Puisque ce n'était pas la saison du Gaperon – d'ailleurs on n'en avait guère vu à ce moment là – après une hésitation, à défaut de sa chair blanche, onctueuse mais pas grasse, au fugace goût de noisette relevé par le léger persillage, ce serait bien honnête, modeste, franche, une tranche, assez épaisse pour ne pas s'effriter, de fourme d'Ambert – une tomme de chèvre de Lozère à la chair un peu grumeleuse qui tranchait par sa rusticité, promesse de saveur, dans le coin des pâtes dures – et tant pis pour le Saint Nectaire, d'ailleurs le dernier acheté ici avait été décevant – un demi coulommiers fermier qui pressait la petite barrière du film transparent dans son désir d'expansion et, après une hésitation, un Langres, petit cylindre à la croute molle, grasse, boursoufflée, d'un orange clair plein de gourmandise et, parce qu'ils étaient à côté sur l'étal, comme contrepoints, un des petits brebilles très frais, promettant d'être presque liquide, bien enclos dans son cylindre de carton et de papier plissé comme l'entourage d'un bouquet. Restaient les chèvres, qui s'étalaient par dizaines. Par lassitude, pour trancher à peu près à coup sûr, un banon très élastique dans son paquet de feuilles, qui ne durerait que le temps d'un repas, un petit carré de Dieulefit sanglé par sa ceinture de feuille clouée d'une brindille, un picodon très sec, presque disparu, et un frais légèrement cendré. Au moment de choisir entre les petits fromages frais aux raisins, ou baignant dans une huile relevée, il a semblé que cela devenait vraiment excessif.
24 mai
Brigetoun un peu dolente, assez stupide, tête comme coucourde, vent tournoyant, chuchotant, gueulant, agitant le gentil laurier qui se penche sur la cour, comme un encensoir, hésite à s'y laisser tomber, ou le semble
couchant les plantes, et Brigetoun cherchait meilleur emplacement, entassait cailloux sur les pots aux moments d'accalmie pour déchaîner nouvelles bourrasques,
feuilles galopant pour rejoindre la pelle
Sortie toutes les deux heures environ pour remettre terre dans pots, ramasser deux ou trois pelles de débris - hésité pour un peut-être futur voyage, envie, plus vraiment, envie, à quoi bon je ne peux pas, envie... on verra – connexion imitant mon crâne, correcte, faseiyant, repartant, s'arrêtant.
Heures qui fuient doucement, discrètement. Rien fait.
Reprends un paragraphe d'un convoi des glossolales (sujet inépuisable) http://leconvoidesglossolales.blogspot.com/
Paumée, attend demain, tu vas voir : qu'est ce que tu seras beau !
15 commentaires:
Grand dieu, quel beau foi vous avez! Une vraie table de dégustation. Mais attention... choisissez bien vos légumes car semble-t-il circulerait dans cette belle Europe unie certains légumes dissidents et... malicieux. Mais, faut-il le préciser, « les résultats d’analyse que nous attendions vont dans le sens d’une disculpation du concombre espagnol », aurait rassuré Frédéric Vincent, porte-parole des questions de consommation à la Commission européenne. À propos des petits pots, demain il ne sera pas trop tard, tout de même.
Un gourmet n'est jamais excessif ! tes choix de fromage me mettent l'eau à la bouche et tant pis pour le Saint Nectaire !
D'une grande poésie cet étal de fromager et ton évocation aussi. Épouvantable journée hier, et aujourd'hui ce en sera pas mieux. Un vrai temps de Toussaint.
et j'avais prévu teinturier et marché - ru me diras que c'est l'Ascension mais je ne savais pas
Dans la cour
le vent tournoyant
les pots valsant
le laurier au balcon attendri
laisse tomber une larme
Alléché par les odeurs
je reviens
un beau plateau
et quelle distribution !
Chèvre ou vache ou brebis, j'aime tout.
Jamais pensé les fromages si langoureux et voluptueux, relire cela pour le plaisir.
ces fromages valent bien qu'on y goùte sans doute mais tous à la fois j'en doute!
alors pour le régal des yeux qui les voient et de l'ouie qui les entend nommer : merci
Belle nourriture que ces fromages !! odeurs mélangées que le vent fou emporte........
Pluie et feu de bois dans la Drôme pas du tout Provençale
en escapade frigorifiée
Ah mais tu es quand même florale aussi aujourd'hui !
Vous êtes le Chateaubriand de la littérature fromagère dites donc!Et puis les tas de feuilles, oouuah!, ça c'est intéressant! Quelle aventure nous offre parfois le vent! Au passage, c'est faseyant pas faseillant. Cordialement
Ah, euh, et aussi tu seraS avec un S, comme dans inSignifiant, ou comme dans bonne-pour-la-caSSe. Cordialement
ah moi et l'orthographe fluctuante - merci
Faudra que tu viennes goûter du Prairie Breeze...
http://www.miltoncreamery.com/cheeses.htm#breezeContent
Paumée sait en faire tout un fromage ;)
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