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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

vendredi, décembre 16, 2011

Juste un jour - matinée emplie d'un poco de choses

Jeudi, c'était couffin vide, gros sac plein de quatre draps et une doudoune.

Jeudi c'était méfiance, chaussures plates, col roulé, lexomil, vitamines et magnesium, inutiles, parce que la douceur de l'air, la tendresse du ciel et mon voisin le platane étaient bénévolents.

C'était la lumière sur les animaux de pierre et les pigeons, sur la dentelle du micocoulier dénudé.

C'était vider le gros sac chez la teinturière, le plier, le mettre, avec ce fichu chapeau qu'était encombrant, dans un filet, continuer avec une envie de chantonner, pieds glissant l'idée d'un pas de danse, vers les halles.

C'était aimer le dynamisme des cardons, les négliger, prendre un gros morceau de courge, une chayotte, un bouquet de petits navets souriant en blanc et vert luisants.

C'était, simple, être très contente de ne plus consentir aux pommes de terre sans personnalité des grandes surfaces, faire grosse provision de bintjes et petite de rates d'Ardèche, y ajouter un pot de gelée de romarin.

C'était passer en revue le long comptoir du poissonnier – choisir un des plus beaux rougets, une petite daurade grise, trois coquilles pour le soir, un filet de cabillaud pour les pâtes des déjeuners.

C'était, pendant qu'on les préparait, rêver d'avoir assez de convives pour goûter la plénitude, la saveur, de la chair d'un très gros loup qui l'exhibait par la franchise du sang.

C'était sourire de la petite chanson des tortillons de pâtes fourrés étagés comme une gamme, et, un peu plus loin, acheter un lingot de brebis en l'espérant aussi merveilleusement riche, discret et parfumé à la fois que le précédent, traverser l'allée pour un bidon d'huile et une nouvelle provision de morue : un gros pavé blanc de sel, un grand et gras filet jaune, des joues.

C'était rencontrer clients et commerçants en veine de plaisanteries légères, et un faux personnage plutôt revêche.

C'était sortir par l'arrière des halles, voir des plantes tropicales à l'ampleur généreuse, des orchidées banales ou raffinées, et puis d'humbles pots et trouver place dans un sac pour un lierre bien touffu parce que celui de ma chambre se meurt inexorablement.




C'était dans les rues et sur le marché de Noël de la lavande en fagot ou en tressages ou coussins pour armoires, des armes moyennement dangereuses, les saluer, passer son chemin, acheter le canard enchaîné de la veille et des cigares.

C'était redescendre vers l'antre, yeux dans le rêve emporté des nuages,.

C'était vaquer, un gros peu, assez bien, se perdre avec l'abbé Mouret dans la touffeur, la générosité du Paradou, voir son enivrement

« Mais le coin enchanté du verger était plus à gauche encore, contre la rampe de rochers qui commençait là à escalader l’horizon. On entrait en pleine terre ardente, dans une serre naturelle, où le soleil tombait d’aplomb. D’abord, il fallait traverser des figuiers gigantesques, dégingandés, étirant leurs branches comme des bras grisâtres las de sommeil, si obstrués du cuir velu de leurs feuilles, qu’on devait, pour passer, casser les jeunes tiges repoussant des pieds séchés par l’âge. Ensuite, on marchait entre des bouquets d’arbousiers, d’une verdure de buis géants, que leurs baies rouges faisaient ressembler à des maïs ornés de pompons de soie écarlate. Puis, venait une futaie d’aliziers, d’azeroliers, de jujubiers, au bord de laquelle des grenadiers mettaient une lisière de touffes éternellement vertes ; les grenades se nouaient à peine, grosses comme un poing d’enfant ; les fleurs de pourpre, posées sur le bout des branches, paraissaient avoir le battement d’ailes des oiseaux des îles, qui ne courbent pas les herbes sur lesquelles ils vivent. Et l’on arrivait enfin à un bois d’orangers et de citronniers, poussant vigoureusement en pleine terre. Les troncs droits enfonçaient des enfilades de colonnes brunes ; les feuilles luisantes mettaient la gaieté de leur claire peinture sur le bleu du ciel, découpaient l’ombre nettement en minces lames pointues, qui dessinaient à terre les millions de palmes d’une étoffe indienne... »

(http://www.publie.net/fr/ebook/9782814505636)

C'était balayer la cour poussiéreuse de froideur sans trop frissonner, et puis assister au combat de l'abbé sorti du Paradou.

C'était penser à Paumée et y mettre n'importe quoi. Voilà, voilà.

13 commentaires:

chri a dit…

Je dis mieux vaut vendredi que jeudi, c'est ça que je dis!

code: chant

Pierre R. Chanteloish a dit…

Traverser ces étals dans les halles du quartier vous redonne un brin de santé... et la force nécessaire d'un aller-retour sous un ciel généreux et bleu.

Dominique Hasselmann a dit…

Faire le marché (les rates à ne pas rater), poissons de toutes sortes et canard (enchaîné, avec Cardon, le dessinateur des personnages uniquement de dos), vous remet d'aplomb, dirait-on.

L'abbé (C ?)"sorti du Paradou" parle logiquement du "bleu du ciel" : en bataille.

tanette2 a dit…

C'était pour toi la forme revenue et pour nous le plaisir de te suivre en photos dans ce marché si bien achalandé.

Lautreje a dit…

j'aime quand les loups affichent leur franchise ! Au mois, on sait à quoi s'en tenir !!

jeandler a dit…

Le gros sac vidé plié dans le chapeau le tout dans un filet allant d'un pied poco alerte vers la halle, un cabas rempli (ne me demandez pas d'où sort celui-ci) non sans en cours de route ramasser ressasser quelques mots en réverie... Et c'est fort bien débuter une chanson pour toute la journée.
Peste, ici, de la tempête !

Brigetoun a dit…

pas un cabas un couffin et il et là depuis le début - mais je recommande la partie Paradou de la faute de l'abbé à qui se sent transis d'hiver remarquable remède
Mais tout de même quand je pense qu'on a taxé Zola de naturalisme ! onirisme, baroque, oui, et expressionisme
Aveu à part Germinal, le reve et au bonheur des dames ne l'avais pas lu - grace au Kobo et à Publie.net je fais une cure : ventre de Oaris, Paradou, touffeur, érotisme sans méchanceté....

JEA a dit…

Echos d'un Bécaud :
- "Il y a tout au long des marchés de Provence
Qui sentent, le matin, la mer et le Midi
Des parfums de fenouil, melons et céleris
Avec dans leur milieu, quelques gosses qui dansent
Voyageur de la nuit, moi qui en ribambelle
Ai franchi des pays que je ne voyais pas
J'ai hâte au point du jour de trouver sur mes pas
Ce monde émerveillé qui rit et qui s'interpelle
Le matin au marché."
c'est cucuche mais gentil...

joye a dit…

Mais non, pas n'importe quoi ! N'importe quoi ne serait pas aussi savoureux.

arlette a dit…

Toute cette nourriture comment fais-tu??? navets souriants ???? je vais aimer de tels navets et bien d'autres !!!!!

Brigetoun a dit…

je fais provision pour une semaine ou plus, en fonction carcasse - c'est joli comme tout les bottes de petits navets bien brillants

Anonyme a dit…

Je me suis régalée de vous lire, tant par l'énumération des victuailles de grands choix et des photos toujours judicieuses.
Merci à vous.

Bon week-end Brigetoun :-)

Flore

Anonyme a dit…

Quand on fait le marché avec vous, les choses de poésie s'animent...
GBalland