrée !!!
Il y aura un jour une grande série :
"Les photos du balcon de l'Opéra" !
j'aurais réellement aimé voir ce spectacle.... merci du compte-rendu !
J'y étais hier au soir aussi. Epoustouflant spectacle que ce procès! Brillant, original, très impressionnant.
Et avant-hier un très intéressant "secret garden " aussi avec l'immense talent de Stanislas Nordey.
Ca nous a consolés de l'imposture de Papperlapapp qui se foutait à la fois des spectateurs et du théâtre.
m'inscrit en faux pour Papperlapapp - désolée - et fais pztie des gens furieux contre cette cabale un peu trop programmée
Nous aussi à Tours nous avons eu notre petit festival ce week-end..
http://www.rayonsfrais.com/#/programmation
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