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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

lundi, octobre 08, 2012

Rêves d'oloés sans écriture (picorage atrocement long)


Ce serait découvrir, au gré des pas dans la ville, un embryon de canapé, d'un Louis seize blanc de salle-de-bains campagnarde (souvenir vague et privé) – ce serait lui trouver charme, se voir fugitivement en bourgeoise à prétentions intellectuelles, imitant la Récamier, ce serait se moquer un peu, et puis hausser épaules, ce pourrait être prendre le plateau de bois, le poser au sol, à côté du guéridon fin d'un siècle autre et du panier de métal, s'asseoir, étendre les jambes, chercher position, ne pas trouver ça si confortable, mais tant pis, s'appuyer au cannage et reprendre mes lectures de ces textes que j'avais vu naître sur des sites web.
Il y aurait, lu en sa version définitive fin août, Lotus Seven de Christine Jeanney http://www.publie.net/fr/ebook/9782814596665/lotus-seven (et pour lui comme pour les autres quand le peux je reprends, tant pis pour la longueur, ce que je notais sur Babelio, parce que, insuffisant ou non, à côté ou non, c'est ma lecture immédiate, et parce que suis cossarde :
Si on en était capable, on n'écrirait qu'en se fixant une contrainte comme elle le fait, une fois encore, oui mais il n'est pas donné à tout le monde d'y trouver appui pour fantaisie, gravité masquée ou, comme ici, profondeur. Contrainte donc, qui enchâsse l'émotion, la met à distance tout en lui donnant forme, intensité.
À partir d'un feuilleton ancien, presque mythique, assez célèbre pour que même les gens qui, comme moi, n'ont jamais eu de télévision, et n'en parlaient pas, connaissent son existence : «le Prisonnier», qui se déroule dans un monde qui baigne dans l'étrangeté, l'effacement de l'identité, le formatage sous un aspect de normalité, elle tisse le souvenir de son enfance, regardant, assise sur les genoux vêtus de velours de son père.. et le monde de cette enfance, les rapports père fille.
Notre façon d'être dans le monde aussi, en appui sur ceux qui nous précèdent, le besoin de liberté, de justice, de liens.
Elle suit le déroulement du feuilleton, découpé en chapitres, qui l'amènent à la mort du père, à la vie sans lui, et l'on passe dans le texte de la fiction à ces souvenirs, d'un temps à un autre, dans le feuilleton et dans son univers propre, avec toujours cette langue sensible et inventive.
C'est très beau
Des lamelles de passé perdu en strates archéologiques, qui pour voir l’épaississement discret qui nous porte, lourd à tous les étages, je marche sur l’anéanti précédent le mien celui des autres, peut-être qu’il faudrait rendre cela, les phrases les paragraphes s’étagent et quelqu’un marche tout en haut pendant un laps de temps très court.
Un passage que j'aime tout spécialement http://brigetoun.wordpress.com/2012/08/19/couloir-nuit-hopital/
oooOooo
Il y aurait, lu par petites goulées, retrouvant le plaisir de la publication sur le Tiers.livre (on y trouve encore des compléments http://www.tierslivre.net/spip/spip.php?rubrique69) l'autobiographie des objets de François Bon, qui a été analysé mieux que je ne saurais le faire http://www.tierslivre.net/spip/spip.php?article2971, lors de sa parution au Seuil, qui a déclenché, avec un petit détournement, gardant uniquement le côté nostalgie des billets, des commentaires variés parmi ses lecteurs comme les mesmoires de Maryse Hache sur http://www.semenoir.typepad.fr/ comme tous les premiers de mes petits ou trop longs billets trouvés en cliquant à gauche sur vrais et faux souvenirs.
Tout de même ma très imparfaite réaction :
Autobiographie des objets, titre qu'il est tentant de lire : autobiographie par les objets, mais non, c'est bien de parler des objets qu'il s'agit, mais si, l'«auto» ne s'applique pas vraiment à eux, et c'est faire son, notre histoire à travers ces objets que l'on ne remarque plus, qui sont apparus un jour, qui ont fait en sourdine l'histoire de notre société.
Beaucoup entendu ou lu, dans des articles parcourus en diagonale, dans des émissions écoutées pendant que mes mains agissaient et prenaient un peu de mon attention, qu'il s'agissait de nostalgie. Un peu, bien sûr, mais davantage de mémoire, et de recherche pour comprendre comment nous avons grandi.
Et se servir de tout pour retrouver cette mémoire, des sons, des odeurs, du toucher, rendre présence à l'objet et dévider ce qu'il entraîne avec lui de son histoire et de celle de la famille, des amis, des plaisanteries, des surnoms, d'annonce de ce que nous vivons, d'entrée dans notre monde contemporain.
Quant aux citations le choix est chose quasiment impossible, les thèmes étant beaucoup trop nombreux, souvenirs et réflexions d'objets ou lieux extrêmement divers, alors un peu au hasard, mais parce que cela a résonné en moi
Plus tard j'aurais moi-même une écluse au bout du monde, j'ouvrirais régulièrement les vannes dans le mystère des miroitements à la marée montante, que tous nous savions (et que je sais encore) rien qu'à certaine qualité du vent et de l'énergie terrestre.
et
Trop tard pour le savoir, donc, mais on peut concevoir à distance comme un «graphe» (dirait-on aujourd'hui) de l'objet nouveau dans la cartographie du village, le pharmacien et le docteur, le directeur de la laiterie coopérative, l'électricien Ardouin lui-même avaient dû s'équiper les premiers. Deux ans plus tard, les grands-parents eux-mêmes auraient leur machine à laver personnelle, et cette révolution silencieuse, se propageant à l'échelle d'un pays, était l'armature sur laquelle la télévision (et la publicité donc) n'aurait plus qu'à glisser.
Ou, surtout, peut-être
.. on en était venus à parler, lui et moi, des images intérieures. Lui, qui ne voit pas, est bien avancé que moi dans cette ancienne connaissance. Dans cet échange, les clés incomplètes qu'il me livrait, de par sa cécité même – lui qui dans cette maison voit autant et plus que moi – se révélaient tellement plus décisives que la vieille clé du garage, dans le petit réceptacle de bois ajouré, près du savon de Marseille et de la brosse à chiendent.
oooOooo
Et, avant de me lever, parce que finalement je ne suis jamais restée plus de cinq minutes dans une chaise longue ou un transat, leur inconfort étant une idée sans doute fausse mais qui s'est, à la longue, ancrée en moi, la retrouvaille (en fait ce fut avant de m'endormir samedi) du Cantique de la paranoïa de Daniel Bourrion http://www.publie.net/fr/ebook/9782814596788/cantique-de-la-paranoia, dont j'ai, dont nous avons suivi l'élaboration sur son site - un billet daté du 6 octobre http://www.face-ecran.fr/2012/10/06/une-breve-histoire-de-ma-paranoia raconte comment l'idée est née (de la rencontre avec un panneau SNCF regroupant les silhouettes symbolisant les interdictions et dangers d'où lui est venue l'idée de répertorier toutes les craintes possibles, de les imaginer au besoin – et ma foi c'est ce que font bon nombre de nos contemporains)
De longs blocs ou paragraphes comme des litanies de recommandations plus ou moins absurdes, un portrait grinçant de ce que nous devenons, à la fois renfermés et malléables par peur.
Fermez les portes où que vous soyez ménagez-vous des issues de secours ne dites jamais oui sachez lire entre les lignes devinez les intentions de ceux qui vous suivent évitez les contacts physiques n’approchez pas l’eau n’acceptez pas d’aller prendre l’air surveillez l’hôtesse éradiquez toutes les mauvaises herbes faites vos courses en gros volumes ne passez aucun diplôme découpez soigneusement les étiquettes de vos vêtements repassez-vous vos rêves à l’envers pour les vérifier comparez vos photos avec la réalité signez tout d’un faux nom que vous changerez chaque matin lisez par-dessus les épaules pourquoi me regardez-vous comme cela pourquoi me regardez-vous comme cela ?

Mais comme vraiment je ne suis pas faite pour les sièges où l'on s'abandonne - je leur préfère les lits ou les tabourets, à la rigueur les chaises raides - ce serait s'installer sur celle-ci, paillée, dans la salle d'attente de petit toubib et lire, bien droite et digne, aussi impassible que j'en suis capable, sur mon Kobo, trois des très brefs textes qui paraissent le vendredi chez Publie.net, dans une nouvelle collection «ouvrez» appliquant la règle un livre, une heure, un euro (en fait 0,99)
Bon, s'ils sont courts, ils n'en sont pas moins remarquables, mais vais être brève parce que j'ai déjà débordé depuis longtemps ce que votre attention bienveillante peut supporter.
Seulement, à l'heure du café, de la confiture d'orange amère et des idées se mettant en place, j'avais sélectionné ces deux photos et deux autres en rapport avec la lecture et j'avais attaché à chacune le désir de parler (pour moi surtout, garder trace) de trois livres – Vous ferai grâce des autres, ce sera pour demain, vous êtes prévenus.
Ce serait donc le syndrome de Dardène d'Elias Jabre http://www.publie.net/fr/ebook/9782814506770/le-syndrome-de-dardene, une courte fable - Dans un avenir plus ou moins proche, dans un monde qui continue sa transformation, deux membres d'un groupe musical (les instruments, la musique ne sont bien entendus plus les mêmes ni la façon de jouer, qui met en jeu tout l'instrumentiste, et la rencontre des corps, des peaux) et l'irruption de ce qui ressemble fort à quelque chose d'oublié, l'amour, les relations personnelles qui se voudraient exclusives, et la jouissance maintenant interdite, comme l'attachement. Et avec l'irruption de l'amour, celle de la solitude, etc... et sa nécessité.
Un sortilège délicieux dont nous ne nous lassions pas. C’est alors que le miracle se produisit. Je prenais de plus en plus conscience de... oui, de moi, de mon moi... comme si j’étais devenue une entité distincte, séparée. Comme si la liaison avec le monde ne me nourrissait plus. J’étais devenue autonome, ce qui me ravissait tout en me donnant un sentiment... de solitude inouïe.
ou
Dans la rue un soir d'été gare de Lyon où j'étais d'Emmanuel Delabranche http://www.publie.net/fr/ebook/9782814506756/dans-la-rue-un-soir-d-ete-gare-de-lyon-ou-j-etais
Dans un des cafés-brasseries en bas, devant la Gare de Lyon, regarder, voir vraiment la ville, les gens, ne pas s'arrêter à ce qui peut être criard, aller au delà de la banalité, noter les consommateurs, les mouvements des garçons, les autos qui s'arrêtent et attendent arrivées, le pouls de la ville, de ce coin de ville – voir en architecte, en rapports de volumes, mouvements, couleurs, les gens le mobilier urbain et les véhicules – voir une femme, penser qu'on la connaît ou l'aurait pu.... se souvenir – et quelques photos à l'appui.
Il avait fallu à l’aide d’une grille tracée hâtivement sur le carnet relever par familles ces lignes dessinant à la fois le mouvement et ce qui jamais ne bougerait droites se croisant parfois comme les fils d’un tissu filet prenant au piège des bancs de poissons qui n’y voyaient que laine.
(un passage sur getoun.wordpress.com/2012/10/01/dans-un-cafe-brasserie-devant-la-gare/)
ou, enfin et peut-être surtout
où Claude Ponti donne mots à l'enfance en péril, l'enfance maltraitée, avec la force d'un chant crié. C'est très beau – et je me permets de conseiller : ne pas passer à côté
Nous vivons retournés comme des gants, vulnérables et détruits, en reconstruction permanente, Saint Sébastien, nous avançons vers les flèches, nous guidons les flèches, nous sommes égarés au point de vous dire où nous frapper.
Car nous vous aimons.
Ô vous les survivants, allez en paix.

6 commentaires:

Dominique Hasselmann a dit…

Ces lignes lues, pour certains, ces autres lignes à lire, pour d'autres, et votre chaise à la Van Gogh supervisant le tout.

jeandler a dit…

Rencontre avec une chaise n'est-ce pas une invite à prendre un livre et à la lecture ?

Michel Benoit a dit…

Oh ! la photo de la chaise !

arlette a dit…

J'aime lire ces lignes au gré des yeux et des images parfois je ne suis pas toujours !!! bel exercice d'attention et quand l'esprit se focalise sur un mot ou un objet c'est un grand plaisir qui rebondit vers autre chose
"comme ces gants retournés "Tu touches chacun dans son intime
Bref! désolée je réfléchis trop

joye a dit…

J'ai jamais compris comment tu fais pour tout lire et puis en écrire en illustrant avec des photos !

je commence à penser que tu n'es pas seule, que tu es, en effet, une des soeurs triplées qui assurent toutes le contenu de ce blog !

Autrement dit, ma belle, tu m'époustoufles !

Pierre R. Chantelois a dit…

En retard pour commenter mais à temps pour apprécier. Naviguer entre les mots qui nous sont propres et les mots des autres est un art. Au travers il faut s'arrêter, s'imposer une pause, et, en tant que lecteur, réagir intérieure et publiquement. J'aime.