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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

mardi, juillet 24, 2012

Dernier lundi festival – Brigetoun en refus éveil, artiste pouvoir et monde arabe – et beauté de la tragédie


réveil à huit heures (je croyais six), réveil étant un mot abusif - impression que je viens à peine de sombrer dans le sommeil et qu'une journée nouvelle est une idée loufoque et abusive. Hésitation entre ce qui s'offre, en quantité immense, trop, dans la ville, et l'aspirateur, et choix de ce dernier et autres menues activités.

Enfilé vieille robe fétiche, (et constaté qu'en effet j'ai grossi, pas énormément, mais assez pour que se dessine un petit bedon) négligé ce dernier, déjeuné, plus tôt, plus vite que de coutume, parce que le petit livret du festivalier signalait à quinze heures au cloître Saint Louis un débat animé par le directeur de Sindbad-Actes-Sud, Farouk Mardam Bey sur L'artiste et le pouvoir dans le monde arabe.

M'en suis allée, pied presque léger, dans l'absence de vent, par les rues nettoyées par les services de la voirie qui ont enlevé les affiches tombées (les murs d'affiches sont presque clairsemés par le mistral et les sans-façons qui prélèvent des affiches comme souvenir, sans attendre la fin du festival, sous l'oeil courroucé de Brigetoun) – un restaurateur au bureau de tabac disait qu'il avait eu trois fois moins de clients que la semaine dernière, pourtant les rues sont loin d'être désertes, avignonnais des quartiers ? Festivaliers au long cours qui se contentent raisonnablement de sandwichs ou barquettes ? Nouvelle fournée moins riche que ceux qui font l'ouverture ? Et les touristes qui ne font que passer et entassent les villes en une journée, mais eux on les voit peu en ce moment.

Suis arrivée pour le début, et pendant que Farouk Mardam Bey disait que tous les pouvoirs, depuis toujours, dans le monde arabe (là seulement ?) ont cherché à domestiquer les intellectuels, j'ai fait un tour à la billetterie, découvert que quelques places s'étaient libérées pour l'orage à venir (loupé pour cause de malaise), hésité, puis, comme je n'étais pas certaine de mon emploi du temps des jour prochains, renoncé (suis lasse d'ailleurs, tant pis). 

Après cette phrase, il a nuancé, fait un petit historique, parlé de régimes sans interdits mais avec censure et répression, censure préalable ou censure sociale (ulémas et autres) et économique. Régimes et censures marqués par l'arbitraire, par des décisions incompréhensibles et contradictoires.. – a annoncé les prises de parole, 

et me suis installée sous une arcade au fond (bougé ensuite quand un banc à l'ombre s'est libéré) avec la ferme intention d'écouter sans noter.
Mais pourtant, ne me suis pas tenu complètement parole.
Parce que j'ai aimé que Roger Assaf (Liban) dise qu'il faudrait déjà identifier ce que l'on entend par artiste et par pouvoir, parle de son étonnement de vieux militant de gauche classique devant des révoltes et révolutions qui ne correspondaient pas à ses schémas – de découvrir en Egypte par exemple un peuple qui crée lui-même - dise qu'il se sent incapable de diagnostic juste d'un questionnement, parle de la guerre du Liban, de ce moment où dans son quartier il n'y avait plus que le pouvoir des habitants qui s'organisaient pour le pain, l'école, la sécurité et l'évitement de tout conflit entre eux, dans un contexte de guerre ethnique. Ce moment où à sa grande surprise ce sont eux qui ont demandé la renaissance, ou naissance autrement, d'un théâtre.


Minha Al Batraoui, journaliste égyptienne, a parlé de la censure en Egypte.
Une belle intervention de Raeda Ghazaleh, directrice artistique d'un théâtre palestinien, (la belle crinière) sur les difficultés rencontrées par les auteurs et acteurs qui les ont amenés à passer du théâtre politique au théâtre social, passant ainsi à côté de la première intifada. Ce qui n'a pas été le cas de la seconde. Et les difficultés, avec théâtres détruits par l'occupation et les difficultés pour circuler. Actuellement l'absence de loi de censure, la non intervention de l'autorité palestinienne, mais le rôle, socialement et religieusement, du peuple, ce qui amène parfois à l'autorisation de spectacles qui auraient pu faire hésiter les politiques.

Avant Fadwa Suleiman, l'actrice syrienne que j'ai écoutée l'autre jour aux Jardins de Mons, l'humour assez désespéré de Taoufik Jebali, directeur de l'espace d'art et de création El Teatro, qui reconnaît que le régime Ben Ali qui avait une censure imbécile et assez peu virulente (pour le théâtre au moins) ne l'avait guère poursuivi (petit incise souriante : c'est sans doute pourquoi le festival d'Avignon ne nous a jamais invité), que beaucoup, là bas comme ici, jugeaient que la Tunisie était relativement plus libre que les autres états de la région, ceci dit avec ironie (d'ailleurs Ben Ali lui aussi devait le croire et il n'est pas un président déchu mais détrompé). Mais si la révolution fut une belle chose, le pouvoir qui en sort est redoutable, qui n'intervient pas, mais s'appuie sur une violence venue du peuple et de ses prédicateurs, une censure maintenant intelligente (c'est à dire qui comprend ce qui attaque le pouvoir) et qui justifie sa violence par la religion. Conclusion, un peu comme un voeu : rien n'est gelé, espoir en une évolution....

Je ne sais si c'est la tristesse qui nous venait de cet humour désabusé, de l'inquiétude qu'il dénotait, mais carcasse s'est réveillée avec fougue. N'ai pas attendu le débat, ai dit adieu à la fontaine, ai fait un voeu (retour sans problème)

ai repris la rue de la République, me suis amusée en voyant une fille que la nécessité de la parade ennuyait visiblement (l'un des garçons est intervenu pour lui délivrer bonne parole)

ai buté sur le gros de la foule, tourné par les petites rues, suis rentrée (carcasse immédiatement calmée) pour charger photos, pondre ces trop de lignes, essayer de dormir un peu, fait petit tour sur internet, et puis cuisine pour la nuit.
Enfilé pour me mettre fête la robe Ventilo achetée l'autre jour et fait la grimace parce que l'aime plus, me suis traitée d'idiote éternelle, sans sévérité excessive, me suis persuadée que n'avais pas sommeil, et m'en suis allée,

en attente grande vers le cloître des Carmes (savais pas trop pourquoi, un sentiment..)
pour voir Tragédie d'Olivier Dubois, 

avançant dans des rues qui se vident, vers un ciel très doux. )

arrivée en retard (mais j'ai eu ma place sous la gargouille) et pourtant une petite demie heure d'attente rendue interminable par un couple à voix de tête, derrière moi, qui ont échangé sans arrêt des semblants de phrase d'une stupidité que je ne pensais pas possible, si agaçants que ne pouvais pas lire, si exaspérants que j'ai presque renoncé, ce qui aurait été fort dommage

une photo trouvée sur web (c'était la première, quelques photos de répétition, annonçant programmation future) http://www.theatre-macon.com/2012-2013/saison-12-13/22-programmation/spectacles/danse/129-tragedie.html
Olivier Dubois sur le petit programme de salle
« Le propos de Tragédie est de faire apparaître, de manière instinctive et corporelle, ce que pourrait être une humanité immatérielle, philosophique. Et ceci en partant d’un théorème anatomique. Je suis femme et je suis ainsi faite… Je suis homme et je suis ainsi fait. Être homme ne fait pas humanité ; voilà la tragédie humaine. Il s’agit de faire exister un «vivre-ensemble » : qu’est-ce que cet entre-nous qui ne m’appartient pas, mais qui ne peut naître que de notre action volontaire et réfléchie ? Il s’agit de labourer son propre territoire pour qu’il garde son amplitude maximum et que celle-ci permette la rencontre avec des territoires voisins. L’humanité est là, dans ce frottement...»

corps nus pour la rigueur et éclairés durement – et trouver le tremblement qui dévoile, casse et laisse apparaître ce qu'est l'humain.
Au début un ou plusieurs corps qui avancent, franchissant le rideau de rubans noirs qui ferment les arcades du fond, et repartent, des groupes qui varient en nombre, en fréquence, dans l'amplitude de leur trajet, avec toujours ce pas ferme
Déchaînement de lumière et de sons, marche, pas, vagues humaines (dix huit danseurs de tous âges) et cela crée une musique visuelle.
Peu à peu des échanges de regard puis des gestes, des arrêts, des pas suspendus, ralentis, la reprise du rythme, des dérèglements, des chutes, des changements de trajectoires,
Ce moment où tous les corps se retrouvent allongés à une extrémité du plateau, roulent sur eux-mêmes, puis les uns sur les autres, forment un amas qui lentement glisse en dehors du plateau.
cette phrase : «J’imagine que, nus et allongés, nous recouvririons le monde de nos peaux.»
Musique qui tonitrue, un grand coup, et ils reviennent, marchent, cela se dérègle, devient danse, par groupes (de très beaux moments), cela se mêle, des couples se forment, agités, comme possédés, et l'ensemble devient, sous des lumières stroboscopiques, une foule secouée par le rythme.
Après une dernière sortie, et le noir, ils reviennent habillés en un temps record,

pour des saluts et recevoir l'ovation du public, debout.

Retour par des rues qui se sont étonnement vidées depuis la semaine dernière, sans groupe de musiciens au Verger ni au débouché de la rue Peyrolerie,

Un reste d'animation, quelques cris et musiques sans conviction place de l'horloge, des terrasses plus ou moins vides,


et tous les restaurants sur mon chemin fermés à minuit.

7 commentaires:

Unknown a dit…

je t'embrasse chère Brigitte j'étais la au festival un autre jour.
j'adore vos mots qui volent au dessus les scène entre le ciel les arbres le photos de la rue de la nuit c'est une beauté accablante.

et oui etre homme ou femme ne fait pas l'humanité
parceque je crois ca n'arrive pas j'usqua l'ame il faut etre complètement nu.
je fais l'art abstrait des modèles nu et je trouve qu'on peut exprimer toutes les idées de l'univers a travers un geste de modele nu.

belle continuation magique. je t'embrasse.
oh-j'ai lu aujourd'hui que c'est la fete de St. Brigitte et en Europe on célèbre ca alors alors si tu célebre pour honorer ton nom bien belle fete!!!!

Pierre R Chantelois a dit…

Vous avez loupé l'orage à venir et nous sommes tombés de ce côté-ci de l'Amérique dans un gros orage violent. Dans une même journée, Farouk Mardam Bey, Roger Assaf, Minha Al Batraoui et tous les autres. Théâtre de parole et rejet du politiquement correct? Et cette tragédie de Claude Dubois me semble s'inscrire dans la logique de votre sortie théâtrale : questionner l’Humanité, la connaissance, la parole libérée, la liberté sexuelle, la lutte pour l’égalité et l’épanouissement personnel

jeandler a dit…

De la prime à la dernière heure, toute minute en prise, et le pied vaillant et l'esprit. De bien belles et bonnes choses pour ces moments... Bonne nuit.

JEA a dit…

voeux à la fontaine :
- "que jamais plus, les chiffres de lecture de votre blog, ne viennent vous porter de l'ombre, de la froidure, de l'abattement, des empoisonnements..."

Gérard Méry a dit…

tellement de choses à voir et à lire...le potier de rue me charme

Unknown a dit…

et aussi,j'adore tes puissants mots sur la description de Tragédie, c'est tes mots existentialistes.un ou plusieurs corps qui avancent franchissant le rideau de ruban noirs.....etc.
et ta robe bleu c'est un reflet du ciel bleu au festival.
et le voeu a la fontaine,que cette richesse soit toujours trouvé dans votre coeur et dans ton environnement.quel festival du monde!

belle continuation magique.
Madeleine

arlette a dit…

Bleue comme la nuit qui s'avance
Oublié Brigitte!!! "la fête" est toujours au coeur
Pensées volantes