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désolée, Paumée se veut à l'abri, sauf quand un acte fait déborder le vase, des allusions à la politique ambiante.. et si je suis reconnaissante aux envies de commenter je vous demande de me pardonner de rétablir la modération

jeudi, novembre 21, 2013

Quelques pas avec poètes en Turquie ou Palestine


Dans la fraîcheur sans agressivité, sous un ciel morne sans pluie, longeant arbres roux, vignes vierges qui commencent à rosir, m'en suis allée dans la ville, choisir longuement chapeau point trop moche, bonnet qui m'évitait autant que faire se peut d'avoir tête de cadavre, chercher et ne pas trouver un châle – et rencontrer deux têtes connues sans chapeau – et produits d'entretien dont des grands sacs poubelles.

Je suis rentrée dans l'antre pour ménage, déjeuner, très court sieston, et un tri trop rapide mais brutal de vieilleries pour en remplir un sac de 50 litres et un de 30 litres,.. et puis me suis reposée sur mes lauriers.

En déjeunant, très lentement, pour faire durer temps consacré à la lecture (une bouchée toutes les dix phrases de plus de trois lignes) du dernier numéro de Manière de voir consacré à la Turquie, suis tombée, après les ottomans sur un article concernant un barde anatolien Veysel Satiroglu et un poème à la terre noire d'Anatolie

Je lui fendis le sein à coup de pioche et de bêche.
Je lui déchirai la joue avec les ongles de ma main.
Elle, elle m'accueillit en me tendant une rose.
Ma seule fidèle amie, c'est la terre noire.
Si je m'adresse au ciel, je n'aurai que de l'air.
Si je soigne la terre, j'aurai la bénédiction.
Où pourrai-je m'abriter si j'abandonne ma terre ?
Ma seule fidèle amie, c'est la terre noire....
(traduction, je le suppose, par l'auteur de l'article Pertev Naili Boratav)

et puis, à côté des sacs, attendant qu'il soit l'heure de les sortir, dos au mur au dessus du radiateur, me suis plongée, pour nourrir http://brigetoun.wordpress.com, dans le recueil de poésie palestinienne acheté l'autre jour au Centre Européen de poésie (choix et traductions par Abdellatif Laâbi), cueillant, un peu au hasard, des fragments dont
de Mohammed al-As'Ad (né en 1944) la fin de «lis quelque chose sur l'absence»
La pluie s'acharne encore
et la joie est profonde comme la mort.
Les poètes maudits
offrent le festival de la mélancolie.
Lis quelque chose
de la tristesse des statues silencieuses
dans les yeux des poètes maudits.
De Walid Khaznadar (né à Gaza en 50, vit maintenant à Londres) «La conque de l'horizon»
Ils l'ont jugé face à la mer.
Il n'y était pas.
Le soleil déclinait
et le trottoir regorgeait de vendeurs et victimes.
Mais ils l'ont jugé
car il avait soutiré une conque et murmuré l'horizon
car il s'était glissé entre flux et reflux, faisant la différence
car il s'était divisé
moitié pour les embarcations qui ont appareillé
moitié pour ce lamento qui terrifie la ville.

Photo de Shirin Neshat iranienne (comme les bijoux : exposition images d'Orient à la collection Lambert fin 2012)
de Mohammed al-Quayssi (né en 44, vit lui aussi maintenant à Londres) un fragment de «Mort d'un émir palestinien»
Il dort dans la brume du soir mon aimé.
Il dort comme un émir.
Allumez deux cierges pour qu'il se réveille
un cierge pour qu'il me voie.

Il dort comme un olivier
ou un caillou immobile.
Il dort dans l'ultime trépas
comme un émir
comme un fleuve qui chante
et laisse s'échapper de lui le pays.
Il dort, et ses mains sur sa poitrine
suintent peine et ténacité......

Nazareth (m'y suis promenée sur google street)
mais finalement pour le blog Brigetoun j'ai retenu un fragment du long et selon moi beau poème «l'assassinat de Awwad al-Amarah originaire de Kofr Kanna» de cet assez extraordinaire personnage que fut Tawfiq Zayyad, n' en 1932 à Nazareth, qui fit ses études à Moscou, poète, membre important du parti communiste Rakah, maire de Nazareth, membre élu de la Knesseth, traducteur d'auteurs russes et de Nazim Hikmet, auteur d'un recueil de nouvelles et d'un livre sur le folklore palestinien (mort en 1994)
de lui : «Je serre vos mains»
Je vous appelle
je serre vos mains
j'embrasse la terre sous vos semelles
et je dis : Je vous donne ma vie
la lumière de mes yeux
Je vous donne la chaleur de mon coeur
car le drame que je vis
est mon lot de votre tragédie...
Merci à ceux qui ont eu la patience d'arriver jusqu'ici.

7 commentaires:

Dominique Hasselmann a dit…

Belle échappée "orientale" (la photo des mains est effectivement sublime).

arlette a dit…

Un très beau billet que j'aime
Merci du partage et le temps de nous l'offrir et le temps de lire pour nous
Beaux bijoux

Brigetoun a dit…

MERCI

mémoire du silence a dit…

"Ma seule fidèle amie, c'est la terre noire...."
merci

cjeanney a dit…

magnifique Brigitte. Et le dernier poème, je le prends comme un cadeau, me parle à moi
(ici la neige. ça fait du bien de voir de la lumière chaleur sur Paumée :-))

jeandler a dit…

Nourritures terrestres et autres, en mélange... La vie vient de la terre et y reviendra.

Anonyme a dit…

Un beau texte de plus. allearome