Ce serait aimer les
pierres (crois ne l'avoir jamais dit)
Ce serait avoir découvert,
à l'âge ingrat, la beauté des formes par l'ensemble
cloître/clocher du Thoronet, par les absides des églises romanes
d'Auvergne, jusqu'à vouloir, six ou sept ans plus tard, en grand
désir, être architecte.... et en rester à une première année, à
la découverte de la vie, à la non découverte des mathématiques
avec un 3 sur 20 à la clé, à des épures de stéréotomie un peu
floues, légèrement boueuses, à un rappel à la réalité.
Ce serait, pourtant,
toujours, caresser des yeux les jeux de la lumière sur les murs, les
contreforts
Ce serait s'imaginer une
parenté.
Ce serait squelette vêtu
de chair, le moins possible – et avec l'âge ce moins diminue sans
encore être un trop – face à squelette armant l'envol et les
voûtes, vieillesse face à grand âge, tâches rousses face à
humidité noire.
Ce serait avoir aimé que
les gros os s'affirment, que les hanches soient pointues, saillantes.
Ce serait se rêver des
creux presque ombreux en place de courbes douces, faute d'être
belle.
Ce serait se voir solide,
à travers les séjours au royaume des perfs, se vouloir solide,
entière, en sa vision du monde.
Ce serait caresser des
illusions, et le savoir.
Car je sais bien, quand
tente de regarder en moi, que je ne suis pas roche calcaire, même
pas schiste, mais argile.
Une argile qui a bu à
toutes les sources, qui a laissé glisser les idées, les goûts, qui
s'est gorgée, qui s'est incorporé ce qu'elle lisait, voyait, les
influences...
Une argile impure, avec
des noeuds de résistance, qui refusait parfois – et peut être
souvent ce qui venait avec le plus d'amour et de proximité – qui
n'en était pas entamée, ou qui, devant l'insistance, se déformait,
se faisait rejet, se bosselait pour expulser.
Suis un très bizarre,
inégal, baroque, bosselé, bloc d'argile aux formes étranges.
7 commentaires:
Le corps est matière. Et de cette matière dépendent nos humeurs. Nous n'y échappons guère.
"stéréotomie", je retiens.
Et se modèle encore et boit la vie par tous ses pores dans un doux rayon de soleil
Caresser nos illusions : n'est-ce pas rêver encore et toujours ?
longtemps que ne les caresse plus, et même alors avais toujours petite réserve qui n'y croyais pas (sans doute trop)
Superbe, magnifique "lithoportrait" .
Pas pour copier sur les autres commentaires, mais "superbe" est un des premiers mots qui me viennent à l'esprit pour ce billet et ses illustrations. C'est vraiment superbe.
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