On dirait que trop grande
était la fenêtre – on dirait que mise en désordre était la
fenêtre – on dirait qu'on l'avait murée.
On dirait que place était
pour une ouverture réglée – on dirait qu'il y avait soubassement
- on dirait qu'il y avait sa forme – mais on dirait que derrière,
avec le temps, on n'en voulait pas de la fenêtre, il y avait une
belle grande armoire ou un placard de boiserie, avec belles volutes
et feuilles d'acanthe rechampies de bleu, ou un ciel de lit, un grand
miroir en trois parties noblement piqué, une fresque d'ocre et de
pourpre, cardinalice, peut-être, ou de branches bruissantes de vert
sombre avec des oiseaux bleus.
On dirait qu'il y avait
peut-être, tout simplement, une cloison qui entrait dans le mur,
juste là, pas tout à fait au centre du panneau, non,
capricieusement, un peu à côté.
On dirait que l'intérieur
se moquait complètement de la façade.
Alors on dirait qu'on
s'est contenté d'une plaque, comme une trace, une stèle à l'idée
d'une fenêtre.
Et puis, pour sourire, on
dirait qu'on avait inventé une petite persienne en dentelle, ou
presque, pour la poser à côté, en pendant souriant à la trop
grande ouverture condamnée, et que cela allait décroissant
doucement comme une chanson qui prend fin.
10 commentaires:
Une fenêtre murée c'est l'enfermement de la vie. Et devant cette ouverture obstruée vous nous proposez de bien beaux rêves.
L'obscurcissement de la fenêtre, comme un espace aveugle dans lequel vous avez su vous orienter.
Toute une histoire se déroule là sous tes yeux scrutateurs
et la magie opère désespérément dans la persienne en dentelle comme un dernier maquillage pudique
J'aime
On dirait comme une immense tristesse qui ne parvient pas à cacher ses larmes.
Ben c'est pas beau.
J'aime pas trop les fenêtre murées.
Comme tu as su nous faire rêver devant une fenêtre qu'à prime abord on aurait pu mal juger..! Merci.
info prosaïque
en Ardennes, vous rencontrerez nombre de maisons aux fenêtres murées (de briques le plus souvent)
c'est la réponse à d'anciens impôts frappant les propriétaires sur base du nombre de fenêtres
vers 1980, j'ai encore connu des taxes sur le nombre de robinets dans ma maison...
la taxe fenêtres et balcons n'est morte qu'il n'y a pas si longtemps (moins de quarante ans en tout cas, l'ai connue)
une fenêtre sur le monde emmurée, et il ne reste que le cadre pour attester de sa fantomatique présence, de sa persistance à exister alors que son essence s'est définitivement évaporée...
Bien vu.
ainsi l'argent n'y sera pas jeté
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