L'air s'adoucit un poco,
le ciel a hésité toute la journée, laissant le bleu se frayer
passage entre les gros amas blancs.
Brigetoun était en petite
forme, rêvassait, pour que naissent des souvenirs qu'elle avait cru
vivaces, pour que se rêve sa participation aux futurs vases
communicants. Ils pointaient, tournaient un peu, doucement,
manquaient les mots pour les fixer... suis en période de défiance,
ayant perdu mes petites illusions dans ma capacité à les manier –
les aime, ai toujours eu goût pour eux, manquent la pensée,
l'organisation, ce qui n'a jamais été mon fort.
Et, c'est dommage, une
série de mots sans ordre, sans rapport, comme une collection,
enfilés comme un collier, sonnant comme un tintinnabulement, ne
saurait être jugée suffisante...
Écriture.. vases
communicants... je reprends ma petiote tentative d'écho au texte
d'Éric Dubois, pour février.
Nuit
La solitude
le silence de la nuit
ne peux me trouver
en suspens
la pensée gelée
peur – s'ouvre un
gouffre où tomber
les mots en fuite
non
la solitude
le silence de la nuit
calme bienveillant
l'air nourri de vie
souffle – bruissent les
feuilles
mots qui arrivent
les dire
écrire
la feuille blanche
un volet claque
éveillée
dans la nuit
mots qui caressent
les pensées
les rêves
phrases en rubans.
Il y avait aussi ceci, à
quoi vous aviez provisoirement échappé, qui était ma première idée
Nous écrire, une fois
Aujourd'hui, j'ai retrouvé
mes brouillons
et je les ai jetés,
aujourd'hui, j'ai tenté
de me souvenir des mots, tournures de ma lettre
ma réponse
à ce cadeau que tu m'as
fait, caché dans une enveloppe scellée
Aujourd'hui, je l'ai
relue, ta lettre
et j'ai retrouvé intacte
la gratitude, ta franchise, le soin mis au choix des mots... coller
au plus près de ce que tu voulais dire, le découvrir sans doute
aussi dans le lent déroulement de la phrase s'écrivant.
Aujourd'hui, j'ai retrouvé
cet aveu de l'éloignement qui s'était creusé au fil des ans, et ta
découverte, dans mes mots écrits, de ce que tu crois être moi.
Aujourd'hui, j'ai deviné,
dans le tâtonnement des mots, la confirmation du mépris inconscient
de ton regard ancien sur moi, que j'acceptais comme juste, mais aussi
du refus de juger que n'avais pas senti.
Aujourd'hui, j'ai
retrouvé, exprimé, l'amour qui est entre nous, que nous sentions -
au delà des rares phrases rapides toujours maladroites, parfois
blessantes, échangées - par des gestes furtifs, des regards, la
grâce que tu as mis dans ton accompagnement lorsque ma faiblesse
s'est étalée, l'évidence que ce fut pour moi, pour une fois, de
l'accepter.
Aujourd'hui, j'ai repensé
aux heures passées pour te répondre, parce que je ne suis pas
habile aux mots écrits, (encore moins aux mots prononcés, mais ça
nous le partageons, ça et cette règle implicite qui veut que nous
ne nous disions rien d'intime) mais que, ces temps ci, j'essaie de
les employer et que je sais mieux mon incapacité à les manier.
Tu écrivais
Ma soeur,
Cette lettre je l'ai
dans ma tête, dans mon coeur, mais difficilement sur le papier..
mais
elle dit ce que jamais nous n'aurions pensé nous dire.
L'écrit, ce qui ne
s'échange plus guère, qui, dans sa rareté, est le lieu du
sentiment, où l'on peut, sans intervention du monde, sans la gêne
de la présence physique, du visage auquel on s'adresse, tenter de
découvrir et adresser ce qui ne se dit pas.
L'écrit seul à même de
réfléchir le monde et nos rapports.
8 commentaires:
Les Vases communicants avant la (ou les) lettre(s), pourquoi pas ?
Ils pourraient ainsi s'affranchir d'une date.
Les mots mûrissent... et la poésie grandit.
Entre deux vases
la parole passe
et l'écrit s'envole
grande est ma gratitude envers vous trois
La tête à l'envers dire l'inverse de ce que l'on veut dire ...
reste le souvenir de ce qui n'a pas était dit
c'est amusant Brigitte, je viens d'envoyer un extrait de lettre de Virginia à Christine qui la traduit et ne peux m'empêcher de vous envoyer à mon tour un autre extrait car il me semble convenir là à votre entre-deux vases... "Quand on se retire sur les hauteurs qui sont les vôtres - je parle de Cassis -, avec la chaleur, la lumière, les couleurs, une vraie mer, un vrai ciel, de la vraie nourriture au lieu de ce magma insipide et aqueux qui nous tien lieu ici, alors on dépasse le stade du bavardage. On n'a que faire des êtres humains. C'est là l'une de vos particularités. [...] C'est ce qui fait de vous les peintres, en règle générale, des personnages exemplaires; c'est la raison pour laquelle vous respirez le calme et le bien-être. C'est vrai, sans aucun doute, de Bell et de Grant: je n'ai jamais connu personne qui déborde autant qu'eux de chaleur, de bonheur, comme des tournesols un jour d'été. Mais vous, vous avez aussi quelque chose de la libellule." Pardonnez-moi chère Brigitte ce trop long extrait dune lettre de Virginia à Roger Fry (du 16 sept. 1925) et retranscrite sous le coup d'une impulsion (peut-être à cause de la dernière phrase, de l'évocation du sud, de ce qui vous est cher) je ne sais... et j'en oublie que je vous tutoyais, tant je vous estime grande libellule...
bizarre, mon commentaire déjà bien long a été envoyé deux fois: retirez-en un s'il vous plaît! et celui-là!
c'est un merveilleux cadeau (aime de toute faon les rapports de Virginia Woolf et Robert Fry) mais c'est vrai une fois suffit
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