commentaires

désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

lundi, janvier 17, 2011

Recyclage et dégustation

Elle avait eu des rêves, elle avait eu désir de rencontres d'intelligences bienveillantes qui l'accueilleraient et qu'elle tenterait peu à peu de rejoindre, grâce aux frottements doux de conversations, elle avait eu désir, aussi, de plongées profondes en lectures. Elle se tenait derrière son tapis roulant, voyait se succéder interminablement produits et objets, visages indifférents, souriants, agressivité, petites ébauches de phrases des esseulés, si vite que sa crainte d'une erreur la clouait à sa caisse. Dans les intervalles, elle rejetait les épaules en arrière, ébauchait un étirement, attrapait un éclair de rêve.

journée de reprise en mains, un peu, de l'antre, avec cire pour le plaisir, argenterie en résignation, vitres en agacement infructueux et trivialités diverses – petits yeux fripés pour petit crâne ankylosé, un paragraphe plus ou moins rétif pour le convoi des glossolales http://leconvoidesglossolales.blogspot.com/, reprise ci-dessus d'un ancien, auquel j'en ajoute un tout bref :

Dans la nuit qui envahissait, de plus en plus tôt, la pièce, ou qui approfondissait la pénombre que les murs épais et les rares, petites, profondes, ouvertures y faisaient régner toute la journée, les deux lampes à pétrole était deux trous de lumière tremblante, qui s'évanouissait rapidement en s'éloignant de la source, comme un point brûlant, et les visages autour de moi prenaient une beauté mystérieuse et envoutante.

Et puis, plaisir de se replonger, grâce à la générosité de Laurent Margantin qui offrait quatre fichiers à télécharger sur oeuvres ouvertes http://www.oeuvresouvertes.net/spip.php?article791 dans les dits de Reger (exercices de détestations), ses interventions bernhardissimes dans notre France contemporaine, que j'avais à vrai dire copiées pour le plaisir lors de leur mise en ligne (mais il y avait juste assez longtemps que je l'ai avais lu, et ils étaient bons à mon humeur), et, ma foi, puisqu'il donne, en voici une belle petite bouchée,

« Comment ne pas être écœuré par ce spectacle une fois par an de dizaines, de centaines de lecteurs de poésie place Saint Sulpice à Paris, s’extasiant devant le moindre poète qui expose par là, lisant à voix basse comme à la messe le plus petit poème qu’ils ont déniché, reniflant le moindre poète et quêtant la moindre lecture de poésie, la moindre signature de poète. Ils assomment leurs enfants de leur bavassage sur la poésie, car ils emmènent toujours leurs enfants avec eux pour les initier à la poésie, leur religion à eux. Ils bavassent à leurs oreilles des poèmes ineptes écrits par des lecteurs de poésie tout aussi bavasseurs. Les lecteurs de poésie sont les véritables destructeurs de la poésie, dit Reger. Les lecteurs de poésie bavassent la poésie à mort. Mon Dieu, me dis-je souvent assis sur un banc de la place Saint Sulpice en voyant passer devant moi les troupeaux soumis des enfants emmenés par leurs parents lecteurs de poésie, spécialistes de poésie, quel dommage pour tous ces enfants à qui la poésie va être enlevée par justement ces spécialistes de poésie, à jamais enlevée, dit Reger. »

Il y a aussi le goût français pour l'ordre et la police, les éditeurs-industriels, les chiens et leurs maîtres (ne sais pourquoi j'ai préféré les poètes, parce qu'ils venaient avant ?), la rentrée littéraire et puis, avant les charges contre « la détestation vulgaire », contre la bonne humeur, la nature que l'on ne peut aimer qu'enfant, il y a la colère contre « la crapulerie de l'État » et cet avis sur les dirigeants

« La moindre parole de ces infâmes personnages est une déjection mentale, dit Reger. La moindre déclaration, la moindre idée, la moindre intention de ces individus infects est une déjection mentale. Rien n’est plus infect que les mots qu’ils emploient. Chacun de leurs mots est chargé d’une puanteur innommable. » Ah ce Reger où va-t-il chercher ça ?

Il finit sur les hommes devenus paquets de viande. Comme chez son premier transcripteur, Thomas Bernhard, il fait, avec l'auteur d'oeuvres ouvertes, preuve de lucidité comiquement hargneuse, il surligne, il grommelle, il revendique un poil de mauvaise foi, juste la quantité nécessaire pour être salubre.

Autres fichiers pour les nouvelles traductions de courts textes de Kafka, de beaux textes posthumes de Marc Bonneval, textes de gratitude provoqués par la découverte de l'Italie, et un ensemble des derniers textes mis en ligne : « Visions secondes », que j'ai goûtés lors de leur publication, que j'ai laissé reposer un peu avant qu'ils s'effacent, et que je me précipite pour les retrouver.

Parce qu'il y avait donc l'antre où vaquer un peu, sieston, découvertes sur internet, et FC à 17 heures pour entendre dans « place de la toile » les rescapés de l'ascenseur : Sébastien Rongier, Philippe de Jonckheere, François Bon et Patrick Chatelier pour ces dix ans de Remue.net qui avaient lieu le 15 et dont je traque les traces. http://remue.net/spip.php?article4001

9 commentaires:

Laurent Margantin a dit…

un grand, grand merci pour vos lectures, Brigitte !

Brigetoun a dit…

un peu surlignée sur twitters, j'ai un peu honte

joye a dit…

Ah oui, c'est dégoûtant, ces lectures des petits poètes, à moins que cela ne soit moi la petite poète. ;-))

Brigetoun a dit…

merci à toi de peupler

joye a dit…

Oh, mais c'est la moindre des choses, brige ! tu sais, bavasser, c'est un sale boulot, mais il faut bien que quelqu'un le fasse !

;o)

Pierre R. Chantelois a dit…

Vous posez la question : où les Français vont-ils chercher cela? Le goût français pour l'ordre et la police, les éditeurs-industriels, les chiens et leurs maîtres... Est-ce la situation kafkaïenne de la France qui les mène droit à ce goût pour la loi et l'ordre? La France change...

micheline a dit…

et le plaisir du bois ciré comme alternative, quand la lumière revient

Gérard Méry a dit…

Toi aussi tu as tes hommes en bleu, moins hargneux en promenant la gent canine !!!

jeandler a dit…

Au plaisir des mots... comme toujours.
Glané au passage ce "bavassage"
bien beau comparé à la hideuse "logorrhée"!