C'était, en la déplaçant
légèrement pour prendre un livre, vouloir que ma main ignore que le
contact de la naïade aux beaux seins ronds n'était pas comme cela
aurait dû l'être celui de l'ivoire ou de la corne, ou c'était
s'amuser de cette imitation presque parfaite, juste un peu ridicule,
comme lorsque je l'avais offerte à mon père comme un petit gag, un
aveu de mon incapacité à faire mieux, mais un tribu rendu à notre
goût partagé pour les ouvrages de gaillard d'avant, les petits
cuivres d’accastillage, les chansons à hisser ou virer gueulées,
merveilleusement faux pour moi et les soeurs en soutien du baryton
dont il était fier sans trop le dire. Souvenir partagé du sous-sol
de la villa de La Pérouse, des rayons sur le mur à côté du Coq
posé sur ses cales, souvenir de cette boutique lambrissée dans
laquelle nous étions descendus à Nantes, de la pénombre, des
odeurs de toile, de cordage et de goudron, souvenir de tout ce à
quoi il n'avait renoncé que tardivement, petit signe pour
l'accueillir dans sa chambre bureau, avec la carte de la rade d'Alger
et ses lignes de minuscules chiffres, lorsqu'il revenait de ses
promenade le long de l'écluse.
Reprise d'un paragraphe
d'un convoi des glossolales
http://leconvoidesglossolales.blogspot.fr/
pour continuer les vrais et faux souvenirs.
Ce jour, ce fût le
plaisir d'un concert dans la belle chapelle de l'Oratoire, musique de
la renaissance exécutée par Stefan Temmingh (fondateur de La
Follia), flûte à bec, et Axel Wolf, jeunes, plutôt beaux,
assurément musiciens de haut talent
Ai
cherché, entre deux petites corvées (je les ronge lentement mais
sûrement) et l'coute de ce qui se passait à l'assemblée, des
renseignements basiques (grâces rendues à Wikipedia) sur les
compositeurs au programme, tel qu'indiqués sur le petit livret de
l'opéra :
Ortiz
(de Tolède à Naples, musicien au service du duc d'Albes, maître de
la chapelle royale de Naples, auteur de deux recueils publiés en
1553 et 1565)
-
reccuerda tercera 3 – en ouverture – luth et flûte se
répondent – douceur, chaleur et ptofondeur du luth avec une
impression de résonance
- et
riccerdada primera et segunda, après l'air de De Rippe –
charme, raffinement, imagination
De
Rippe (luthiste de François 1er) – son clair de la flûte, sans
stridence, mais juste avant de perdre sa rondeur parfois. Il se
penche en avant parfois en tournant légèrement, puis la flûte
remonte, en cercle presque parfait.
-
douce mémoire – une chanson adaptée pour le luth, rêveuse
et douce
Dowland
(l'un des quatre plus célèbres, même moi je connais –
Angleterre, of course)
-
lachrimae et gaillard to lacrimae – musique de poète, sobre et
ornée avec délicatesse – le flûtiste change d'instrument d'une
pièce à l'autre, et plaisir des variations de timbre, presque de
nature du son. (une grande, de bois presque noir, douceur de caramel)
Johaness
Schop (allemand, 17ème siècle, violoniste et compositeur –
Hambourg)
-
lachrimae pavan – danse de cour -
De
Selma y Salavaerde (né à Cuenca, musicien à la cour d'Innsbruck)
-
canson terza a soprano solo – passages lents ou rapides,
virtuosité grande et diversité, et grand plaisir –
Jacob
Van Eyck (né à Utecht, aveugle, carillonneur de la cathédrale,
organiste, flûtiste et compositeur)
- wat
zalmen op den Avond doe – virtuosité extrême, mais joie non
moins grande, la flûte et le public jubilaient
un
entracte un peu long, une méditation devant les flûtes, un grand
désir d'avoir une explication, de connaître leur nom... mais le
musicien était dans la sacristie, ne suis pas sure qu'il parle
français, et nous étions assez nombreux (une bonne partie du tout
petit public) à les contempler, avec des mains qui nous démangeaient
Reviennent
avec, pour le flûtiste, un instrument très clair et encore plus
long que celui posé sur la chaise, pour jouer :
-
greedeeves air anonyme et qui sonne connu
et
puis, le luth seul pour
- une
passacaglia d'Alessandro Piccinini (ne connaissais guère que
le nom – italien on s'en doute – luthiste et théorbiste à
cheval sur siècles) – répétition, et douce mélancolie
Marin
Marais (célèbre avec ou sans Quignard)
- les
folies d'Espagne – danse solennelle un temps, puis gambade
Corelli
(partage avec Dowland la célébrité universelle)
-
sonate n°10 en fa majeur – un prélude, des danses rythmées,
une grande richesse, une musique joyeuse, une petite note triomphante
de la flûte pour conclure
Après
les applaudissements, nous avons eu droit à un bis, une musique
charmante, un Noël si j'ai bien entendu (mais je n'ai pas compris le
nom du compositeur).
Un
grand plaisir, et puis comme la chapelle est assez petite et n'était
pas, loin de là, pleine, une agréable impression d'intimité
(mondaine)
Un
retour, les basses de la musique de mes voisins (dépaysant, mais ce
n'était pas très fort)
J'ai trouvé, dans l'après
midi aussi, une vidéo des deux musiciens jouant Lachrimae Pavaen
de Johaness Schop qui figurait
au programme et que n'avais jamais entendu, comme la presque totalité
des musiques écoutées
7 commentaires:
Musique du soir, moins de noir.
Ivoire marin
Dent de cachalot
Gravé dessin
D'un matelot.
Oui, en remontant, le cercle décrit par l'extrémité de la flûte est parfait. Vivre la musique de tout son corps. On se laisse porter et le choix est grand, le répertoire si riche de cette époque et inexploré.
chanson de Jon Ludstrom (original en Néerlandais) :
- "Nous trimons et tirons à en crever
Poussez les gars poussez
Et ça pour si peu d’argent bon Dieu
Poussez les gars poussez
La poêle est sale et le poisson petit
C’est parce que nous ne sommes que des malpropres
Il y a si longtemps que nous sommes partis de chez nous
Ce sont encore nos femmes qui nous manquent le plus
J’ai fait un si beau rêve cette nuit
Une sirène était dans mon lit
Maintenant Neptune est bien fâché contre moi
Il est jaloux et pour se venger
Maintenant il est jaloux et pour se venger
Il déchaîne la tempête notre bateau sombre
Mais si nous coulons alors irai-je peut-être
De nouveau auprès de mon adorable sirène
Et sur le fond de l’océan
Tu pourras alors y voir deux amoureux..."
en attendant l'air de Jacob Van Eyck était époustouflant - et puis il y a cette façon étonnante de jouer de la flûte des flûtistes hollandais de l'époque (serais pas capable de décrire, mais c'est différent et merveilleusement efficace)
J'adore l'expression "les petits cuivres d'accastillage".
Et merci pour la musique.
Tu es si savante en musique !! ne saurais en dire autant et apprécie tes interventions
C'est ça le partage des compréhensions !!
Merci Merci
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