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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

dimanche, décembre 18, 2011

Les livres de Jacques Doucet (ou un peu des)

Après une matinée de minuscules et répétées déroutes, suis partie vers trois heures, sous un ciel qui avait perdu son éclat du matin, qui mariait sourire doux,

amoncellement gris derrière Saint Martial

et menace sombre au dessus des jésuites,...

vers le Musée Angladon, pour voir enfin (j'avais eu envie, puis oublié) l'exposition consacrée à la bibliothèque Jacques Doucet, en visite chez ses héritiers.

Et ce fut un plaisir, un peu plus bref que je le pensais, parce que l'exposition ne présente qu'une petite partie de la librairie, avec des manques aussi marquants que, par exemple, les placards de « à l'ombre des jeunes filles en fleur », et bien d'autres choses, ce que me confirme « les écrivains de Jacques Doucet » le beau cadeau que je me suis fait en sortant. À vrai dire, l'hôtel, avec ses collections, n'aurait pas offert une place suffisante.

« Poèmes en prose » de Reverdy – imprimerie P. Birault 1915 – couverture originale de Henri Laurens – photo trouvée sur http://www.angladon.com/

Visite agréable (j'étais seule) avec

dans la première salle vouée uniquement aux expositions, quelques photos, et deux vitrines en hauteur, mettant en valeur des reliures de Pierre Legrain – et des tables-vitrines :

* une consacrée à Reverdy avec notamment des épreuves corrigées de « Nord - Sud », les poèmes en prose ci-dessus, « le voleur de Talan » 1917 reliure de Legrain et hommage manuscrit à Doucet, un poème manuscrit « Le matin »

« auréolée

la tête aux cheveux de satin

un doigt levé

une pensée... »

* une table-vitrine Apollinaire : « Le bestiaire ou cortège d'Orphée » avec des bois de Dufy et une reliure de Legrain, un autre exemplaire manuscrit, un brouillon de trois strophes de « La chanson du mal aimé »...

« l'homme et son désir » Paul Claudel manuscrit contrecollé sur feuillets cartonnés, ornés de papiers découpés

* dans les hautes vitrines

le manuscrit de Claudel ci-dessus (au verso : musique de Milhaud) - « Les Amis nouveaux » de Paul Morand avec des gravures de Jean Hugo ( « Charmes c'est-à-dire poèmes de Paul Valéry manuscrit autographe - « Amour » : poème de Félix Bangor ; traduit sur le texte gallois de Llandaff House et publié par William Makepeace Bruce ; traduit de l’anglais par Ponce Baudel d'André Suarès avec des gravures sur bois de Louis Jou. - « Tête d'or » de Claudel, manuscrit – « Clara d'Ellebeuse » de Francis Jammes - « L'immoraliste » de Gide, manuscrit autographe

« Séquences » de Blaise Cendrars éditions des Hommes nouveaux 1913 – reliure Pierrz Legrain exécutée par Germaine Schroeder

* une autre table-vitrine : « Paludes » de Gide avec une dédicace de « cette modeste rareté », une lettre de Doucet à Suarès « mon cher condotière.. », une autre grande et belle édition d'Amour avec une longue dédicace calligraphiée, un manuscrit de « le guerrier appliqué» de Paulhan, une litho de Rouault

Lettre de Picabia à Jacques Doucet. 4 février 1924 – photo http://www.angladon.com/

Dans la longue salle où sont exposés trois beau Degas (deux de danseuses, une repasseuse), un Forain, le portrait de Verlaine par Carrière, un lapin de Manet, une belle nature morte à la pomme de Cézanne, un chemin dans la neige de Sisley, un Viullard, un Sancho Pança de Daumier et « Wagons de chemin de fer » très beau Van Gogh :

* une table-vitrine Rimbaud : un croquis de Rimbaud par Ernest Delahaye - « les illuminations » - « une saison en enfer », une lettre envoyée d'Alger à Rimbaud par Germain Nouveau, une lettre de Rimbaud à Théodore de Banville

« 24 mai 1870

Nous sommes au mois d'amour, j'ai presque dépassé l'âge des espérances et des chimères, comme on dit, et voici que je me suis mis, enfant touché par le doigt de la Muse – pardon si c'est banal – à dire mes bonnes croyances, mes espérances, mes sensations... »

* Une table-vitrine Verlaine : des dessins de Delahaye, « la bonne chanson », « romanes sans paroles », un dessin de « Rimbaud canaque » par Verlaine, un autographe de « Jadis et naguère

De la musique avant toute chose,

et pour cela préfère l'impair... »

« Clara d'Ellebeuse » manuscrit de Fancis Jammes – reliure Pierre Legrain – photo http://www.angladon.com/

*une table-vitrine Mallarmé : « L'après-midi d'un faune », un manuscrit autographe de « l »Azur », un manuscrit autographe de « variations sur un sujet – le mystère dans les lettres »....

* une dédiée à Baudelaire : un portrait de Berthe, le manuscrit autographe de « le rêve parisien, à Constantin Guys », une lettre de quatre pages, dans une reliure de Legrain, à Richard Wagner

« Je me suis toujours figuré que si accoutume à la gloire que fut un grand artiste, il n'était pas insensible à un compliment sincère ... »

photo provenant du site du Musée

Dans la salle où sont exposés un petit vase de Derain, des petits Picasso de 1904 (dessin ou aquarelle) et du début du cubisme, la grande et belle « blouse rose » de Modigliani et, descendant le long d'un mur (avec un petit ressaut pour tenir compte de la longueur », le tirage 34 de « La prose du transsibérien » de Cendrars et Delaunay

* une table Max Jacob : « Saint Matorel », « le siège de Jérusalem », « Le cornet à dés » : des épreuves corrigées, et le manuscrit des f.1 et ff.8 et 11


« Tête d'or » manuscrit de Paul Claudel – reliure Pierre Legrain

une table Cendrars : « La guerre au Luxembourg » avec dessins de Kisling, « j'ai tué » exemplaire n°1, « les Pâques » édition Les Hommes nouveaux et épreuves, « aux antipodes de l'unité» manuscrit adressé à Monsieur Jacques Doucet daté du 3 mai 1917, une lettre du 17 janvier 1917

« Cher Monsieur Doucet

Ce que vous m'avez proposé jeudi dernier m'avait tellement ému que vous avez crû que je sortais fâché. Je vous prie d'agréer mes excuses pour mes manières extravagantes et croire que je suis touché de l'intérêt que vous m'avez toujours témoigné.... »

mais je me demande si je n'aurais pas dû insister au premier étage et si, passées les premières salles que je connais, il n'y aurait pas encore une salle pour cette exposition comme l'indiquait la flèche au rez-de-chaussée, parce que j'avais crû lire que figuraient Breton, Tzara et Aragon..

Suis sortie vers quatre et demie, et suis rentrée, en restant autant que possible hors des trajets des familles-en-courses-de Noël.

Une fois encore la lumière aimait Saint Didier, mais quand j'ai passé mon nez par le portail j'ai vu un prêtre et un sacristain ou assistant en grande conversation sur la façon de froisser le papier rocher. Trop tôt pour la crèche.. ai acheté des pastilles Vichy et des yaourts et regagné l'antre.

Et me suis battue, bien trop longuement, avec mes souvenirs.

12 commentaires:

Pierre R. Chantelois a dit…

D'abord un trajet urbain magnifique baigné de lumière. Ensuite un trajet littéraire exceptionnel sous la lumière des mots. Merci

JEA a dit…

- "...j'ai presque dépassé l'âge des espérances et des chimères..."
plus Rimbaud, il meurt !

jeandler a dit…

Tout un pan d'histoire
le temps des mécènes
aujourd'hui disparu

Lautreje a dit…

les sapins sont sous surveillance vidéo... des fois qu'ils s'évaderaient !

Michel Benoit a dit…

Et puis ce journal quotidien que tu nous... livre.

Dominique Hasselmann a dit…

Belle promenade et visite en douceur... après avoir évité la "menace sombre au-dessus des jésuites" !

Brigetoun a dit…

joli, Michel

joye a dit…

Je commence à croire que même Paris ou New York ne continnenent pas autant de trésors à découvrir - c'est merveilleux à toi de nous les dénicher !

Gérard Méry a dit…

suivez le guide !

arlette a dit…

De l'art du papier froissé aux pastilles vichy !!!! j'adore
Quant aux souvenirs ...........

Thaelm a dit…

Merci pour cette ballade
( force de l'écriture sortie de la main -autographe)
L'évocation de Reverdy m'a rappelé cette collection entière des cahiers du sud, dont la bibliothèque de la petite ville de banlieue que j'habitais c'était "défaite". Gentiment un vieux bibliothécaire m'avait remis le dernier exemplaire que j'avais emprunté et où figurait l'interprétation astrologique d'El Desdichado de Nerval(Article de Jean Richer qui a par la suite publié un ouvrage entier incluant ce développement).

Il est agréable de voir des oeuvres, des ouvrages qui ont encore une demeure.

Fardoise a dit…

L'exposition est si dense qu'elle laisse un peu sur sa faim, c'est certain. Et l'on sait qu'il y a tout ce que l'on ne voit pas. Le contenu, les textes, les dessins et autres illustrations, le dispute aux enveloppes de ces ouvrages, reliures précieuses et exceptionnelles. Et l'on croise des histoires qui se construisent.