Quelques
pas dimanche matin dans la gloire de la lumière, et puis allers et
retours entre tâches matérielles ou sieston dans l'antre et
jouissance de ce que le soleil offrait à ma cour...
entre
l'antre rafraîchissant - regards rapides sur l'ordinateur, billets,
petite réserve de photos de ces jours - et lecture, dos contre le
mur sur lequel ricoche la chaleur, chapeau de toile molle sur crâne,
yeux baissés sur livre, dans l'odeur légère et vague des plantes
chauffées, de la phrase urbaine de
Jean-Christophe Bailly, ce merveilleux recueil d'articles autour de
la ville, où je picore peu à peu – justesse du regard,
creusement, intelligence et poésie – mais, au lieu de reprendre le
fil, suis revenue sur deux textes Passé simple et
Le propre des villes, et
vais, pilleuse paresseuse mais heureuse, en reprendre des bribes pour
les intercaler entre des façades ou tours dressées contre le ciel
et les nuages qui nous visitaient sans s'attarder vendredi, et une
cour suspendue au dessus de la place, face au palais, qui me fait
rêver
Toute
ville est comme une mémoire d'elle-même qui s'offre à être
pénétrée et qui s'infiltre dans la mémoire de qui la traverse, y
déposant un film discontinu de flocons. Or ce tissu friable
d'émotions a ses lois,... comme tout langage, il n'existe
véritablement qu'en acte, comme parole : phrase ou récit, ligne
cursive inventée ou reprise par celui qui marche (Passé
simple, page 87)
et
La
ville rassemble aujourd'hui dans son être ce qui la type et ce qui,
sans type, demeure anonyme... La capture du type qu'est le typique
sert d'alibi culturel et touristique à l'atypie proliférante du
n'importe comment fonctionnel, et c'est pour ainsi dire
automatiquement que l'on passe de la zone délaissée à la zone
embellie. (Le propre..., page
117)
Ainsi,
on le sait, dans les villes que le tourisme à grande échelle plie à
ses lois, peinera-t-on, sauf à certaines heures et hors saison, à
éprouver leur être propre là où pourtant les guides le signalent,
tandis qu'il sera à disposition dans tel faubourg ou tel recoin
oubliés... Chaque ville parle son propre argot secret et contient en
elle une ville clandestine qui la transperce en des mailles
disséminées dont le flâneur reconstitue la trame (Le
propre..., page 118)
Mais
le dégagement volontaire et volontariste du signe (ce
qui ne s'applique pas à cette place – au moins le dégagement,
reste peut-être le très chic «aménagement» - place creusée il y
a tant de siècles qu'elle est devenue elle même signe),....
la plupart du temps n'a pour effet que de l'effacer en le ravalant à
la mesure d'un simple bien de consommation culturelle. C'est ce qui
arrive aux monuments, aux sites et aux zones classés... entrés de
force dans la «communication» qui sépare, ils sortent du plan
d'immanence où le temps les avait versés. (Passé
simple, page 88)
seulement dans les meilleurs cas, la ville n'est pas morte, elle a refermée sa vie autour de ces signes, elle ne les a pas totalement abandonnés au tourisme, elle a vécu avec eux, y a ajouté traces de sa voix, sa vie propre, spontanée, évoluant au cours des siècles
Il va de soi
qu'architectes ou paysagistes (ou
édiles, «décideurs») n'ont pas... à imiter cette
culture spontanée, mais ce qu'on peut leur demander, c'est d'en
tenir compte,de l'inclure comme étant à venir dans leurs projets,
et plus encore de la respecter quand elle est là, quand, grâce à
elle et aux pores infimes qu'elle multiplie dans le tissu, le passé
devient «passé simple», simplement ce qui est là encore, à côté
de quoi l'on vit.. en vieillissant comme lui. Là où la ville
s'enfonce en nous... (passé
simple, page 96)
en
espérant que me sera pardonné ce pillage, vais reprendre le fil de
la lecture dans la nuit, cueillir une autre facette..
Et puis, à propos
d'architecture, lire le monologue d'un qui serait Franck Llyod
Whright sous la plume de Marc-Antoine Durand chez Nerval
http://nerval.fr/spip.php?article39
dessiner un embarcadère
sur le Delavan lake
voir comment il compose
avec les autres systèmes
pontons, cales et
cabanes sur l’eau
c’est refabriquer le
lac en entier
mais
aussi
aujourd’hui je
reconstruis
prairie
la prairie
la vie dans la prairie
les architectures de la
prairie
et bellement (tant
admiré en ma jeunesse, comme tous) mais c'est autre chose.. l'utopie
hors de la ville comme il le dit
8 commentaires:
« Toute ville est comme une mémoire d'elle-même qui s'offre à être pénétrée et qui s'infiltre dans la mémoire de qui la traverse »
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Quel magnifique accompagnement à travers Avignon que ces mots et des images d'une grande poésie. Cela me fait rêver davantage de cette ville bien mystérieuse que je visite au quotidien, à travers votre album.
merci pour cette belle passerelle de Bailly à M-A Durand
tonique, ce matin, la lecture...
Au bord de la ville, au bord du temps.Le prendre, le distiller, le retrouver.
Bien vu la seconde vierge place du Palais !!!
Architecture ordonnée des photos d'Avignon et des mots choisis chez Jean-Christophe Bailly...
Ce qui est remarquable ce sont les mots qui s'appliquent aussi à notre ville , à nos monuments et cette atmosphère particulière qui surgit du passé par un simple détail
Aime cette vierge cachée
Je t'envie encore le soleil dans ta cour...ici il fait 13° ce matin...Vais-je résister à l'envie d'un petit feu de bois ?
J'ai quitté ta région samedi en y laissant son soleil et retrouvé ma grisaille.
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