Suis allée aux Halles avec l'espoir de trouver nourritures ordinaires, mais les étals étaient déjà en fête.
Il y avait petite foule mais point trop d'acheteurs. J'ai trouvé tout de même des pommes, des poires, un dos de cabillaud (mais pas de filets de lieu), des rougets friture (mais pas de petits sars ou dorades ou merlans, et les loups et rougets étaient trop grands pour mon appétit), une mini-aile de raie qui devait m'attendre, de la piste (là c'est nourriture recherchée mais il n'y avait pas de calamars), des patates pauvrettes (bintjes), ma provision de morue, et deux petits chèvres un pelardon bien sec et un frais.
Et puis me suis enfermée sur une humeur maussade qui m'étais venue, comme cela, et que j'ai laissée en paix, jusqu'à ce que paraisse, pendant la chute du jour, sur Publie.net « Litanie » de Daniel Bourrion http://www.publie.net/fr/ebook/9782814504004/litanie qui m'a re-donné envie de lecture et qui devrait être aujourd'hui dans ma bibliothèque pour occuper un peu des dernières heures de l'année.
En attendant j'ai repris « Divagations » de Mallarmé, http://www.publie.net/fr/ebook/9782814501300/divagations, recueil dans lequel j'avance par petites étapes, et j'ai relu, pour son adéquation à la saison et à cette maussaderie légère, dans les anecdotes et poèmes du début, «la pipe»
«Mon tabac sentait une chambre sombre aux meubles de cuir saupoudrés par la poussière du charbon sur lesquels se roulait le maigre chat noir ; les grands feux ! et la bonne aux bras rouges versant les charbons, et le bruit de ces charbons tombant du seau de tôle dans la corbeille de fer, le matin –alors que le facteur frappait le double coup solennel, qui me faisait vivre !», qui fait allusion à Londres, qui, me semble-t-il, irait assez bien aux appartements, en leurs anciens aménagements, pas sans charme, (je pensais à celui de ma grand-mère, pas très éloigné, avec les vitraux de la salle à manger, la tapisserie de la porte) du quartier de la rue de Rome.
avant de reprendre, après la crise du vers, «quant au livre», et ceci, qui tranchait par sa clarté (oui, me faut un petit tas de lignes pour entrer dans les raffinements de sa langue, en venant de mon monde, et n'étais pas trop en état), son côté plus ouvertement polémique
«en tirez-vous un rétrospectif rire, égal au mien ; il s’agissait de désastre dans la librairie, on remémora le terme de «krach» ? Les volumes jonchaient le sol, que ne disait-on, invendus ; à cause du public se déshabituant de lire probablement pour contempler à même, sans intermédiaire, les couchers du soleil familiers à la saison et beaux. Triomphe, désespoir, comme à ces ras de ciel, de pair, chez le haut commerce de Lettres ; tant que je soupçonne une réclame jointe à l’effarement, en raison de ceci et je ne saurais pourquoi sinon, que le roman, produit agréé courant, se réclama de l’intérêt comme atteint par la calamité.
Personne ne fit d’allusion aux vers.
Rien omis en cette farce (importance, consultations et gestes) de ce qui signifiait qu’on allait donc être, à la faveur de l’idéal, assimilé aux banquiers déçus, avoir une situation, sujette aux baisses et aux revirements, sur la place : y prendre un pied, presque en le levant.»
Et puis j'ai sorti une robe dont j'oublie toujours l'existence et qui me mérite pas ce dédain, un veston de velours, des richelieus et mon plus récent manteau, pour partir le soir à l'Opéra, voir «la vie parisienne», décidée à l'apprécier, à cause de l'humeur susdite, parce qu'à moins de se donner du mal on ne peut en faire un vraiment mauvais spectacle, parce que les finances de notre opéra (l'orchestre est de nouveau très menacé) risquent de ne plus nous permettre cela.
et, en somme, ce fut un assez agréable moment, (même si, un rien déçue mais pas tout à fait, j'ai hésité à partir pendant l'entracte)
un décor astucieux avec une tournette, et des panneaux mouvants, mais qui n'en abusait pas. De jolis costumes, en noir et blanc avec quelques touches de rouge (pour certains un souvenir du My Fair Lady de Cukor et Beaton – la scène d'Ascott) des chanteurs qui en général, mais pas tous - et Metella, jolie, avec une jolie voix, était d'une bêtise parfaite dans sa façon de chanter – jouaient avec un rien d'esprit leur chant, et, à part la première scène où le coeur s'agitait en désordre et noyait les airs, pendant tout le reste du spectacle, et surtout les deux derniers actes, une très jolie façon de faire bouger, de mener les acteurs et le choeur, jusqu'à palier parfois au manque de rythme de certains des interprètes.
Toute la fin était très bonne, (avec un cancan en clôture, et une très bonne danseuse qui consentait à être légèrement canaille) ce qui m'a permis de partir sur une bonne impression.
16 commentaires:
Superbe soirée...moi, c'était jean et sweat pour un docu sur Marcel Duchamp suivi par un sur l'art de la burlesque et des stripteaseuses amatrices. Les deux n'étaient pas si pires (comme on dit au nord de chez moi)...
:-)
le second il n'était pas français par hasard ?
Le passage par les Halles est un divin enchantement. Toutes ces victuailles et la description que vous nous en proposez sont réjouissantes. Et combien du bonheur, les mots et l'art viennent combler ces dernières heures de l'année. Il me semble que nous sommes gâtés...
Les étals sont en fête et deviennent presque écœurants de tant de composition. J'aspire aux plats et aux saveurs simples. Mais j'aurai bien aimé le cancan en clôture !
Tout me plait, mais je ne savais pas pour le pelardon que c'en était un (en ai mangé sans le nommer)
et je file attraper Litanie.
Le cancan ne laisse pas indifférent.
Bonne année 2011 !
"Tout écrit, extérieurement à son trésor, doit, par égard envers ceux dont il emprunte, après tout, pour un objet autre, le langage, présenter, avec les mots, un sens même indifférent : on gagne de détourner l'oisif, charmé que rien ne l'y concerne, à première vue."
Mallarmé, "Divagations", Le mystère dans les lettres, nrf, Poésie Gallimard (2003, page 281).
les plaisirs que l'on peut s'octroyer avant même la nouvelle année sont bienvenus mais bien sûr si ça continue c'est extrêmement bon pour le moral
Ouh là, me sens (interdit) pas trop littéraire...
Faisons bonnes chères pour le réveillon, on aura besoin de forces pour l'an que vèn.
Gros poutoun e bon revihoun !
merci gros poutoun a toi aussi
Voici le site du 2e docu :
http://www.winkthemovie.com/
ce n'est pas le film auquel j'avais pensé
Belle façon de terminer l'année. Suis allée aux Halles aussi ce matin, courses rapides, pas autant de monde que je l'aurais pensé pour un 31 décembre. Bonne année à toi.
fantastique!
et quelle photos magnifques aussi
bonne année, chère "brigetoun"
de la truite à l'opéra il n'y a qu'un pas
le pélardon frais, je le préfère avec un peu de confiture, gelée de franboise et de myrtilles. tente l'expéreince tu m'en diras des nouvelles. Pour un réveillon ça vaux un chocolat ou un marron glacé!
A l'opéra pour la générale de "la vie parisienne", j'ai apprécié aussi ce même plaisir léger, agréable, le décor astucieux et mon premier french cancan... sourire...
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